Gourmandises 15 – Marie, une incorrigible curieuse par Jerema
René m’a déposée sur le parking sur lequel j’ai garé mon véhicule. Nous nous sommes dit au revoir, se souhaitant un bon weekend, comme de bons amis.
Je prends le chemin du centre-ville, pressée de me rendre chez ma gynéco. Je me gare place Antonin Moine qui n’est qu’à quelques minutes de son cabinet.
La secrétaire, au courant de ma visite, me fait patienter dans la salle d’attente :
– J’informe le docteur Frachon de votre arrivée, elle va vous passer entre deux rendez-vous.
Je n’ai pas à attendre longtemps, perdue dans la lecture d’un magazine, une voix douce me hèle :
– Madame Bomptant !
Elle s’efface, je la devance et la porte tout juste fermée elle ne peut masquer sa joie.
– Marie quelle heureuse décision ! Je peux vous appeler Marie ? Et vous appelez-moi Florence, ce sera plus facile. Alors vous êtes d’accord ? Vous voulez bien que l’on essaie de faire quelques tirages ?
Ne bougez pas je prépare mon matériel ; ou plutôt, si je peux me permettre, déshabillez-vous, mettez-vous toute nue.
– Complètement nue !
– Oui, nue comme un ver.
J’obéis et me dévêts, comme je l’ai fait ici il n’y a pas si longtemps encore. J’étends mon ensemble sur le dossier d’une chaise, bien plié, sans faux-pli, je déboutonne mon chemisier qui choit lui aussi sur le dossier réduit en guise de cintre.
D’un regard perplexe j’observe Florence s’affairant à ouvrir un trépied ; elle y fixe son appareil photo, un Réflex Canon, un gros boitier noir coiffé d’un objectif non moins impressionnant. Elle me regarde à son tour, m’adresse un grand sourire et, tout en collant un œil dans son viseur elle fait les préréglages : hauteur des pieds, inclinaison, champ de vision. Ses doigts fins et agiles frôlent des touches, tournent molette et autre petit levier, l’index caresse le déclencheur, se ravise.
– Voilà, je suis prête. Marie, vous me considérez sans me voir, Continuez, ôtez vos sous-vêtements, sans hâte, faites comme si je n’existais pas.
[Clic-clac, clic-clac…], le déclencheur s’affole et l’objectif fige les mouvements de mon corps. J’ai enlevé mon soutien-gorge, je me courbe et fais rouler mon string le long de mes jambes.
– Stop, ne bougez plus !
[Clic-clac…], Florence a repris la main sur son appareil, elle s’est baissée, un genou à terre face à moi, en contre-plongée.
– Vos seins sont magnifiques Marie, quelques secondes encore, le temps de faire le bon cliché, celui qui « trônera » dans les galeries d’art…
Elle se déplace, me tourne autour comme une mouche autour d’un pot de confiture, elle se penche, se redresse, [Clic-clac], elle me capture sous tous les angles.
– Parfait ! Allez-y, enlevez votre petite culotte à présent.
Je l’écoute, je m’exécute.
Nue, désorientée, ne sachant pas vraiment pourquoi je suis là, je me plie à ses désirs. Debout, de face, de dos, de profil, flash, sans flash, je suis prise sous un feu nourri.
– Marie, redressez-vous, le menton plus haut…oui, ne bougez plus.
Elle se recule tout au fond de la pièce, elle refixe l’appareil photo sur son support, l’oriente, un œil dans le viseur :
– Marie, vous allez marcher dans ma direction, sans vous presser. On y va ? Allez !… C’est bien, on fait demi-tour en remuant le derrière.
Huit pas, des petits pas calculés. Je me retourne, Florence affiche un air mi-figue mi-raisin, je devine son insatisfaction.
– Marie, vous pouvez faire mieux. Soyez plus glamour, les reins plus creusés, le pas chaloupé, allez, épatez-moi ! Vous devez savoir faire cela.
Avec bonne grâce je parade une nouvelle fois.
– Ah !, c’est déjà mieux. Une dernière fois Marie, avec ce petit air, comment dire, un peu plus délurée, un peu « salope », dans le bon sens du terme bien sûr !
« Mon Dieu que fais-je ici, dans quelle autre galère me suis-je fourrée », je refais pour la troisième fois le même aller-retour. Je tords mon cul en croisant mes jambes à chaque foulée, comme le font les top-modèles lors des défilés de mode ; huit petits pas d’une démarche altière, le dos arqué, les seins gonflés, sous une rafale de prises de vues.
