11 – La chute de Darousse
Mercredi 6 mars
Darousse a convoqué Evelyne Roche dès son arrivée au bureau.
– Alors ? Ça a marché ?
– Oui ! C’est le Losange Bleu qui est derrière tout ça !
– Très bien ! Ça n’a pas été trop difficile ?
– Je n’ai pas envie d’entrer dans les détails !
– Je vois !
– Non tu ne vois rien du tout ! Et moi ce qui me tracasse c’est que je me demande à quoi vont bien pouvoir leur servir de telles informations. A mon avis, ils cherchaient tout à fait autre chose.
– Eh bien je ne vais pas me gêner pour aller leur demander. C’est où leur siège social ?
Il allait faire une recherche Internet, mais le téléphone l’interrompit.
– Monsieur Darousse, c’est Remiremont.
– Oui, et vous voulez quoi ? Je croyais vous avoir dit que j’étais très mécontent de vos services et que je n’avais pas l’intention de vous payer.
– Même si je vous donne le nom de l’entreprise qui était derrière Albert Leberger ?
– Monsieur Remiremont, nous avons désormais en notre possession cette information et ce n’est pas grâce à vous. Si vous n’avez rien d’autre à me dire, merci de raccrocher.
– Monsieur Darousse, vous me devez de l’argent et j’entends bien être payé. Je m’en voudrais d’être obligé d’utiliser des moyens de pression que la morale réprouve…
– Si vous croyez me faire peur, vous perdez votre temps ! Hurla-t-il en mettant fin à la communication
– T’as vu comme je te l’ai renvoyé dans ses cordes, cet abruti de détective ! S’exclama Darousse tout fier de lui. Bon voyons voir, le Losange Bleu… humm… Ah voilà, c’est dans la banlieue de Lyon. Et bien j’irai donc à Lyon. Je vais leur téléphoner et demander un rendez-vous pour demain.
Le téléphone sonne à nouveau. Le numéro de Remiremont s’affiche. Darousse branche l’amplificateur
– Monsieur Darousse, si à midi je n’ai pas de nouvelles, et si vous ne revenez pas sur vos intentions, je déballe tout ce que nous avons appris sur ce que vous faites avec votre chef comptable le midi.
– Allez-vous faire foutre ! Gueule-t-il en raccrochant.
– Comment peut-il être au courant ? Demande Evelyne Roche.
– C’est simple ! Quand Leberger a appris par Molay qu’on allait à l’hôtel, il a sans doute voulu vérifier par lui-même, il nous a donc vus entrer. Or à ce moment-là, il était suivi par les sbires du détective.
– Oui, bien sûr !
– On ferait peut-être mieux de le payer !
– Non je ne m’abaisserai pas à ça, je me refuse de payer un incapable.
– On a le dos au mur !
– La question n’est pas là ! Quand on a affaire à un maître chanteur, on n’en voit jamais la fin. Si on le paie, il reviendra nous casser les couilles dès qu’il aura besoin d’argent.
– On fait quoi, alors ?
– On va allumer un contre feu.
Et à 14 heures tous les cadres et employés du siège social de Choser & Ruppert reçurent sur leur ordinateur ce message surréaliste.
« En aucune façon la vie privée des salariés et des cadres de Choser & Ruppert ne saurait intéresser l’entreprise. Il nous faut cependant croire que pour une infime minorité, l’observation des relations extraprofessionnelles de ses agents semble être un passe-temps. Depuis quelques jours, des bruits circulent avec insistance sur nos relations en dehors des horaires de travail. Nous souhaitons dire à ce propos que pour des raisons qui nous sont propres, nous avons voulu les tenir cachées et nous estimons que cela est notre droit le plus élémentaire. Devant l’imbécilité de certains, qui n’ont sans doute rien de mieux à faire, nous rendons publique cette relation et adressons à celles et ceux qui nous ont obligés à prendre cette décision, l’expression de notre plus profond mépris. » Philippe Darousse et Evelyne Roche.
Marchetti, le directeur adjoint manque de s’étouffer avec son café en lisant ce communiqué, il s’empare du téléphone.
– Darousse, vous avez pété les plombs ou quoi ? Il fallait laisser courir ! Vous allez obtenir l’effet inverse de ce que vous espériez : à partir de maintenant, ça va être le grand sujet de conversation.
– Il y allait de mon honneur, monsieur !
– Ben voyons !
Mais Darousse se demanda néanmoins s’il n’avait pas fait une nouvelle bêtise
Jeudi 7 mars
A 9 h 30, un employé monte le courrier du jour à Marchetti.
– Il y a une enveloppe que je n’ai pas ouverte, vu ce qu’il y a de marqué dessus.
– Merci !
Marchetti regarda l’enveloppe d’un air amusé : le procédé était usé jusqu’à la corde
« Pli strictement confidentiel, ne doit être ouvert que par son destinataire »
Il ouvre, en extrait les feuillets et commence à lire, médusé :
« Les activités de votre filiale CRP sont totalement fictives, vous trouverez en annexe la liste des salariés, tous les noms des salariés sont fictifs, vous trouverez également des notes de frais toutes aussi fictives concernant ces personnes. La comptabilité est effectuée frauduleusement par Evelyne Roche et supervisée par Philippe Darousse. Ils se rencontrent pour ce faire le midi à l’hôtel des Cigognes, rue de la Convention. Le siège de la CRP existe au Luxembourg mais est inoccupé. »
« Qu’est-ce que c’est que cette salade ? »
Il appela le préposé au courrier.
– Dites-voir, l’enveloppe fermée que vous m’avez apportée tout à l’heure, il y en avait d’autres ?
– Oui, pour tout le staff !
– Vraiment tout le monde ?
– Non, sauf Monsieur Darousse.
Marchetti est perplexe, pour lui cette histoire ne tient pas debout. C’est lui qui tient les rênes de l’entreprise. Le PDG, Monsieur Brousse qui a 91 ans est devenu incapable de gérer quoique ce soit, quant à son petit fils et successeur désigné, il se désintéresse de l’entreprise. Il convoque le responsable commercial, le responsable de la production, et le directeur financier :
– Je crois savoir que vous avez tous reçu ce machin ! Commence-t-il en exhibant l’enveloppe ouverte. Quelqu’un veut-il s’exprimer ?
