53.
Patrice raccompagna Alice jusqu’à chez elle. Le vent et la pluie avaient cessé. Sur le chemin, elle s’arrêta net.
– Qu’est-ce qu’il t’arr…
Et avant que Patrice ne puisse terminer sa phrase, Alice prit son visage dans ses mains et l’embrassa tendrement. Le baiser s’éternisa, ses bras passèrent autour du cou et sans s’en rendre compte, elle plia une de ses jambes.
– Whaaah, fit Patrice lorsqu’elle relâcha l’étreinte.
– Tu m’as fait comprendre que j’avais été injuste avec toi, que je m’étais mal comportée.
– Tu n’as pas à t’excuser. Je sais que c’est difficile pour toi. Tu aimes une femme, la mienne en l’occurrence ; on t’a imposé de te travestir et de te faire enculer, juste parce qu’on a joué avec tes sentiments. Mais j’avoue que si tu en avais un peu, juste un tout petit peu, je serais le plus heureux des hommes.
Alice le regarda un moment et l’embrassa à nouveau. Patrice lui rendait le baiser, mêlant sa langue à la sienne. Ses mains caressait son dos, ses fesses, sentit les jarretelles. Son sexe prit du volume mais Alice ne s’en rendit compte à cause de son manteau.
Leurs lèvres se séparèrent mais Alice resta enlacée. Sa bouche glissa vers son oreille.
– J’ai envie de toi, souffla-t-elle
Patrice se recula, surpris.
– Tu es sérieuse ? Ou tu dis ça pour me faire plaisir ?
– Les deux.
Alice en avait envie. Ou du moins le croyait-elle, application de la méthode Coué, version subliminale.
Elle ouvrit la porte, jeta les clés sur la console et prit Patrice par le cou pour l’embrasser. Du pied, elle claqua la porte.
Enlacés, elle poussa son amant jusqu’au canapé, se mit à genoux devant lui et défit son pantalon, tout en prenant garde à ses ongles longs et vernis. Elle sortit sans problème le sexe dur qu’elle mit en bouche.
– Oh Alice ! Qu’est-ce que c’est bon. Tu m’excites comme jamais. Je ne vais pas tenir longtemps.
Alice s’activa de plus belle et, en effet, très vite, elle sentit les signes annonciateurs de l’éjaculation. Elle se recula, ouvrit la bouche et attendit le premier jet qui macula son visage.
– Tu es bien salope, ce soir, dit Patrice alors qu’Alice léchait son sexe pour récupérer les dernières gouttes.
– Je me suis dit que tu aimerais.
– La preuve que oui. Je n’ai jamais joui aussi vite.
– Tu me fais l’amour ?
– Je voudrais bien. Mais Bérénice ne sait pas que je suis ici. Elle m’attend. Si elle appelle mes amis chez qui je suis censé être, je suis mal.
– S’il te plait…
– J’ai très envie de te prendre, mais je dois y aller.
– Allez, juste quelques minutes de plus ou de moins, qu’est-ce que ça change ?
– Tu m’aimes ?
La question déstabilisa Alice.
– Je ne sais pas. Je veux voir si en prenant l’initiative, ça déclenchera quelque chose.
– ok.
Alice s’accroupit et suça le sexe de Patrice. Puis jugeant qu’il était suffisamment dur, elle s’allongea dans le canapé, les genoux sur son buste, le cul offert à son amant.
Patrice cracha sur la rondelle, glissa un doigt, cracha à nouveau, glissa un deuxième doigt. Alice fouilla dans son sac à main posé à côté et sortit le tube de lubrifiant. Patrice enduisit son sexe et la pénétra doucement, son sexe, pourtant imposant ne rencontra pas d’obstacle.
– Oh oui, comme ça, je la sens bien, gémit Alice. Baise-moi doucement
Patrice lui fit l’amour tendrement, sans la brusquer. Pour une fois qu’elle demandait, ce n’était pas le moment de la dégouter. Mais il éprouvait une certaine gêne car Bérénice ne savait pas qu’il était là et d’une certaine façon, il avait l’impression de la tromper.
Alice se faisait sauter par Patrice sur le canapé. Ironie du sort, presque deux ans jour pour jour plus tôt, c’était Bérénice qui trompait son mari pour la première fois à ce même endroit.