– Magnifique ! Vous êtes sublime !
Elle regarde sa montre :
– Mince, je suis désolée, mais je ne peux me mettre plus en retard, vous voyez, ce n’était pas si difficile que cela !
– Difficile, pas vraiment, mais gênant, oui ! Et puis cette façon de s’exposer, cette nudité, je n’avais jamais fait ces choses. Vous me laissez voir ?
– Bien sûr ! Tenez, les petites flèches, ici pour avancer, et là pour un retour en arrière.
Je sens les battements de mon cœur s’accélérer à chaque pression sur le bouton. Je me vois comme je ne me suis jamais vue. Les images me sautent aux yeux, ce corps aux courbes gracieuses, aux seins hauts et fermes, cette femme à l’allure si provocante, cette femme qui défile nue c’est moi ; je me surprends à m’admirer comme le font les hommes qui jettent un regard avide sur des photos de charme.
Soudain, prise d’une bouffée de chaleur et d’une terrible appréhension, je bafouille :
– Florence, vous allez en faire quoi de ces photos ! Je ne voudrais pas que…. (Elle m’interrompt).
– Marie, allons ! N’ayez aucune crainte. Vous imaginez, vu ma position, il serait fort dommageable que je puisse être impliquée de détention de photos personnelles de mes patientes. Dites-moi plutôt, vous vous trouvez comment ?
– Je ne sais pas, je ne me reconnais pas vraiment, un peu « salope » quand même !
Nous partons toutes deux dans un fou rire contenu. Je me rhabille, dubitative, troublée par cette inédite expérience.
– Alors ? Vous reviendrez me voir ? Marie, je suis obligée de prendre congé à présent.
Elle est toute proche de moi. Soudain, par surprise, ses lèvres déposent sur ma bouche un petit bisou furtif, je ne réagis pas, elle recommence, m’embrasse à pleine bouche cette fois ; sa langue force mes lèvres. Je recule, étourdie de cet au revoir inattendu.
– Florence ! Que faites-vous ?… Oui, je reviendrai peut-être…au revoir.
Il est déjà 17 heures lorsque je quitte l’immeuble cossu de ma troublante gynéco. Dans une petite demi-heure je vais retrouver mon havre de paix, avec son lot de vicissitudes : m’occuper des enfants, de la maison, de mon mari qui attend mon retour avec impatience. Je repense à son deal (OK !, tu vas à ton stage mais au retour tu me donnes tes fesses. Il me dit souvent rêver à ça, me prendre par derrière, par « la petite porte » comme il aime à dire). Depuis quand ne lui ai-je pas donné ce plaisir ? Je ne sais plus, c’est si loin, j’invoque invariablement qu’il est trop gros, qu’il me fait mal. Pourquoi lui refuse-je ce plaisir que je donne sans vergogne à mes amants, à René auquel je me soumets à ses plus vils désirs.
Margot est la plus prompte, la plus bavarde aussi.
– Puisque tu nous as laissés, tu es punie ! Tu nous feras des crêpes ce soir, avec du Nutella ! J’en veux beaucoup, miam, miam !
Damien confirme lui aussi son envie :
– Moi j’en veux aussi avec de la confiture, du Nutella et de la confiture de fraise.
– Et moi qui n’aime guère les crêpes à quoi aurai-je droit ?
C’est Mathieu qui se manifeste soudainement, il vient d’arriver et se colle dans mon dos. Ses mains se nouent autour de ma taille, il me fait un petit bisou dans le cou. Sa bouche cherche mon oreille, ses lèvres frémissent et me susurrent « tes fesses ma chérie, ce soir, moi je veux manger tes fesses », tu te rappelles de ta promesse ?
Je sais trop bien ce à quoi il pense, son ventre étaye ses propos et se presse très fort contre mes rondeurs.
– Bonjour mon chéri ! Ah bon, tu n’aimes plus les crêpes, c’est nouveau ça !
Le weekend s’est déroulé lentement. Il a eu ce qu’il voulait mon Mathieu, vendredi soir et aussi samedi. Par deux fois je l’ai laissé se répandre entre mes fesses prisant secrètement les ardeurs furieuses de son sexe, de son gros sexe choyé par mes chairs les plus sensibles, les yeux fermés, simulant l’ennui et la douleur, enfermée dans mon refus à lui dévoiler tout le bonheur reçu. Comment me confier, lui avouer cet appétit charnel de l’interdit, cette joie intense à m’offrir ainsi. Jamais je ne pourrai lui dire. À lui mon mari, au père de mes enfants, à l’homme de mes premiers flirts, de mes premiers émois, je ne sais ou n’ose lui exprimer toutes mes envies, tous mes fantasmes.
