Framm
5 – Un rôle pour Mylène
par Kassariel
note du webmaster : pour une bonne compréhension de ce texte qui nous a été envoyé du Canada, il convient de savoir que Pimp est le terme anglo-saxon pour proxénète
Spécialiste, je pouvais porter des armes en public. Je pouvais les porter dans les aéroports, les navettes, les zones gouvernementales, pratiquement partout. Un tel avantage était particulièrement intéressant pour un garde du corps. Et puis il y avait mon halo qui me rendait menaçant, ce qui était très utile pour dissuader les gens qui cherchaient à trop s’approcher. J’avais enfin trouvé une manière de faire un travail payant tout en ne mouillant pas dans le crime. Je n’aimais pas mon client, mais je n’avais pas besoin de l’aimer.
Je portais veston et cravate, de beaux pantalons, une ceinture de cuir. Des souliers cirés à la place de mes bottes de combat. J’aurais préféré mon linge habituel, parfaitement adapté pour le combat, mais si c’était le sacrifice à faire pour me sortir du trou, je le ferais allègrement. Je devais avouer que j’avais une particulièrement belle gueule, rasé de près, astiqué, éminemment présentable.
La vie était belle!
– « Bonsoir, Monsieur Arkel… »
Le sourire d’Alem était détendu. Il pouvait voir, de par la faible puissance de mon halo, que j’étais de bonne humeur. Et pourquoi pas ? Alem n’était pas exactement une bonne personne, mais qui l’était, devant survivre dans les bas-fonds de la société?
– « Et une bonne soirée à toi aussi, Alem, » je lui répondis, ce qui sembla lui plaire.
Des portes à droite, des portes à gauche. Je prenais mon temps. Deux chiens se battaient dans un corridor, certains passants arrêtés pour les voir à l’œuvre. Ils eurent une petite pause, me regardèrent, et décidèrent de recommencer à se mordre allègrement. Un autre corridor, puis un autre, et j’étais rendu dans mon coin, une zone plus tranquille et propre. Un coup d’œil à ma porte me permit de constater qu’elle avait été ouverte depuis mon départ, mais Milène avait laissé sa marque habituelle.
Elle était présente. Comme c’était le cas depuis que je lui avais fait mon coup au cinéma, elle ne répondit pas à mes salutations. Elle me boudait. Depuis plus de trois semaines. Tant pis pour elle. J’étais de bonne humeur. Le pire, c’était qu’elle avait réussi à bien s’en tirer : avec sa longue chemise lui tombant à mi-cuisse, elle était parvenue à faire comme si de rien n’était, à prétendre qu’elle avait des shorts sous sa chemise, et à bluffer son chemin jusqu’à mon appartement. Combien de temps me bouderait-elle encore? Difficile à dire. Pas important.
Je me mis à l’aise, mettant des vêtements plus confortables. L’armoire ouverte, une fine robe blanche capta mon attention. Je rangeai mon veston, puis tirai cette robe à ma vue, souriant de plus belle. Ah ! Quelle nuit que celle-là avait été! Il y avait maintenant deux mois, moi et Milène avions entrepris de la « déflorer » à nouveau. Nous en avions fait tout un rituel. Elle avait joué l’ange innocent. Je l’avais « instruite ». Deux jours ensemble, dévoué à ce petit jeu, à bâtir le moment, à aiguiser l’anticipation.
Un jour, peut-être, elle irait voir son spécialiste en la matière pour se refaire encore une autre virginité. Peut-être. Ce jeu se devait de demeurer rare, ou il perdrait sa valeur.
Je sentais ses yeux, et je savais combien elle se rappelait du moment. Elle était entrée profondément dans son rôle, l’avait joué à la perfection, et ces deux jours avaient été encore plus intenses pour elle que pour moi, ce qui n’était pas peu dire.
La robe avait une déchirure à l’aine, toute cette zone tachée de sang. Le tissu était plus fragile en cet endroit, mais c’était son hymen reconstitué qui avait déchiré avant le matériel de la robe. J’allais m’en souvenir longtemps. Du sang sur un matériel d’un blanc pur et éclatant. Juste à le regarder…
Je sentais la frustration de Milène. Elle se rendait bien compte que je n’allais pas être le premier à plier, que c’était bien plus dur pour elle que pour moi, et les souvenirs déclenchés par la robe tachée, les désirs ravivés…
Elle capitula, éventuellement, avec un rire franc.