– C’est débile ! Répondit le responsable commercial, chaque fois que nous avons fait appel à la CRP, nous n’avons pas été déçus.
Les autres approuvèrent.
– C’est vrai qu’ils sont un peu difficiles à joindre, mais on y arrive toujours. Quant à dire qu’ils n’existent pas, c’est n’importe quoi ! J’ai rencontré personnellement l’un de leurs responsables. Je peux vous assurer que ce n’était pas un fantôme.
– Vous avez ses coordonnées ?
– Oui dans mon bureau, vous voulez que j’aille les chercher ?
– Tout à l’heure !
– Ce qui est curieux, intervint le directeur financier, c’est que ce courrier intervient exactement le lendemain de la note de Darousse. Il y a sans doute un lien mais lequel ?
– Darousse le sait peut-être ?
– Soit c’est une connerie, soit il y a une part de vérité là-dedans. Demandons un audit express de la CRP, on y verra plus clair, intervint le responsable de la production, tout content de trouver là un moyen de mettre en difficultés Philippe Darousse qu’il détestait.
– Excellente idée ! Apportez-moi quand même les coordonnées de ce fameux contact à la CRP, conclut Marchetti. Pas un mot de tout ça à Darousse évidemment. Il est où d’ailleurs, je ne l’ai pas vu ce matin !
– Il a pris une journée de vacances pour affaire de famille, je crois.
A 11 heures, Philippe Darousse est reçu par son homologue de la société Losange Bleu, dans la banlieue de Lyon.
Vingt minutes plus tard, deux agents de la sécurité le raccompagnaient assez virilement vers la sortie.
A 14 heures, Marchetti, reçoit un coup de fil d’un des responsables de la Société « Losange Bleu ».
– Je voudrais vous poser une question, Monsieur Darousse fait-il bien partie de votre staff ?
– Oui ! Parce que ? Répondit Marchetti, fort étonné.
– Parce que il serait peut-être intéressant que vous appreniez la politesse à ce Monsieur. Il a dépassé les bornes et nous avons été obligés de le jeter dehors.
– Darousse ! Mais attendez, il est venu vous voir quand ?
– Eh bien, ce matin.
– Ecoutez, je ne suis pas au courant, Monsieur Darousse est aujourd’hui en congé…
– Ben voyons !
– Bon, je vous propose de discuter entre personnes intelligentes. Je vous affirme ne pas être au courant de cette visite et vous n’avez aucune raison de mettre ma parole en doute. Maintenant racontez-moi ce qui s’est passé et ensuite on causera.
– Vous n’allez pas me faire croire…
– Vous me racontez ou je mets fin à cette conversation !
– Pffff ! En résumé votre Darousse nous accuse de vous espionner et nous a menacés d’un procès. Qu’il le fasse, on va rigoler, et permettez-moi de vous dire que…
– Vous êtes vraiment certain que c’est bien Monsieur Darousse que vous avez vu ? Ça pourrait être une personne qui se fait passer pour lui.
– Nous scannons les cartes d’identités de tous nos visiteurs…
– Envoyez-moi ce scan par mail, je vais vous donner l’adresse… Je vais procéder à une enquête interne et je vous rappelle.
Marchetti est complétement abasourdi. Une affaire d’espionnage industriel, l’entreprise vient d’en connaitre une, qui s’est conclue par le licenciement d’Albert Leberger sans que l’on puisse déterminer quelle était l’entreprise qui était derrière tout ça. Ce serait donc le Losange Bleu ! Mais pourquoi Darousse a-t-il agit en électron libre ? A quel jeu personnel joue-t-il ? Il le saura peut-être demain à son retour.
A 16 heures, le cabinet d’audit contactait Marchetti :
– Je vous confirme que la plupart des emplois de la CRP sont fictifs.
– Y compris le nom que je vous ai donné ?
– Cette personne doit travailler sous pseudo, nous n’arrivons pas à savoir qui c’est.
– Vous avez identifié combien de personnes réelles ?
– Seulement trois : Monsieur Brousse qui est président d’honneur, ainsi que Monsieur Philippe Darousse et Madame Evelyne Roche.
– Quoi ? Et quelles sont leurs fonctions à ces deux-là ?
– Nous ne les avons pas encore définies très clairement mais ce sont eux qui ont les autorisations de fonctionnement des comptes bancaires.
– Oups ! Vous pouvez aller plus loin dans vos investigations ?
– Bien sûr, tout dépend de…
– Continuez jusqu’à demain, vous me ferez un rapport oral à la même heure.
Vendredi 8 mars
En arrivant au bureau, Philippe Darousse passe saluer Jean-Jacques Marchetti, son supérieur hiérarchique.
– Ah ! Darousse j’ai appris que vous aviez pris une journée pour affaire de famille. Rien de trop grave j’espère ?
– Une vieille tante…
– Je vois, elle avait quel âge ?
– 88
– En province ?
– Oui au Mans !
Marchetti avait reçu le scan de la carte d’identité de Darousse. Ce dernier mentait donc comme un arracheur de dents, il n’avait enterré aucune veille tante au Mans, mais était allé faire un scandale chez un concurrent à Lyon. Il avait le choix entre le confondre maintenant ou laisser passer une journée ou deux afin d’essayer d’en savoir plus.
– Au fait Darousse, on ne sait toujours pas pour qui travaillait Leberger ?
– Non Monsieur, le cabinet de détective privé que j’avais engagé n’a pas été capable de remonter la filière.
Marchetti se souvint alors que le cabinet d’audit devait lui rendre la suite de son rapport vers 16 heures. Il attendrait donc pour procéder à la grande explication…
– Alors comment ça s’est passé ? Demande Evelyne Roche.
– Ils se sont montrés très surpris que je sois au courant, je leur ai indiqué ma façon de penser, puis je leur ai précisé qu’on avait les moyens d’engager un procès, preuves et témoins à l’appui. Je crois que je leur ai pas mal flanqué la trouille. Ils ne tenteront rien.