Le dimanche s’est emmitouflé dans son manteau noir, les enfants sont couchés, demain ils se lèvent de bonne heure. Mathieu, allongé sur le canapé, regarde sur Canal + le dernier match de la énième journée de ligue 1. C’est la mi-temps, trop heureux de son weekend, il se confie et dit consentir à ces séparations dans le futur :
– Tu sais ma chérie j’ai bien réfléchi, ce n’est pas si terrible que ça, alors je consens à tes déplacements futurs et puis je trouve que l’éloignement nous rapproche tellement ; mais à chacune de tes absences, une récompense en retour, et moi tu sais « les crêpes »…
– Mais dis, c’est un horrible chantage !
– Oui, mais j’aime trop ! Au fait, c’est quand que tu repars ?
Le coquin, l’infortuné, « s’il savait »… Mais au moins je déculpabilise, je me dis que tout cela n’est pas si grave, que tout repose dans la manière de gérer l’affectif, qu’il ne faut pas jouer un jeu que l’on saurait perdre, ne pas s’attacher et se laisser guider que par le seul plaisir des sens, des interdits.
Le matin pointe ses aurores, je ne dors plus, je me lève sans bruit. La cafetière crachote ses dernières gouttes de vapeur quand Mathieu émerge à son tour, il est 6 heures 30. Il m’empoigne par les fesses, dépose un bisou sur mes lèvres :
– Ma chérie j’ai rêvé de toi toute la nuit…
– Hé là ! On se calme, moi j’ai encore mal, alors laisse mon derrière tranquille, bas les pattes !
– Mmm, c’était trop bon.
– Peut-être à mon prochain déplacement…si tu es sage.
C’est le branle-bas de combat, les enfants se chamaillent, s’arrogent mutuellement le droit de passer premier, au WC, à la salle de bains ; « maman, comment je m’habille, et mon cartable il est où » ?
C’est ainsi tous les lundis.
Ouf, j’ai déposé les enfants devant l’école, au loin le clocher de l’église émerge au-dessus des toits du village. J’ai une pensée pour le père Jean-François qui va nous quitter, il n’en peut plus de mes aveux et de mes caresses, René s’invite lui aussi et s’efface pour Florence dont l’image se fige. Je rêvasse, j’imagine des choses, l’asphalte déroule son long ruban sombre sous les roues de ma voiture qui me conduit à mon travail.
Ils sont tous autour de la machine à café, Adrien, René et Stéphane le chef comptable. Je ne peux les éviter, et les salue poliment d’un » bonjour à tous » ponctué d’un petit signe de main.
– Vous prenez le café avec nous Marie ?
Adrien a été le plus prompt, il piaffe d’impatience de savoir…savoir quoi au juste ; il ne me laisse pas le temps d’acquiescer.
– Avec ou sans sucre, court ou long ?
– Court sucré ! Je pose mon sac, je reviens.
C’est assez rare que Stéphane prenne le café avec nous, c’est surtout le cas lors de décisions importantes, ou de résultats exceptionnels. Qu’en est-il cette fois, aucune rumeur les jours précédents, rien n’a filtré.
Je les ai rejoins et, impatiente, je jette le pavé dans la mare.
– Alors Stéphane ? Quelle bonne ou mauvaise nouvelle allez-vous nous annoncer, comme c’est toujours le cas lorsqu’on vous voit si tôt.
Adrien me tend un gobelet fumant et renchérit :
– Elle a raison Stéphane, en principe quand tu te pointes à cette heure parmi nous, c’est pour nous faire des confidences, alors il se trame quoi ?
Je croise le regard de René, un regard brûlant de désir, ces yeux qui me déshabillent, qui encore me supplient, je l’évite, mal à l’aise, loin de l’impertinence avec laquelle je lui fis toutes ses choses dont il raffole.
– Allez Stéphane, lâche le morceau (renchérit encore Adrien).
– Bon, vous le gardez pour vous, pas de fuite pour l’instant !…On va être racheté, un grand groupe… Ils ont mis le paquet, une offre que nos boss ne pouvaient pas refuser. En ce qui nous concerne, rien ne change, le comité de direction reste en place et il ne devrait pas y avoir de licenciements directs.
– Non, ce n’est pas vrai ! (s’écrit Adrien plus vexé que surpris de cette annonce). Merde alors ! Putain, ils ne nous en ont même pas parlé, on n’existe pas, on n’est rien…
– T’énerve pas pour ça, c’est la règle dans toutes les boites, il ne faut pas démobiliser le personnel.