– « Très bien, Arkel. Tu gagnes. Bonjour à toi aussi. »
– « Tu as eu une bonne journée? » Je lui demandai, rangeant la robe, puis me tournant pour lui faire face.
– « Disons. J’ai vu mieux. »
– « Des problèmes? »
Elle secoua la tête.
– « Juste un manque de progrès dans une affaire que j’aurais dû être en mesure de résoudre depuis un temps, déjà. Ça arrive. »
Elle était assise à la table de cuisine, son ordinateur portable déployé. Il y avait des paladins qui laissaient leurs aides faire l’analyse des données, mais Milène était du type à vouloir faire une partie de ce travail elle-même. C’était laborieux, mais elle disait mieux comprendre ses dossiers ainsi.
– « Tu veux qu’on en parle? »
Elle secoua la tête.
– « Désolé. C’est un peu en haut de ta cote de sécurité. »
Je hochai de la tête. Puisque j’étais son petit ami, que nous discutions parfois de son travail, les paladins m’avaient accordé une cote de sécurité. Une cote plutôt élevée. Il y avait bien des généraux qui n’avaient pas ma cote. Mais même avec celle-ci, elle ne pouvait discuter d’au moins la moitié de ses dossiers avec moi. Ses dossiers n’étaient pas sur son ordinateur même, mais sur leur ordinateur central, accessibles au travers d’un lien bénéficiant de cryptages avancés. L’appartement était discrètement vérifié chaque semaine par une équipe de spécialistes pour des microphones et autres systèmes d’espionnage.
Même maintenant, si je me concentrais, je pouvais entendre le bourdonnement à peine perceptible d’un des systèmes qui faisaient qu’on ne pouvait nous espionner au travers des murs, plafonds et planchers.
– « Tu as besoin d’une pause? »
Je lui demandai cela, car je savais combien elle avait tendance à s’acharner, même lorsqu’elle était trop fatiguée pour avoir des résultats.
Elle hésita un moment, regarda son écran, puis hocha de la tête.
– « Tu es très beau, habillé convenablement, » elle me dit, avec un regard direct.
Un message assez clair. Je repris mon veston et refis le nœud de ma cravate.
– « Allons manger. Je t’invite. »
« La dernière fois que tu m’as invitée… »
Je lui donnai un petit sourire carnassier.
– « Viens prétendre que tu n’as pas aimé la tension, le risque, chaque regard désapprobateur, la question sur le visage des gens, se demandant si tu avais quelque chose sous ta chemise. »
Elle rougit.
– « Mes papiers étaient dans ma poche de pantalon. Les policiers auraient trouvé une arme dans ma sacoche. Ils m’auraient embarquée. »
Je souris.
– « Un appel de téléphone, et tout aurait été réglé en dix minutes. »
Elle renifla, l’air hautain,
– « As-tu seulement idée de l’embarras qui aurait été mien? »
– « Tu ne t’es pas fait prendre. Et puis, tu as aimé, je le sais. »
Elle ne répondit pas immédiatement.
– « Nous allons où? »
Un changement de sujet, s’il en était un.
Milène me regardait depuis quelques minutes, réalisant que quelque chose clochait. Elle me connaissait trop bien. Sa face était emplie de suspicion.
– « Toi, tu es comme le chat qui a mangé le canari. »
– « Peut-être. »
– « Pas peut-être. »
– « Hmmm. Très bien. »
Avant de quitter, j’avais glissé une lourde enveloppe dans la poche de mon veston, sans qu’elle me voie faire. Je sortis cette enveloppe, la poussai vers elle.
Elle regarda cette enveloppe une longue minute avant de la prendre, de l’ouvrir. À l’intérieur, il y avait des imprimés, donnant les détails. Et puis il y avait cette carte d’identité, avec sa photo. Un copain des bataillons pénitentiaires qui me devait énormément m’en avait émis plusieurs, il y avait maintenant quatre semaines.