– Ça n’a pas l’air d’aller.
– J’ai mal dormi !
Darousse n’en pouvait plus, hier il avait encore ajouté une pièce à sa collection d’échecs et d’humiliations. Il était inutile de le raconter à sa complice. Mais il avait maintenant la conviction que son destin ne lui appartenait plus.
Carette
A 14 heures Henri Winstone, le directeur de Foods House France reçoit Olivier Carette.
– Alors Carette, ce rapport ?
– Je l’ai là monsieur, lui dit-il en le lui tendant.
– Il y a beaucoup de pages.
– Je vous ai fait une synthèse d’une page et demi, Monsieur.
– D’accord, d’accord, murmura-t-il en commençant à lire. Tout cela a été vérifié, je suppose ?
– Pas dans les détails, mais effectivement cette filiale de Choser & Ruppert est complètement bidon !
– Ah au fait, Carette, les filles que vous m’avez envoyées Mardi, elles étaient super. Les chinois étaient ravis.
– Merci monsieur.
– Super ! S’exclama Winstone après avoir lu la synthèse. Voilà ce que vous allez faire, prenez des notes, Carette…
– Bien, monsieur.
A 15 heures l’entretien est terminé, Carette rejoint son bureau, recherche les coordonnées d’un négociant en viande d’abattage, passe un coup de fil, puis il s’engouffre dans un taxi et se fait conduire au siège social de Choser & Ruppert, quai André Citroën.
– Olivier Carette de Foods House France, je désirerais rencontrer Monsieur Philippe Darousse.
– Vous avez rendez-vous ?
– Non mais c’est à la fois urgent et important.
– Je vais voir si je peux le déranger…
Et trois minutes plus tard, les deux hommes étaient face à face.
– Monsieur Darousse, j’ai ici un rapport dont je ne me servirai pas, il décrit par le détail les activités comptables de la société CRP. Il assez accablant je dois dire.
Carette marqua une pause, laissant à Darousse le temps d’encaisser. Ce dernier l’aurait sans doute jeté dehors s’il n’avait pas précisé d’emblée qu’il ne se servirait pas de ce rapport.
– Nous ne nous servirons pas de ce rapport si vous faites ce qu’on va vous dire de faire.
– Serait-ce du chantage ?
– Tout de suite les grands mots, je vous en prie, Monsieur Darousse. Mardi un camion se présentera à votre usine de Jorcy. Voici la carte de cette entreprise, il s’agit d’un négociant en viande chevaline. Vous vous débrouillerez pour qu’il puisse y décharger sa marchandise.
– Je n’ai pas les moyens de faire ça, mes attributions dans cette société se limitent à la gestion du personnel et à la sécurité.
– Et bien vous vous débrouillerez ! Rassurez-vous, cette viande ne présente aucun danger sanitaire, mais que voulez-vous, les gens n’aiment pas qu’on leur dise qu’il y a du cheval dans leurs assiettes. Nous ferons en sorte qu’un contrôle sanitaire ait lieu dans cette usine mercredi prochain. Bien évidemment il y aura une fuite dans la presse, c’est le but de l’opération.
– Mais…
– Laissez-moi terminer ! Quand le scandale éclatera, il est évident que votre société criera au mensonge et à la manipulation, mais les contre expertises confirmeront la présence de viande de cheval. On cherchera donc à reconstituer le traçage et on tombera sur ce camion de livraison non prévu que vous aviez fait entrer. Il vous suffira de dire que vous aviez voulu rendre service à un négociant de vos amis et que vous ignoriez quel genre de viande il vous livrait.
– Non, mais…
– J’ignore si on vous gardera après ça, ça m’étonnerait, mais ce n’est pas mon problème. Ce qui est certain c’est que votre société, dont la situation financière n’est déjà pas bien brillante ne se remettra pas de cette mauvaise publicité. Mais en ce qui vous concerne, vous et votre complice, je suppose que vous avez mis assez d’argent de côté avec les magouilles de cette fausse filiale. Vous allez pouvoir maintenant en profiter, car je vous le répète Monsieur Darousse, il n’est pas dans nos intentions de prévenir, ni votre directeur, ni le conseil d’administration de votre société… sauf bien sûr si vous n’acceptez pas de nous rendre le petit service demandé.
– Vous êtes vraiment un pourri !
– Vous êtes assez mal placé pour porter des jugements moraux sur les autres. Je vous laisse, je ne vous demande pas de réponse, il me semble qu’elle va de soi, non ?
Carette reparti, laissant Darousse anéanti, ce dernier demanda à Evelyne Roche de le rejoindre dans son bureau.
– T’es vraiment la reine des conasses ! Commença-t-il.
– Tu me parles sur un autre ton, d’accord ?
– Leberger t’a manipulée comme une première communiante. Ce n’était pas « Le Losange Bleu » qui nous espionnait, c’était Food House. Quand je pense que j’ai été me ridiculiser à Lyon à cause de tes conneries.
– T’avais qu’à le faire toi !
– Faire quoi ?
– Coucher avec Leberger ! Il t’aurait peut-être donné le bon renseignement.
– Un connard de chez Foods House vient de sortir d’ici…
Il lui raconta
– Tu vas faire quoi ?
– On est coincés, je vais faire rentrer son putain de camion comme il le souhaite. Quand on remontera le traçage de la bidoche, on tombera sur mon intervention auprès du directeur de l’usine de Jorcy. Là ce sera le facteur chance, ou bien on me vire, on bien on me garde, mais si un conseil d’administration est convoqué, c’est foutu pour moi.
– Mais si ton mec tient parole, l’affaire de la CRP ne sera pas dévoilée, moi je serai toujours dans la place et on pourra continuer à se voir le midi comme avant… Faut toujours voir le bon côté des choses…
– T’as raison. Lundi j’irais à Jorcy, voir le directeur de l’usine, j’essaierai d’arranger le coup en douceur.
Marchetti a demandé au cabinet d’audit de noter par écrit l’essentiel de leurs conclusions. Ils les a sous les yeux et elles sont accablantes pour Darousse et Roche. Il réglera tout ça au retour du week-end !