– Ouais, mais quand même, les cadres pourraient être avertis. Et on devrait être fixé quand ?
– Dans les jours qui viennent, fin mars au plus tard, les boss montent à Paris mercredi je crois.
Le silence s’installe, nous buvons notre petit noir et chacun regagne son bureau. Du coup, pas de rapport de stage pour l’instant, c’est au moins ça de gagné, et puis lui dire quoi à Adrien, je ne vais tout de même pas lui narrer les détails de nos ébats amoureux, le pauvre il serait fou de jalousie lui qui me mange des yeux : « comment il baise mon chef, mieux que René, aussi pervers ? allez savoir ». Je me sens rougir, et puis zut, c’est ainsi. Revoilà Florence qui, à nouveau, ressurgit dans mes pensées : « faire l’amour avec une femme, non, juste me laisser faire, m’abandonner entre ses bras, sous ses baisers, juste passive, pour voir »…
Le téléphone me sort de mes rêveries, « Stéphane », que veut-il ?
– Oui Stéphane, quoi d’autre, ne me dites pas que je suis virée…
– Idiote, juste pour te dire une fois encore de tenir ta langue, si ça s’ébruite…et puis j’avais oublié une chose essentielle : tu es toujours aussi belle ma petite Marie.
– Stéphane ! Pas vous, vous n’allez pas vous y mettre aussi !
– Eh ! Crois-tu que je sois insensible aux jolies choses, aux belles roses épanouies. Ah, si j’avais vingt ans de moins ! Bon ça suffit, j’arrête de rêver, à plus.
Stéphane, qui l’aurait cru ! Lui le comptable rigoureux, strict, un peu coincé ; pour un peu il m’aurait fait des avances ce beau garçon, grand, sportif, la cinquantaine. Aurais-je un faible pour ces hommes posés, sûrs d’eux, sans préjugés, que l’âge aurait rendus graveleux. Je me sens comme une affreuse « cochonne » oisive. Ah l’oisiveté, mère de tous les vices, (maxime ô combien chargée de vérité), ne m’a-t-elle pas si souvent poussée vers cette luxure qui rode en permanence, toujours prête à me happer.
La réalité du moment me rattrape, une pile de dossiers traine sur mon bureau depuis mercredi midi et il aurait été vain de croire que quiconque fasse ce travail à ma place. Je m’assieds, allume mon ordi ; « ma petite Marie, finies les parties de jambes en l’air, on gomme ses souvenirs et on s’attèle à la tâche ».
Oubliées mes pérégrinations orgiaques, je suis à fond dans mes dossiers, le téléphone bourdonne à tout instant, le fax crépite, les mails pleuvent, quid des demandes de prises de rendez-vous, quid des appels d’offres, quid des relances de clients « négligés ». Une agitation incessante règne dans les couloirs, la reprise semble se confirmer.
La journée a filé à la vitesse grand « V », la nuit tombe doucement. J’éteins l’ordi, range mon bureau, et m’apprête à partir : « mince mon portable, où est-il ? » Enfoui au fond de mon sac, moi qui suis toujours à le surveiller, aujourd’hui je n’ai guère eu le temps de m’en soucier. Par habitude je le réactive, huit messages en attente, des pubs pour la plupart : [les jours Auchan et leur coupons de remise, Camaïeu, Red de SFR, Cabinet médical etc.]…
Le « cabinet médical », Florence Frachon ! Mon cœur se met à palpiter, que veut-elle ? Je clique : – Bonjour Marie, j’espère que vous avez passé un excellent weekend, je vous ai envoyé par email quelques photos retouchées, vous êtes superbe ! À très bientôt, je vous embrasse, Florence.
Un choc, un tsunami, des photos de moi, nue, par mail ! Mais quelle email lui ai-je donnée, je n’en ai pas le moindre souvenir, non, je ne vais pas rallumer mon ordi, je regarderai de chez moi, seule, quand tout le monde sera couché.
Le temps me dure de renter à la maison, je n’apprécie guère cette légèreté et me maudis d’avoir cédé à sa demande : « modèle pour photographe de nus, piégée par mon propre orgueil, par l’irrésistible envie de séduire, tu parles ! »
Les enfants m’accueillent avec leur joie coutumière, leur débordement de bisous et de question-réponses :
– Maman j’ai eu 17 sur 20 à ma rédaction (s’exclame Margot). C’est la meilleure note de la classe, j’ai droit à un cadeau !