Patrice pressé par la montre accéléra le mouvement. Alice simula une fois de plus son plaisir et força le trait lorsqu’il éjacula.
Alice se releva, prit discrètement son sac à main et fila vers la salle de bains pendant que Patrice se rhabillait.
– Et voilà, dit-elle en revenant. Tu as la permission.
Elle tendit son smartphone à Patrice qui put lire la discussion entre sa femme et Alice.
– Coucou Bérénice. Patrice est chez moi et je le garde pour la nuit.
– Je m’en doutais un peu. Amusez-vous bien mes chéris. Je vais appeler mon ami Godichou
Suivait une photo où l’on voyait un sex-toy à moitié enfoncé dans le sexe luisant de Bérénice.
Alice entraina Patrice sous la douche. Pas de sexe mais de longs baisers et une fellation qui n’aboutit pas.
Lui nu, elle vêtue d’une nuisette, ils s’allongèrent sur le lit. Alice vint se coller dans le dos de Patrice passant sa main par-dessus pour le caresser. Ce n’était pas la première fois qu’ils dormaient ensemble et seuls. Mais cette fois, Alice n’éprouva pas la même sensation. Elle se sentait bien, tout simplement.
54.
– Merci Patrice pour cette soirée et cette nuit. Pour la première fois, je me suis sentie bien avec toi. Mais il est encore trop tôt pour des sentiments plus profonds.
– C’est un bon début, dit-il. Je serai patient. Mais pas trop quand même…
– Oui, je comprends.
Patrice quitta l’appartement à six heures trente. Il lui fallait d’abord passer chez lui pour se changer avant d’attaquer sa journée de travail.
Alice se prépara pour ses rendez-vous à Nantes, notamment avec Pierre Granberg.
– Alors ? demanda Bérénice. Comment ça s’est passé ?
Patrice raconta la soirée, le restaurant, la partie de sexe, son trouble à l’idée de tromper sa femme. Mais il ne fit pas mention de la proposition qu’il avait faite à Alice concernant une vraie poitrine.
– Elle n’est toujours pas amoureuse de toi alors.
– Non. Et je doute que cela arrive. Elle fait des efforts, c’est sûr. Mais c’est son côté homme qui parle. Elle n’est femme que dans ses vêtements.
– Oui. C’est clair.
Ils en restèrent là. La journée se passa entre averses et rayons de soleil.
– J’ai eu une idée, dit Bérénice pendant le diner.
– Oh, oh, je crains le pire.
– Et si tu invitais Alice pour un week-end en amoureux. A Paris par exemple. Juste toi et elle, sans moi. Comme si je n’existais pas. Peut-être que de vrais sentiments naitrons.
– Bonne idée en effet. Et si ça ne marche pas, on pourra dire que c’est mort pour de bon. Mais toi, ça ne va pas te gêner ?
– Mais non mon chéri. Je t’aime plus que tout et je te fais totalement confiance. Mais n’en profite pas pour aller te promener dans les bois.
– Ah non, t’inquiète. J’ai Alice avec moi. Que demander de plus ? Quand est-ce que je peux y aller ?
– Pourquoi pas ce week-end ? Il faut en profiter tant qu’elle est dans de bonnes dispositions. On fera les réservations après manger.
La réservation de l’hôtel et des billets de train fut faite comme convenu. Ils appelèrent Alice dans la foulée pour la prévenir. Bien évidemment, elle ne s’y attendait pas et ne sut que dire, si ce n’est d’accepter.
Patrice et Alice se retrouvèrent sur le quai de la gare. Elle fut surprise de voir qu’ils allaient voyager en première classe.
– Tu es ravissante, dit-il
– Pourtant, c’est la même tenue que l’autre soir.
– N’empêche, tu es ravissante.
– Merci, c’est gentil.
Patrice monta sa valise et ils s’installèrent à leurs sièges.
– Pourquoi ce week-end ? demanda Alice.
– Pour que l’on ne soit que tous les deux, sans Bérénice. D’ailleurs interdiction de parler d’elle, ni de l’appeler, ni même de lui envoyer un sms. Pour ces deux jours, on l’oublie. Elle n’existe plus. Il n’y a que toi, moi et le monde entier.
– Et pourquoi que tous les deux ?