– « L’ordinateur central de la police va tout de suite détecter qu’il s’agit d’un faux, mais si ce n’est qu’un contrôle sans connexion au central… »
Un sourire.
Elle sortit son ordinateur de poche de sa sacoche, et glissa la carte dans la fente.
– « C’est une fausse. »
– « Un ordinateur de police ne le détectera pas ainsi, » je l’assurai. Les paladins avaient les meilleurs gadgets.
Elle ne m’écoutait pas vraiment. Elle accédait aux données contenues sur sa carte. Données médicales, financières… et policières. Je la vis frémir, se mordre la lèvre. Elle était un peu blême. De longues minutes à lire les informations à l’écran, puis sur les papiers.
– « Depuis quand as-tu cela? »
– « Un temps. »
– « Quand? »
– « Depuis le mois dernier. »
Elle me jeta un regard incrédule, puis ses yeux se fermèrent presque, ses narines frémissaient. Elle était… fâchée. Et extrêmement excitée.
– « Ça fait un mois que tu as ça, que tu me laisses languir… »
– « Tu aurais pu l’avoir bien plus tôt. Mais… tu ne répondais même pas lorsque je te disais bonjour, alors… »
Oh ! Que j’adorais ses yeux, lorsqu’elle était furieuse et excitée à la fois, incapable de se venger.
J’étais bon dessinateur, et j’avais fait un certain nombre de dessins pour elle, afin qu’elle comprenne bien le style auquel je m’attendais. Je pris l’un d’eux.
– « Il te faudra t’arranger pour être moins belle. Tu dois avoir l’air un peu trash. Attention, pas de sexe avec personne d’autre que moi. Tu peux danser, tu peux aguicher, tu peux faire ce que tu veux, mais personne ne te touche. »
Elle dévorait mes dessins des yeux. C’était elle, l’air farouche, fatiguée, usée. Trop de cosmétiques. Des vêtements trop provocants. Une prostituée de corridor qui avait eu une vie difficile. Une prostituée, mais… j’avais capturé, sa défiance, sa force. Je voulais l’appeler pendant la nuit, la faire venir pour une heure, en faire usage, la payer et la mettre à la porte. Ou encore la trouver sur le bout de corridor qu’elle ferait sien, et engager ses services pour dix minutes. Je voulais l’amener dans le genre d’hôtel ou les prostituées servaient leurs clients, la baiser la, ses faux cris de plaisir m’encourageant, audibles au travers des murs trop minces. Je voulais une version plus ‘présentable’ mais qui criait tout de même ‘escorte’ et l’amener dans des bons restaurants, la faire subir les regards désobligeants et moralisateurs des autres. Je voulais la voir se faire arrêter par l’escouade du vice, se faire prendre en photos, avoir un dossier. Je voulais beaucoup.
De par son expression, je voyais qu’elle voulait encore plus, qu’un monde de possibilités venait de s’ouvrir à ses yeux.
– « Je serai ton proxénète. Puisque tu ne seras pas une vraie prostituée, tu ne pourras me ramener autant, mais lorsque tu as du temps, je m’attendrai à un certain… revenu. Tu trouveras certainement des clubs de danseuses bas de gammes qui conviendront à ton personnage. »
Elle me jeta un regard, et je frissonnai, car elle entrait déjà dans la peau de son personnage.
– « Je n’ai pas de pimp. »
Une déclaration ferme, pleine d’animosité, de combativité.
Une gifle qui claqua fort. Les têtes tournèrent. Nous n’étions pas dans ma zone. Personne ne nous connaissait, ici. Les gens ne savaient pas comment répondre. J’étais armé, après tout. Milène aussi, mais seulement de son pistolet, caché dans sa bourse.
– « Tu te trompes, ma douce. J’ai des plans, pour toi. »
Le patron des garçons de table s’approchait, l’air carrément hostile, la tempête se lisant sur son visage. Il s’arrêta à côté de notre table, et le regard qu’il me donna était mauvais.
– « Monsieur, j’ai quelqu’un qui appelle présentement la police. Je vous conseille de quitter. Madame, nous allons vous protéger. »
Il y avait les garçons de table qui se tenaient relativement proches. Ils semblaient beaucoup moins résolus que leur patron.