– Et moi j’ai marqué 2 buts, moi aussi je veux un cadeau ! (Vocifère Damien).
– Oh doucement les enfants, les cadeaux on verra plus tard. Je suis fatiguée, vous me laissez me mettre à l’aise, et puis il faut que je vous fasse à manger. Mais c’est très bien tous les deux, venez que je vous donne un gros bisou.
Des bises qui claquent et qui roulent…Mathieu fait son jaloux :
– Et moi je n’ai pas droit à un petit baiser ? Même plusieurs, moi aussi j’ai bien travaillé, j’ai pris un gros chantier, une belle propriété avec un contrat d’entretien à l’année, un industriel.
Le diner est terminé, je nettoie la table. Les enfants sont partis se déshabiller et se laver les dents. Mathieu s’est posé sur le canapé et regarde je J.T. de vingt heures, le temps me dure d’être seule et d’allumer l’écran de notre ordinateur.
Enfin mes chérubins sont couchés, Mathieu s’est endormi devant la télé, comme souvent. Sans bruit je me suis installée dans le bureau et attends avec fébrilité que s’ouvre le funeste mail : – Bonjour Marie, je n’ai pu résister à l’envie de vous laisser vous découvrir à travers ses quelques photos dont je suis assez fière. Vous êtes d’une grande beauté.
Les vignettes s’affichent au-dessus de ce court message, elles apparaissent les unes après les autres : cinq, six, huit…douze. Je clique sur la première, elle s’ouvre ; je l’observe quelques secondes et lance le diaporama. En grand écran, je pose, nue ; sous tous les angles, le regard absent, je montre tout : mes seins, mon ventre imberbe, mes jambes, mes cuisses, mes fesses, mes reins cambrés. Les images défilent. Une ingénue lascive, vêtue d’un flou artistique instable, parade, se dévoile, juste pour exciter, pour réveiller certains désirs. Ma colère s’apaise, chassée par un narcissisme obscur.
Je reprends la lecture de son mail : – Rappelez-moi bien vite, sur mon portable, j’ai tellement hâte de vous revoir. Amitiés. Florence.
Je me déconnecte et éteins l’ordinateur. Damien dort sur le divan, je le secoue et lui dis que je vais me coucher.
Nous sommes déjà vendredi, les jours ont défilés sans que je n’ai le temps de penser à mes dérives amoureuses, ni à Jean-François dont le départ pourtant me chagrine ; je vais devoir me passer de ces instants étranges passés dans le confessionnal, à me faire sermonner tout en savourant l’élixir du repentir.
Il est 17 heures, l’ultime instant pour me décider : « Florence » et ses mails auxquels je n’ai pas répondu, Florence qui m’exhorte à nous revoir, des invites chaleureuses et obsédantes : ce samedi matin, au cabinet, venez, nous serons seules, sous l’égide du « photographe » qui désire tant nous voir ensemble, oui nous deux, toutes nues…
Je ne gamberge plus, je prends mon portable :
– Allo chéri ? Dis-moi, j’aimerai que demain matin tu t’occupes des enfants, Carole voudrait que l’on fasse les boutiques, elle a tellement insisté que j’ai dit oui. Mais promis, je serai raisonnable.
Il bougonne, proteste, me clame que lui aussi a du boulot puis il s’adoucit :
– D’accord, mais à une condition, je te laisse deviner laquelle, c’est à prendre ou à laisser !
– Mais dis, là tu exagère ! Bon on verra ! Neuf heures-midi , tu la connais Carole, elle n’est jamais pressée.
– Mais oui ma chérie, prenez votre temps…je vais le « chouchouter » ton derrière !
Je raccroche, prise d’une soudaine appréhension, j’ai mon alibi et maintenant il me faut me décider ; y vais-je, n’y vais-je pas : « nues, toutes les deux…», un mail sans équivoque. Du bout des doigts je frôle les touches de téléphone dont les chiffres indubitablement s’affichent, les uns après les autres, et me remettent la clé de la tentation. Mon cœur bat plus fort lorsque mon doigt enfonce la touche OK.
– Oui allo ?
– Madame Frachon ? Marie Bomptant à l’appareil, je vous dérange peut-être…
– Marie ! Comme je suis heureuse de vous entendre, je suis en consultation mais je vous en prie, dites-moi.
– On pourrait se voir demain, à 9 heures 30, si vous le voulez toujours bien sûr.
– Oh ! Vous exaucez mon vœu le plus cher. Merci, de tout cœur. À demain, ici au cabinet. Passez une bonne soirée.