Lundi 11 mars
A 9 heures Marchetti, réunit son staff. Il a décidé de confondre Darousse devant ses propres collègues. Mais Darousse n’est pas là… Il téléphone au secrétariat !
– Monsieur Darousse est en déplacement sur le site de Jorcy !
– A Jorcy, mais qu’est-ce qu’il est parti foutre à Jorcy ?
– Je l’ignore, monsieur !
Bref le grand déballage est remis au lendemain.
A la même heure Albert Leberger se présente au bureau d’Olivier Carette et lui demande ce qu’il doit faire maintenant que sa « mission » est terminée.
On l’envoie assister le responsable informatique local, qui n’avait rien demandé et qui lui confie des tâches subalternes n’ayant aucun rapport avec sa qualification.
A 15 heures Luc Brugnac, le responsable de l’usine de Jorcy est très occupé dans son bureau. D’ailleurs il a demandé à ce qu’on ne le dérange sous aucun prétexte.
Il est assis sur une seule fesse, cela permet à sa secrétaire de lui doigter le cul pendant qu’elle lui prodigue une superbe fellation.
– Ce week-end, ma femme emmène les gosses à Euro-Disney, on va se payer un week-end en amoureux tous les deux.
– Oumpf ! Et tu m’achèteras le beau sac qu’on a vu l’autre jour !
– Mais bien sûr ma chérie ! Oh, ta langue… Continue c’est trop bon.
– Oumpf !
– Et ton doigt, fais le bien bouger !
– T’aimes ça que je te mette un doigt dans le cul, hein mon salaud ?
– Oui, mais suce !
– Mon mari il n’aime pas ça !
– Que tu le suces ?
– Non que je lui mette un doigt dans le cul !
– Il ne sait pas ce qu’il perd !
Brugnac décida de se taire, sa secrétaire était une petite coquine ambitieuse, mais elle ne pouvait s’empêcher de parler, même quand elle faisait une pipe. Il allait attendre encore quelques instants, puis il lui demanderait de se coucher sur le bureau, le cul en l’air et à ce moment il jouirait en la sodomisant.
Mais c’est à ce moment que le téléphone sonna.
– Laisse sonner !
– Non, c’est Paris !
– Allo, Brugnac ! Ne prononcez pas mon nom, c’est Marchetti, êtes-vous seul ?
– Pas, pas vraiment… balbutie l’homme.
– Alors isolez-vous, personne ne doit entendre ce que j’ai à vous demander.
Brugnac se demande quelle bêtise il a bien pu faire, et demande à sa secrétaire de bien vouloir sortir de son bureau.
– Ça y est je suis seul, Monsieur Marchetti !
– Est-ce que Monsieur Darousse est venu dans votre usine aujourd’hui ?
– Oui, mais il est reparti !
– Très bien. Nous avons quelques soucis avec Monsieur Darousse en ce moment, nous espérons que ça va s’arranger, mais bon, disons qu’on se pose des questions. Que venait-il faire à Jorcy ?
Brugnac a trente secondes pour prendre une décision. Il a ce midi accepté une somme assez coquette de la part de Darousse afin que l’opération se passe en douceur. Mais il se rend compte que Marchetti soupçonne quelque chose. S’il dit la vérité, il perd probablement le bénéfice de cette belle enveloppe avec laquelle il faisait déjà quelques projets de dépenses… Mais s’il ment, c’est son poste qu’il risque de perdre. Le choix est donc assez vite fait.
– Ah, ben je suis bien content que vous me posiez la question parce qu’à midi nous avons mangé ensemble et il m’a demandé un service assez… assez particulier… assez embarrassant.
– C’est-à-dire ?
– Il m’a dit qu’il avait un ami qui faisait dans le négoce de viande d’abattoir et qui connaissait des difficultés, il m’a donc demandé de laisser rentrer les camions de cette société. Le problème c’est qu’on va se retrouver avec un stock de viande trop important.
– Vous avez accepté ?
– Je ne pouvais pas refuser, Monsieur Darousse est mon supérieur hiérarchique…
– Oui, mais moi je suis le patron ! Vous refoulerez ces camions, essayez néanmoins de photocopier les bons de livraisons, si ce n’est pas possible, notez au moins les numéros d’immatriculation des camions.
– Bien monsieur.
Brugnac n’avait rien dit à son patron au sujet de l’enveloppe. Que ferait Darousse quand il apprendra qu’il avait été doublé ? Et puis si Darousse, coincé, balançait le fait qu’il ait accepté de l’argent… paniqué, il rappela Marchetti.
– J’ai oublié de vous dire, vous avez raccroché trop vite, Monsieur Darousse m’a proposé une enveloppe, j’ai refusé, mais il a insisté…
– Combien ?
Brugnac réfléchit, il avait promis à sa secrétaire de lui offrir ce sac hors de prix…il n’était pas obligé de dire le montant exact.
– 8.000 euros !
– 8.000, ce n’est pas un compte, ça !
– C’est le montant de l’enveloppe.
– OK, enfermez-les dans votre coffre, merci d’avoir rappelé.
Mardi 12 mars
A 9 heures, Didier Remiremont demande à Tanya de téléphoner chez Choser & Ruppert, elle demande Darousse, on lui dit qu’on va lui passer. Elle raccroche.
– Il est toujours là ! Se désespère-t-elle.
– Ce n’est pas normal ! Pourquoi ils ne l’ont pas encore viré, ce con ?
– On fait quoi ?
– Pour l’instant, on attend… S’ils l’ont gardé, on ne sera jamais payé. Il faudra peut-être qu’on en remette une couche.
A 11 heures, Albert Leberger reçoit un coup de fil d’Evelyne Roche qui souhaite le voir. Il accepte un rendez-vous au Chatelet en fin d’après-midi. Il le regrette aussitôt, craignant un coup fourré de la part de Darousse, d’autant qu’il n’a plus son ange gardien à disposition. Il n’est pas obligé d’y aller, il a tout l’après-midi pour prendre une décision.
Il est midi. Il y a deux heures, Philippe Darousse s’est fait virer comme un malpropre. Sans doute Evelyne Roche a-t-elle connu le même sort, il n’en sait rien et réalise maintenant qu’il n’a même pas son numéro de portable.