Milène… était rouge, particulièrement là où ma main avait giflé sa joue. Sa voix était rauque.
– « Je vous remercie, monsieur, de votre assistance, mais… ce n’est pas nécessaire. »
– « Êtes-vous sûre, madame? »
Elle hocha de la tête, se leva, et je jetai quelques billets sur la table, ramassai les documents, et la pris par le bras, l’entraînai avec moi. Elle n’avait pas sa grâce habituelle, se mordillait la lèvre inférieure.
Un retour en silence. Milène ne rencontrait pas mes yeux. Elle créait sa personnalité, alors même que nous étions dans l’ascenseur. Puis, alors que nous approchions de notre zone, elle me surprit. J’avais été trop confiant. Pas assez alerte, sa prise était bonne… je me retrouvai avec elle dans un corridor insalubre, mon dos plaqué contre un mur couvert d’une mousse gluante. Et la lame d’un couteau appliquée à l’aine.
– « Je n’ai pas de pimp. Tu n’auras pas mon argent. Pas de passe gratuite. »
Un ton dangereux, une pression de la lame qui augmentait, un avant-bras contre ma gorge. Son expression, féroce. Il y avait une lueur fiévreuse dans ses yeux.
– « Ça va, » je lui dis, d’une voix étranglée.
Je ne l’avais jamais vue glisser pleinement dans le rôle d’un personnage. Elle devait faire une agente d’infiltration très efficace. Elle me faisait juste un peu peur.
La pression du couteau s’atténua, très lentement.
« Tu tentes de devenir mon pimp, et je te coupe les couilles. Clair? »
« Oui. »
Ses narines frémissaient. Ses yeux gris, si beaux, si pénétrants… je la voyais combattre le plaisir, je la sentais fléchir. Trop puissant, ce rôle. Et puis ses yeux redevinrent durs. C’était plus difficile ainsi, mais tenir son rôle à la perfection, cela ne ferait qu’augmenter la puissance de l’effet. Elle me donna ses prix. Je marchandai avec elle, conscient que le prix final serait le prix de base, pour le futur.
Elle allait me ruiner, particulièrement si elle insistait pour tenir ce rôle trop souvent. Un problème pour plus tard.
Pour le moment, je savais à quel point elle avait besoin. Je l’entraînai plus profondément dans les ombres de ce corridor abandonné. Elle n’était pas habillée pour l’occasion, mais peu importe. Dans la noirceur, j’arrivai à lui baisser les pantalons.
– « Tu paies avant. »
Je lui donnai son argent… j’avais toujours sur moi le type de condom requis pour ceci. Dans le futur, elle aurait tout ce qu’il lui faudrait, dans sa sacoche. J’enfilai ce condom. Elle se tenait debout, les jambes écartées, pliée vers l’avant, les mains contre le mur.
– « Doucement! »
Elle grogna, lorsque je commençai à l’enculer, la, dans un corridor puant et sombre. J’ignorai ses paroles. En fit usage comme bon me semblait. J’avais loué son corps. Pour les dix prochaines minutes, j’en ferais bien ce que je voudrais.
Des cris rauques. Des encouragements obscènes. Aucun passant ne pouvait avoir de doute qu’une prostituée était à l’œuvre dans ce corridor. Pas exactement le bon secteur, mais pas assez anormal pour que personne ne s’en émeuve. Le seul problème pourrait venir de la gang locale, qui voudrait sa part, mais ils n’allaient probablement pas avoir le temps de réagir.
Milène faisait tout, pour me faire atteindre mon point de non-retour rapidement. Elle tenait son rôle à la perfection… excepté qu’il n’y en avait pas beaucoup, des prostituées qui atteignaient l’orgasme en se faisant enculer bien fermement. Ce n’était pas l’acte lui-même qui lui procurait ce plaisir intense, mais cette humiliante situation, ce… scénario. Puissant. Balayant tout.
Elle n’était pas la seule. Un paladin, faisant la pute pour moi. Irrésistible.
Explication de texte :
Un paladin est un chevalier de haut rang.
Une paladine est une femme qui n’est pas là, dans son restaurant habituel puisque qu’elle a préféré diner ailleurs
Je vous remercie de votre attention