On raccroche presque simultanément. Il est trop tard pour avoir des remords, et puis en est-ce vraiment ? Non, une peur de l’inconnu, un désir obscur à me laisser guider sur le chemin d’un lesbianisme passif. Un souvenir surgit : (nous avions failli franchir le pas, Carole et moi, lors d’une soirée un peu arrosée. Il y avait eu quelques baisers, quelques attouchements, mais nous n’étions pas allées plus loin, effarouchées sans doute par une montagne d’à priori, je ne sais pas vraiment. Nous n’en avons jamais parlé, par pudeur ou par crainte, peut-être, de se révéler sous des auspices criants de vérité). Carole, ça me fait penser qu’il vaudrait mieux que je l’appelle, sait-on jamais.
– Carole ? Bonjour, c’est Marie.
– Oh Marie ! Quelle bonne surprise, tu vas Bien ?
– Merveilleusement bien ma « bibiche », dis-moi, j’ai un service à te demander, juste au cas où : demain matin, on fait du shopping ensemble, c’est du moins ce que j’ai dit à Mathieu. En fait je bosse mais il ne supporte plus que je passe mon temps au boulot, alors on s’engueule. Il ne comprend pas, il voudrait d’ailleurs que je démissionne, que je reste à la maison. Mais bien sûr ! L’épouse fidèle et soumise, à faire la bonne, moi j’aime ce que je fais. Alors si par hasard vous vous trouviez, ne gaffe pas !
– Alors toi ! T’es sûr que tu me dis la vérité, mais bon, il n’y a pas de soucis, donc demain matin on est ensemble.
– Merci ma petite Caro, je te rappelle dans la semaine, bon weekend !
Le ciel est bleu ce matin, et le soleil rasant irise le givre de la prairie environnante. Un temps sec et éclatant semble vouloir s’enraciner pour cette drôle de journée.
J’ai mis mon tailleur tête de nègre et un chemisier crème, des dessous noirs et une paire de bas Dim-Up noirs aussi. Il fait décidément encore bien froid, j’enfile mon trench-coat gris et noue un foulard à mon cou. Je suis sur le départ.
– Bisous les enfants, je m’en vais, à tout à l’heure ! Bise mon chéri, le repas est prêt, je vous ai fait des spaghettis avec des boulettes de viande, il n’y aura qu’à les réchauffer. Je serai là pour midi, promis !
Florence m’accueille chaleureusement. Sans hésiter elle dépose un petit baiser sur mes lèvres, elle est radieuse et son bonheur de me voir est palpable. Je me sens bizarre, dans ce nouveau rôle de « pin-up ».
– Comme je suis contente que vous soyez venue Marie, alors elles vous ont plu mes photos ?
– Je suis là ! Donc je n’ai pas été choquée, juste un peu emportée après vous. Vous ne deviez pas les mettre en ligne, j’ai l’impression que tout le monde pourrait les voir à présent.
– Mais Marie, c’est juste entre vous et moi, pas plus. Allez ne vous inquiétez pas. On remet ça ? Je veux vous découvrir plus, comment dirai-je, plus intimement. On va passer dans le bureau à coté, il est plus chaleureux, moins formel que celui-ci, venez !
En effet, la pièce est un vrai cocon, les boiseries et les murs sont peints de différents tons gris. Une moquette dense et souple supporte un rustique bureau en bois et sa chaise assortie. Deux imposants fauteuils en cuir fauve trônent aux coins de chaque côté de l’unique fenêtre bordée de larges tentures. Un trépied, un paravent blanc et un projecteur orientable attendent sagement leurs proies et le chasseur d’images. Derrière la porte se cache un porte-manteau design laqué noir.
Une douce chaleur y règne, atmosphère propice à la nudité.
– Voyez comme on sera bien ici, j’ai monté le chauffage, nous n’aurons pas froid.
– Pourquoi « nous », vous allez vous mettre nue aussi ?
– Oui je préfère l’être quand je photographie mes modèles, elles se sentent plus à l’aise, sur un pied d’égalité si vous voyez ce que je veux dire. Ça vous ennuie ?
Je lui souris et fait non de la tête.
Nous sommes nues, j’ai gardé mes Dim-Up, à sa demande. Florence arbore un corps aux galbes parfaits, avec de petits seins ronds et hauts et une taille marquée par des hanches qui s’élargissent sur un ventre plat orné d’un pubis blond doré, taillé court. On se regarde, méfiantes, circonspectes.