Il n’a pas l’intention d’en rester là, il faut d’abord qu’il mette son argent en sécurité, puis qu’il rassemble quelques affaires pour s’exiler quelque part en Amérique du Sud. Mais avant…
Comme dans les mauvais thrillers, il achète un petit carnet, s’assoit à la terrasse d’un bistrot, ouvre la première page et y écrit cinq noms : Carette, Remiremont, Brugnac, Leberger et Molay ! Tous devront payer ! Carette en premier parce que ce faux jeton n’a pas tenu ces promesses de ne pas dévoiler ses petits arrangements avec Evelyne Roche et la CRP, Remiremont pour son incompétence, Brugnac pour sa trahison, Leberger et Molay pour leur attitude de fouille merde.
La priorité sera Carette. Il ira chez lui et lui brisera les jambes, le rendant invalide à vie. Mais comment le localiser ? Il lui téléphone, l’autre lui raccroche au nez ! Il décide donc de s’occuper d’abord de Remiremont, mais en attendant, il se rend à sa banque où on lui indique que son compte est bloqué. Fou de rage il rentre chez lui, deux policiers l’attendaient, ils l’embarquent.
Il est 17 heures 30. Evelyne Roche voit Leberger s’avancer, elle esquisse un sourire, attend qu’il soit un peu plus près et lui balance une gifle magistrale.
– C’est pour vous remercier d’avoir tenu votre promesse.
– Qu’est-ce qui vous arrive, vous avez un problème ?
– Le problème c’est qu’on vient de me virer comme une merde de chez Choser & Ruppert après 30 ans de bons et loyaux services.
– J’en suis navré, j’avais souligné dans mon rapport que votre rôle dans cette affaire était secondaire. Il faut croire qu’on n’en a pas tenu compte.
– Pédé, impuissant ! Va te faire enculer !
Il ne se démonte pas.
– Vous savez que vous êtes très belle quand vous êtes en colère ?
Moment de déstabilisation. Elle reste bouche bée.
– Moi qui pensais que vous m’aviez donné rendez-vous pour qu’on refasse une petite sauterie comme la semaine dernière…
– T’es vraiment con ! C’est de naissance ou ça t’es venu après ?
– J’en sais rien ! Mais vous pouvez me traiter de tous les noms d’oiseaux qui vous passent par la tête, la vérité c’est que j’ai essayé de vous protéger…
– En envoyant Darousse se faire ridiculiser chez « Losange bleu » ?
– Ce renseignement ne faisait pas partie de nos accords et entre nous, le fait que Darousse se soit ridiculisé, ça me ferait plutôt marrer !
– C’est ça, rigole connard !
– Vous savez que la nuit, je repense à vos seins, ils sont si beaux, je donnerais cher pour les revoir à nouveau.
– Pfff !
– Et ce cul ! Mon dieu, ce cul !
– T’es vraiment taré !
– On va boire un pot ?
– En quel honneur ?
– Parce que j’en ai envie, et parce que j’ai envie qu’on fasse la paix.
– Vous êtes vraiment un cas, vous ! Bon allons-y.
Albert n’en revenait pas lui-même de la maestria avec laquelle il avait conduit ce début de rencontre. Sans doute parce que le personnage d’Evelyne Roche ne l’impressionnait pas du tout… Par contre son physique…
Ils s’assirent. Moment de silence.
– Qu’est-ce que je suis venu foutre ici ? Finit par dire Evelyne.
– Faire la paix.
– Ce n’est pas ça qui résoudra mes problèmes.
– Racontez-moi !
– Pff ! Jamais de ma vie, on ne m’avait humiliée comme ça ! Les salauds, les salauds.
Et là voilà qui se met à chialer comme une Madeleine.
– Ben, oui c’est con de se faire virer de sa boite. On le vit forcement mal, j’en sais quelque chose, vous savez !
– Hum.
– Racontez-moi, ça vous fera peut-être du bien de parler.
– On a joué, vous et moi. On a perdu tous les deux. Quand on perd, ça fait vachement mal. Répondit Evelyne.
– Racontez-moi ! Insiste Albert.
– Parce que ça vous excite de savoir comment on m’a virée ?
– Pas du tout ! Mais voyez-vous, vous êtes la seule qui pouvez me raconter comment ça s’est passé…
– Et qu’est-ce que ça peut vous foutre ?
– Ce ne sont pas les détails de votre renvoi qui m’intéressent, mais ceux de celui de Darousse.
– OK, je vais vous raconter, mais après je vous dirai quelque chose, et ça ne va peut-être pas vous plaire.
– Je prends le risque.
– Donc ce matin on me demande de monter en salle de réunion, il y avait là tout le staff dont Darousse. Je me demandais ce que je foutais là, mais je ne m’inquiétais pas, parce qu’il était trop tôt, le contrôle sanitaire n’avait pas encore eu lieu à Jorcy…
– Pardon, je ne suis plus du tout, là…
Alors Evelyne lui raconte ce qu’il ignorait : le chantage de Carette, le déplacement de Darousse à l’usine de Jorcy…
Flashback
Darousse ne soupçonne rien de ce qui va arriver, il a sorti son cahier à spirales sur lequel il a l’habitude de prendre des notes, tout juste s’étonne-il de la présence d’Evelyne Roche.
– Monsieur Darousse, je voudrais savoir une chose : les 8.000 euros que vous avez proposés à Brugnac, ça sortait de la caisse de l’entreprise ou ce sont des fonds propres ?
– Pardon ? Balbutie l’intéressé, rouge comme une tomate.
– Madame Roche, avez-vous validé une passation d’écriture de ce montant ?
– Mais pas du tout !
– Vous vouliez faire quoi au juste en soudoyant Brugnac, monsieur Darousse ?
– Il s’agit d’un ami qui…
Il se rend compte que l’explication est ridicule, Brugnac a parlé, ils ont dû se renseigner sur le genre de viande que commercialisait le négociant en question… Il est inutile qu’il tente de se défendre. Il se lève.
– Où allez-vous ?
– J’ai fait une connerie. Je me casse, je démissionne.