Patrice la regarda.
– Tu es vraiment très belle, tu sais. Vraiment. Je t’aime très fort. Autant que ma femme. Et ce week-end c’est pour essayer de faire naitre en toi la flamme de l’amour pour moi.
– C’est mignon. Mais je ne sais pas …
– On verra. On a deux jours rien qu’à nous.
Le voyage se passa sans encombre et chose rare, le train arriva à l’heure. Ils se rendirent à pied à l’hôtel Ibis et s’installèrent dans leur chambre. Puis ils ressortirent pour diner dans l’une des nombreuses crêperies du quartier.
Lorsqu’il rentrèrent à l’hôtel, Alice se doucha et revêtit une nuisette noire.
Patrice la rejoignit quelques minutes plus tard dans le lit et éteignit la lumière.
– Merci pour ce week-end, chuchota Alice.
– De rien ma chérie.
Dans le noir, Alice chercha le visage de Patrice et l’embrassa sur la bouche.
– Tu ne veux pas faire l’amour ? demanda-t-elle avec une pointe d’étonnement dans la voix.
– Non, pas ce soir. On arrive. On a tout le temps pour ça.
– Bon d’accord.
Mais Alice ne savait pas trop si elle était heureuse ou triste de ne pas avoir à subir les assauts de son amant.
Le lendemain, Patrice annonça le programme : métro et balade sur les Champs Elysées, place de la Concorde, Louvre, Hôtel de Ville, Notre Dame.
– Tu n’as pas des chaussures moins hautes ? Car tu vas souffrir. On va beaucoup marcher tu sais.
– Euh, non, je n’ai que ça. Désolée.
– Bon, pas grave. On verra …
Ils firent un détour par la galerie marchande sous la tour Montparnasse et trouvèrent une paire s’escarpins à petits talons pour Alice. Elle continua de flâner dans les magasins pendant que Patrice revenait déposer à l’hôtel les talons aiguilles, sexy mais inadaptés.
La ligne six les amena rapidement en haut des Champs Elysées. Ils descendirent l’avenue noire de monde et apprécièrent les illuminations visibles dans la grisaille matinale. Ils entrèrent dans une galerie et s’installèrent à la table d’un café.
– Je te laisse commander, je vais aux toilettes annonça Patrice.
Alice jeta un coup d’œil autour d’elle. Même si elle était à l’aise avec son travestissement, les vieux réflexes refaisaient parfois surface.
– Bonjour mademoiselle. Vous êtes seule ? Je peux vous tenir compagnie ?
Alice releva la tête se demandant qui pouvait l’apostropher de la sorte. Elle reconnut aussitôt Patrice. Elle ouvrit la bouche mais comprit sa manœuvre : il allait la draguer comme s’il ne la connaissait pas, comme si c’était leur premier rendez-vous.
Alice joua le jeu à fond et Patrice était un très bon comédien. Ils marchèrent beaucoup, traversèrent les jardins du Louvre, firent un détour par la place Vendôme, s’extasiant sur des bijoux qu’ils ne pourraient jamais s’offrir, prirent le métro pour aller sur l’opéra et les grands magasins et leurs vitrines magiques qui émerveillaient petits et grands.
Ils rentrèrent assez tard à l’hôtel.
Alice bénissait l’initiative de Patrice qui l’avait fait changer ses escarpins. Ses pieds lui faisaient un mal de chien. Elle se déshabilla et prit une douche. Patrice l’attendait, toujours habillé. Alice s’approcha de lui, le regarda dans les yeux, passant ses mains sur son torse. Elle approcha sa bouche du visage de son amant pour l’embrasser.
Mais au dernier moment, celui-ci détourna le visage, refusant le baiser.
– Pas le premier soir, dit-il pour s’excuser.
– On joue encore ?
– Oui, jusqu’à demain soir, jusqu’à ce qu’on arrive à La Rochelle.
Alice tomba de haut. Elle ne s’attendait pas à ça.
– Je vais dormir dans une autre chambre. On se retrouve demain au petit déjeuner vers neuf heures.
Il lui fit la bise sur la joue et quitta la chambre avec sa valise.
Alice était abasourdie, incapable de réagir. Le week-end en amoureux virait au désastre total, surtout après la journée magique qu’elle avait vécue.
A suivre