La séance est lancée, je pose : obéissante et appliquée, souriante, dubitative, secrète.
– Vous êtes un modèle de rêve, vous auriez pu en faire votre métier, un vrai métier, et pas que dénudée. Dites-moi Marie, j’aimerais, comment vous dire, bon j’aimerais que vous posiez dans des postures plus lascives, plus subjectives, plus coquines…vous voulez bien qu’on essaie ?
– Je dois faire la « pute » ? Jambes écartées ? C’est cela que vous me demandez ?
Interloquée, elle me fixe intensément, mais elle se reprend et d’un air bouleversé :
– Oh non ! Une femme que l’on désirerait, que l’on voudrait faire fondre sous les baisers, que l’on voudrait aimer, Marie, pas une vulgaire prostituée !
– Je dois tout montrer, ne rien cacher ?
– Oui, tout ! Dévoilez-vous, soyez sensuelle, troublante, enflammez-moi ! Je veux fixer toute votre beauté dans mon capteur. Marie asseyez-vous sur le fauteuil, remontez une jambe, le pied à plat sur l’assise, écartez la légèrement. Oui, fixez l’objectif à présent, ne bougez plus.
Elle déplace le projecteur de côté, l’oriente fait sa mise au point et shoote à maintes reprises. Le zoom avance, s’éloigne, se bloque pour une nouvelle rafale.
– Superbe ! Relevez l’autre jambe, oui comme ça ! Laissez-vous glisser, remontez vos fesses, passez vos jambes sous vos bras, là, parfait !
[Clic-clac, clic-clac], une volée de nouveaux clichés, je vois Florence se redresser, elle s’approche de moi, s’agenouille, me scrute ; je ne dis rien, elle est ma gynéco et moi sa patiente. Imperturbable, son visage s’avance, ses lèvres frémissent, elle murmure :
– Laissez-moi vous aimer Marie, je le veux tant. Fermez les yeux, détendez-vous.
Sa bouche me frôle, ses lèvres paressent sur mon sexe, sur mon ventre puis sur mes seins qu’elle tête goulûment. Elle prend ma bouche qui ne fuit pas, qui s’entrouvre. Nos langues s’enroulent. On s’embrasse, c’est frais, c’est bon.
– Je veux vous faire jouir, vous verrez, ce n’est pas si différent d’avec un homme.
Elle chemine en retour, se tétanise entre mes fesses, le regard bas. Sa bouche m’enveloppe, s’accole autour de mon petit puits d’amour, sa langue me lèche, peu à peu s’enfonce dans un accouplement rectal brûlant. Ses lèvres m’aspirent, me mâchent. Mon corps m’échappe, se rue au-devant de sa caresse : « comment sait-elle », c’est bon, sa langue se vrille, s’immobilise. « Elle sait et me le montre », ses mains enveloppent mes fesses, les écartent, son visage se plaque plus fort encore. Sa peau est douce, loin des joues rugueuses de René qui se plaisent à supplicier les contreforts de mes rondeurs. Le pouce de sa main droite se risque à l’entrée de mon vagin que je devine horriblement mouillé. Il glisse et s’enfouit. Il sort et court le long de mes grandes lèvres. Là, il l’a trouvé, il le caresse en mouvements circulaires. Florence s’est approprié mon petit bouton et le triture entre son pouce et son majeur.
C’est ma chatte qu’elle embrasse à présent, dans un baiser fougueux sa langue s’immerge dans une mare de secrétions visqueuses, le pouce de sa main gauche a pris la place vacante et s’est logé dans mon gracile œillet.
Le souffle court, je loue l’audace de mon éducatrice qui s’oblige à sortir de leur somnolence toutes mes tendances saphiques.
– Oh Ouiiiiii !
« Un cri du cœur ! », sa bouche reflirte avec mes fesses, sa langue plonge et m’arrache un râle de plaisir : si elle doutait elle sait, dorénavant, où ses faveurs trouvent grâce. Elle me fore profondément, sa langue alterne entre ma chatte et mon étroite fissure.
Je ferme les yeux. Elle me déguste, tel un petit plat bien mitonné, comme le fait si bien René quand il lèche à coups de langue rageurs mes doux trésors baignés des épices de mon petit trou d’amour poissé d’une négligence complice dont il me remercie avec extase : ( Ohhh, quelles saveurs exquises, ce mélange de fraicheur et d’outrance, de pureté et de souillure, quel enchantement ! Merci ma chérie pour cette mise en bouche. )
Florence elle aussi me mange, me dévore, ses dents mordillent mon périnée, sa bouche suçote mes grandes lèvres ; un puis deux doigts s’infiltrent et s’agitent dans les replis baveux de mon fondement.