– Juste un mot ! Vous démissionnez, c’est très bien, cela nous évitera de perdre notre temps avec une procédure de révocation. Mais ça ne nous empêchera pas de porter plainte contre vous pour abus de confiance.
– Bof !
– Oui, je sais, vous vous dites, pour une affaire comme celle-là, ça n’ira pas bien loin, juste peut-être une simple amende, c’est ça n’est-ce pas ?
Darousse esquissa un sourire idiot !
– Sauf, reprit Marchetti, que la plainte ce ne sera pas uniquement pour ça, ce sera aussi pour les comptes de la CRP.
Le monde de Darousse s’écroule ! On continue de lui parler, il n’entend plus rien. Il rejoint son bureau, s’assoit, reste prostré cinq minutes, puis tape un grand coup sur la table, prend son imperméable et quitte les bureaux de chez Choser & Ruppert, définitivement ! Il a oublié de signer sa lettre de démission, il s’en fout !
Quant à Evelyne Roche, elle ne comprend pas non plus. Cela veut dire que Carette a envoyé son rapport… mais comment pouvait-il être au courant du double jeu de Brugnac ? Son seul espoir désormais c’est que son rôle dans cette affaire ait été minimisé au maximum, comme le lui a promis Albert Leberger.
Marchetti s’en va fermer la porte que Darousse a laissée ouverte. Il se rassoit, reprend la parole. Tous les regards se portent sur Evelyne Roche, qui panique.
– Madame Roche, reconnaissez-vous avoir été la complice de Darousse dans l’affaire de la fausse comptabilité de la CRP ?
Le coup de massue ! Cela veut dire que Leberger n’a pas tenu parole. Elle devient incapable de prononcer un mot.
– Madame Roche, il vous suffit de répondre par oui ou par non. Nous avons ici un rapport accablant, nous porterons plainte et vos comptes personnels seront vérifiés, mais si vous avez une version différente nous sommes prêts à vous écouter.
– Qu’est-ce que vous voulez que je vous dise ?
– Que vous nous disiez comment avec un salaire de chef comptable, vous êtes arrivée à vous payer des vacances en croisière de luxe, un lifting non remboursé par la sécurité sociale et des godasses à 1000 euros la paire…
– Salaud !
– Si vous voulez bien nous signer cette lettre de démission.
– Allez vous faire foutre !
Cinq minutes plus tard, elle était dehors, elle espéra un moment que Darousse l’attende, même pas ! Alors elle se mit à marcher au hasard des rues. A 11 heures elle contacte Leberger, elle veut le voir, elle n’a rien à lui dire mais souhaite lui jeter son mépris à la figure. Elle a rendez-vous à 18 heures. Ça en fait un paquet de rues à arpenter…
Fin du Flash-back
– Elle vous a plu mon histoire ? Je suis désolée, c’est vrai que c’est moins excitant que votre petit compte rendu de visite au salon de massage de l’autre jour.
Albert esquisse un sourire.
– Ça vous fait rire ? Pas moi, parce que maintenant je vais vous dire une chose. Je ne parle que pour moi, je ne suis pas Darousse. J’ai piqué de l’argent à l’entreprise et je m’en suis foutu plein les poches. C’est pas bien, c’est malhonnête, d’accord. Mais le résultat sur le bilan il est nul, on n’aurait pas fait ça, l’argent aurait été dilapidé en frais de réalisation publicitaire. Alors que vous, vous êtes rendu coupable d’une manœuvre visant à déstabiliser l’entreprise, cela aurait fonctionné, cela aurait pu être catastrophique pour la survie de l’entreprise et pour ses emplois. Alors je vous pose la question monsieur Leberger : lequel de nous deux est le pire ? Personne n’est parfait en ce monde, tout est question de circonstances et d’opportunités… non, non ne me répondez pas ! La réponse n’a aucun intérêt, mais admettez que vous êtes bien mal placé pour me juger. Je vais reprendre un Perrier, vous aussi ?
Leberger est abasourdi ! Il réalise alors… il s’était jusqu’ici réfugié dans l’attitude de déculpabilisation classique consistant à se dire que « les salauds, ce sont les autres ». Il tombe de haut.
– Non, un truc fort ! Un cognac peut-être.
– Tu vois mon petit Albert, on est dans le même bateau. Au début on se dit, je vais faire un petit truc, c’est sans risque et sans conséquences, c’est sans doute vrai au début, et puis la spirale s’emballe, jusqu’au jour où tout s’écroule. Pour moi ça a duré un bon bout de temps, toi tu t’es fait ramasser tout de suite, question de concours de circonstances… Tu ne dis rien ?
– Non, je t’écoute.
– L’autre jour je jouais la comédie. Au départ je roulais pour Darousse, il m’avait demandé d’essayer de savoir pour qui tu travaillais et en échange je te racontais des trucs que tu connaissais déjà, en me contentant d’y ajouter des précisions sans grande importance. J’ai changé le deal, en te demandant de minimiser mon rôle, le nom de la boite, je savais que je l’aurais… sur l’oreiller… Mais là tu m’as baisée… mais ça n’a eu aucune importance… Mais dis-moi quelque chose, ne reste pas comme ça !
– Pourquoi cette affaire a éclaté plus tôt que prévu ?
– Ça, je voudrais bien le savoir ! Si ça se trouve, pour la CRP ils étaient déjà au courant mais ils laissaient filer pour des raisons qui m’échappent. Quand l’affaire de Jorcy a éclaté, ils ont tout déballé, et du coup je me suis retrouvée dans la même charrette. Dis-moi, quand on a couché ensemble, tu savais que je jouais la comédie ?
– Oui !
– Merci de ta franchise, pourtant j’ai bien aimé l’histoire que tu m’as racontée, et quand tu m’as enculée, j’ai joui pour de vrai.
– C’est bien !
– En plus, comme un malheur n’arrive jamais seul, mon compagnon s’est barré, je pensais qu’il reviendrait, mais ça va faire un mois, maintenant… un drôle de mec, un partousard, il foutait rien, il vivait à mes crochets, je me demande comment il se débrouille maintenant, il a dû se trouver une rombière qui l’entretient… Je t’emmène chez moi ?