Elle aussi, elle l’aime mon cul : elle me sent, me renifle, sa langue encore et le bout de son nez qui pointe, se frotte et force ma sombre caverne. Je frisonne, je geins, je me trémousse.
Sa bouche remonte jusqu’à mon turgescent bourgeon qui se laisse étreindre par ses lèvres pulpeuses. Mes mains empoignent son visage, l’immobilisent entre mes cuisses.
– Oh oui c’est bon…
Ce n’est plus deux, mais trois doigts qui auscultent avec zèle le goulet trop réceptif de mon derrière. Des étoilent dansent devant mes yeux et mon cœur bat trop fort. Je vais jouir, je lâche prise…
– Oh oui, encore, ouiii, ouiii…
Longtemps, longtemps encore elle me doigte et me mâchouille, jusqu’à ce que je la repousse, mon petit bouton d’amour récusant toute caresse.
– Quelle heure est-il ?
Florence me sourit, fière d’elle. Elle se relève, s’étire, se masse le bas du dos et regarde sa montre.
– Onze heures ! Attendez, ne bougez pas, juste quelques photos encore, s’il vous plait.
Mes jambes se détendent, glissent, mes pieds se posent, s’ancrent dans la moquette, je sors lentement de ma torpeur, recouvre subitement tous mes esprits. Je bondis presque :
– Je vous en prie, arrêtez ce simulacre sordide, on s’écarte de votre supposée séance photographique de « nu artistique », je me sens sale, trahie, vous comprenez ?
– Zen, Marie, zen ! Ne vous laissez pas submerger par un sentiment de honte ou de colère, nous n’avons rien fait de mal, rien qui ne mérite pareil état. Vous êtes si belle, si désirable, vous pourriez être cette femme qui embraserait les sens de milliers de gens, hommes et femmes confondus. Trouvez-vous cela si méprisable, si abject ? Non Marie je ne vous ai pas trompée, je ne fais que retranscrire l’empressement que j’ai pour vous, rien d’autre. Vous me croyez ?
– Toutes ces photos, je ne vais plus dormir tranquille, détruisez-les ! S’il vous plait.
– Vous avez peur ? La peur génère parfois des réactions bizarres, je les garde pour moi. Rhabillez-vous, vous allez être en retard et je ne voudrais pas que votre mari m’en veuille. Toutes ces photos, je vous réserverai les plus belles, mais rien que pour vous, soyez sans crainte.
Mince ! La boulangerie, si j’oublie le pain…
Tout va bien, à onze heures quarante je regagne ma petite famille qui ne manque pas de me chambrer : « Eh bien, tout un matin pour rien acheter ! »
– C’était juste pour accompagner Carole, je n’ai pas trouvé grand-chose, ce n’est que partie remise. Vous avez faim ? Je me change et on passe à table.
– Tu ne me paierais pas l’apéro ? Un Ricard bien frais et quelques olives avec.
– Ah bon ! Et pour moi un Martin rouge alors.
Mathieu me hèle des yeux, en silence. Puis dans un murmure ses lèvres articulent lentement :
– Ton « petit trou », ce soir, je le veux, tu m’as promis.
Mathieu, René, Florence, qu’est-ce qu’ils ont tous à s’émerveiller devant mes fesses, sont-elles si parlantes, si revendicatives du droit à la gratitude ? Une exigence secrète, incoercible, sommeille à l’embouchure de mon derrière qui dès la moindre caresse s’émeut, frémit sous des bisous furtifs ; il se languit d’une bouche entreprenante, d’une langue plus téméraire qu’il sollicite, qu’il encourage avec empressement. Il est ainsi ce « vilain » gourmand, trop sensible, insatiable. Et mon Mathieu à qui je feins la complaisance lors de ses « odieux » chantages, si je me lâchais aussi, avec lui, si je lui disais mon bonheur à jouir ainsi…non, je ne peux pas, pas encore, plus tard peut-être.
À suivre
Exhibition, voyeurisme, lesbos
Pas mal, mais l’auteur nous a habitué à beaucoup mieux
Plus réserve que d’habitude, mais ça reste très beau
Alors personnellement j’utilise depuis quelques temps le shampoing Fresh pour cheveux normaux regraissant vite car j’ai les cheveux très long qui ont justement tendance à graisser rapidement.
Et le rapport avec le récit de Jerema, c’est quoi au juste ?