– C’est loin ?
– Rue Saint Jacques !
Il regarde sa montre.
– OK, je préviens ma femme…
En arrivant au pied de son immeuble, une mauvaise surprise attendait la chef comptable.
Un type en blouson l’interpelle, lui montre une carte.
– Vous êtes bien Madame Evelyne Roche ?
– Oui, mais…
– Police ! Je vais vous demander de bien vouloir nous suivre…
– Mais…
Et en quelques instants, elle se retrouve menottée et embarquée devant les yeux médusés d’Albert.
Dépité, il se décide à rentrer chez lui. Mais par prudence, il téléphone à son épouse. Il n’est pas jaloux, mais n’a aucune envie de découvrir le voisin en train de la sauter…
Comme la veille, vers 9 heures Didier Remiremont demande à Tanya de téléphoner chez Choser & Ruppert, elle demande Darousse.
– Monsieur Darousse ne fait plus partie du personnel, souhaitez-vous que je vous passe, Monsieur Marchetti, notre directeur-adjoint ?
– Non non !
Elle raccroche, saute au cou de Remiremont.
– Ca y est ?
– Oui, ça y est !
– Champagne !
– Il est un peu tôt, on va le mettre au frais pour midi.
– Envoie la facture tout de suite.
– Oui chef !
Un contrôle prétendument inopiné des services sanitaires, mais en réalité diligenté en sous-main par « Foods House France » est effectué chez Choser & Ruppert en leur usine de Jorcy. Ce contrôle concerne la chaine de fabrication et les chambres froides.
Il est 19 heures. Albert Leberger s’apprête à rentrer chez lui après avoir fait quelques courses. Son portable sonne. C’est Evelyne Roche.
– Je ne vous dérange pas ?
– Pas du tout, qu’est-ce qu’il vous est arrivé ?
– J’étais en garde à vue ! Une horreur ! Je peux vous voir ? J’ai vraiment envie de parler à quelqu’un !
– Vous êtes où ?
– Chez moi ! Mais retrouvons nous Place Maubert, près du petit square, il y a des bancs pour s’asseoir.
– OK, j’arrive dans 20 minutes.
– Je prends une douche et je vous rejoins.
Albert arrive le premier, il se pose sur le banc. Cette rencontre lui fera du bien après cette journée sans intérêt. Il ne voit rien venir, il prévient sa femme qu’il risque d’être très en retard, invente une grosse opération de maintenance des ordinateurs l’obligeant à rester très tard… En fait sa femme s’en fout de ses prétextes, mais s’il ne téléphone pas, elle s’inquiète.
Il laisse vagabonder ses pensées…
Son téléphone portable sonne. C’est Evelyne. Il craint le contretemps. Mais non, elle n’est pas prête et lui propose de le rejoindre chez elle.
Elle le reçoit en robe de chambre.
– Je ne suis pas trop présentable, attends-moi cinq minutes j’arrive. Prends-toi un truc dans le bar en attendant.
Il n’en fit rien, s’assit et se contenta de constater l’excellente qualité du mobilier, les fauteuils, le canapé, la table magnifique en bois précieux… Il avait dû y en avoir de l’argent de détourné à la CRP !
Les cinq minutes durèrent bien un quart d’heure. Quand elle revint, elle était maquillée, les cheveux séchés et revêtue d’une élégante robe de chambre en soie mauve bordée de dentelle noire.
– Tu ne t’es pas servi à boire ! T’aimes le whisky ?
– Oui !
– Goute à celui-ci, tu m’en diras des nouvelles. Tchin
– Tchin !
– Alors il est bon mon whisky ?
– Délicieux ! Alors, qu’est ce qui s’est passé ?
– Il s’est passé 24 heures de garde à vue, mais je n’ai pas trop envie d’en parler maintenant. Je te propose un truc, il y a un traiteur chinois dans le coin, je vais commander des trucs, il faut que je bouffe ! On mange ensemble ?
– Si tu veux !
– OK, je choisis pour toi ou tu veux quelque chose de spécial ?
– Je te fais confiance.
Elle quitte la pièce pour aller téléphoner !
– OK, le livreur sera là dans une petite demi-heure. En attendant, tu vas me faire un massage, tu sais faire ?
– Je crois, oui !
– On va faire ça sur le canapé, ma chambre est sens dessus-dessous…
Et sans autre préalable, la voilà qui se débarrasse de sa robe de chambre.
– Ça te plait toujours ?
– Bien sûr !
– Ben qu’est-ce que t’attends pour te mettre à poil, tu ne vas pas me masser tout habillé, tout de même ?
– Oui bien sûr, balbutie Albert en se déshabillant.
Il hésite à retirer son caleçon, malgré l’excitation de la situation, il est loin de bander comme la semaine passée.
– Tu me retire ce truc infâme, s’il te plait !
– C’est que je suis en petite forme !
– Ce n’est pas un problème, je vais t’arranger ça ! Quand on me masse, faut qu’on bande ! Et pour faire bander les mecs, je sais faire !
D’un geste brusque elle fait descendre le caleçon et sans hésiter une seconde se fourre le sexe d’Albert dans la bouche. Elle l’enduit de sa salive, le caresse de la langue et le pompe de ses lèvres. Quelques minutes plus tard, Albert arborait une belle bite bien droite, fièrement dressé et le gland luisant ! Prêt à l’emploi.
– Je me couche sur le canapé, tu me masses d’abord le dos, les épaules. Puis après tu t’occupes de mes fesses.
Albert ne connaît pas grand-chose en matière de massage, mais chaque fois qu’il a eu l’occasion de se frotter à la chose on lui a fait des compliments.
Il commence par masser les épaules avec une belle énergie.
– T’as des mains magnétiques ! Lui dit Evelyne.
Il lui travaille ensuite le dos, attendant avec impatience le moment où il pourra attaquer les fesses.
Ça y est ! Il les pétrit, les malaxe, les caresses, se laisse aller à quelques bisous.
– Lèche-moi le cul, j’adore ça !
Albert écarte les globes et approche sa langue du bel œillet brun et fripé. Le goût en est légèrement acre. Dame ! C’est normal, un trou du cul, c’est un trou du cul ! Ses caresses linguales finissent par faire béer l’anus.
– Enfonce-moi un doigt !
Il le mouille avant, puis exécute une série d’aller-retour qui font se pâmer d’aise la chef comptable.
Et c’est à cet instant que retentit le carillon de la sonnette de l’entrée.
Evelyne se lève et se dirige vers la porte. Elle n’a pas pensé à enfiler sa robe de chambre, elle regarde par l’œilleton. Elle est belle comme ça de dos avec son cul à l’air… Elle ouvre !
« Elle est malade ! » se dit Albert.
Le livreur entre, pas plus surpris que ça de la voir à poil, mais s’en met plein la vue. Ils viennent à la rencontre d’Albert qui, dans un réflexe de pudeur cache son sexe de sa main.
– C’est Liou ! Annonce-t-elle, le livreur chinois. Ne t’inquiète pas, il en a vu d’autres.
Liou tend sa main à Albert, qui est obligé pour la serrer d’exposer son service trois pièces. Il est gêné de chez gêné, ce pauvre Albert.
– Comment tu le trouves ? Demande Evelyne, il est plutôt mignon, non ?
Mignon n’est peut-être pas le terme le mieux approprié, mais il est vrai que le gars est troublant, les traits sont très fins, quasiment féminins.
Evelyne lui tripote ostensiblement la braguette :
– Il a une belle bite, tu sais, tu veux la voir ?
– C’est à dire… Heuh…
– C’est à dire quoi ? T’as quelque chose contre les partouzes ?
Albert est devenu incapable de dire quoique ce soit. Il regarde, médusé, Evelyne extraire la bite de Liou de sa prison de tissu.
Une jolie queue qui bande à moitié, avec une peau plus sombre que celle de son visage et un gland couleur de caramel.
– Viens le sucer ! Ordonne Evelyne.
– Mais…
– Quoi, mais ? C’est ton fantasme ou pas ? Alors tu arrêtes de faire ta jeune fille et tu viens lui sucer la bite, tu en meurs d’envie de toute façon.
Alors Albert n’hésite plus et vient mettre dans sa bouche cette jolie bite qui le nargue. Il retrouve les sensations qu’il avait connu dans le sex-shop de Montparnasse, mais il y a un plus…
Car pendant qu’il s’applique à sucer, Evelyne le déshabille et Liou a tôt fait de se retrouver entièrement nu. Son cops est imberbe, aussi doux que celui d’une femme et ses tétons proéminents semblent le narguer.
Albert cesse sa fellation pour caresser l’asiatique, qui se laisse faire sans problème.
– Tu aimerais que je t’encule ? Lui demande Liou.
– Bien sûr, c’est son petit fantasme secret ! Intervient Evelyne. Mets-toi en levrette, Albert.
Albert a les pieds au mur… mais maintenant il aussi le cul à l’air… il s’est positionné en levrette, attendant l’assaut. Albert est étonné de la facilité avec laquelle l’introduction se déroule. Et ça va, ça vient, ça va, ça vient, ça va, ça…
Une voix féminine…
– Ben alors, on roupille ?
Une voix connue ! Evelyne ! Il s’était endormi sur ce banc. Et ce livreur chinois n’existait que dans son rêve.
– Désolé, j’étais dans mes rêves !
– Un beau rêve ?
– Forcement, puisque tu en faisais partie !
– Un rêve érotique ! Tu me raconteras !
Elle est rayonnante malgré ses yeux cernés, elle s’est vêtue d’une petite robe noire, au-dessus de laquelle elle a enfilé un joli blouson blanc.
– Bon ben tu vois, je viens de rentrer. Je suis restée vingt-quatre heures en garde à vue. Je ne te dis pas l’enfer. Une cellule dégueulasse, j’étais avec une espèce de dingue qui devait être en manque de came et qui hurlait des conneries. J’ai pas dormi, j’ai pratiquement rien bouffé, je suis crevée, j’ai la haine. Je me suis dit que tu étais peut-être la seule personne qui pourrait me changer un peu les idées…
– Et Darousse ?
– Ah ! Oui, il a fallu que je me farcisse les interrogatoires, faut voir les questions débiles qu’on te pose… Et puis j’ai été confrontée à Darousse. Même pas un sourire complice, un petit mot de compassion, que dalle. Tu sais ce qu’il a trouvé comme système de défense ? Il raconte que comme il était le vrai patron de la CRP, il la gérait à sa façon, qu’il n’a donc pas de compte à rendre en la matière à Choser & Ruppert, d’autant que ces derniers ont toujours été satisfaits des services de la filiale.
– Ils l’ont relâché ?
– Non, j’ai demandé, ils m’ont juste dit qu’ils le gardaient. Quant à moi, je suis mise en examen pour toute une collection de délits : Escroquerie, faux et usages de faux…. Je suis sous contrôle judiciaire, faut que j’aille pointer au commissariat, je n’ai pas le droit de quitter Paris, mes comptes sont bloqués et j’en passe… Ils sont venus perquisitionner ici, ils ont embarqué l’ordinateur, l’argent liquide et les bijoux. Tu verrais l’appart, un vrai bordel ! Demain je rechercherai un bon avocat, il va bien m’arranger ça ! Tu me paie le restau ? Je mangerais bien chinois !
– Chinois ?
– Ben quoi, qu’est-ce j’ai dit ?
– Je t’expliquerai, OK pour le chinois.
A suivre
© Vassilia.net et Chanette (Christine D’Esde) janvier 2014. Reproduction interdite sans autorisation des ayants droits.
Toujours aussi bon , les récits de Chanette
Y’en a du monde ! Et elle est où Chanette ?
Le rêve du chinois est trop court.
Il s’agit du chapitre 11 d’une histoire complète, sans doute faut-il mieux lire tout ça dans l’odre, c’est en tout cas ce que je vous conseilles.
Bonne lecture
Eddy
C’est vraiment du polar ! Enfin du polar érotique parce que on se suce, on se doigte et on s’encule 🙂
Très bon récit 😉