Prostitution et Handicap… en Suisse par Sonia Kubler
Des prostituées formées pour offrir une sexualité aux handicapés
Nous reproduisons ci-dessous un article publié dans la tribune de Genève du 23.03.2014
Des assistants offrent une sexualité aux handicapés depuis 2009. La formation s’étend maintenant à sept prostituées, dont deux sont genevoises
Depuis quatre ans, la Romandie bénéficie d’assistance sexuelle prodiguée par des personnes formées. Elles dispensent des corps à corps sensuels ou sexuels lorsque le handicap limite les plaisirs intimes. L’association suisse SExualité et Handicaps Pluriels (SEHP) a assuré cette formation, aujourd’hui élargie à un petit groupe de prostituées. En janvier, à la suite de contacts avec les trois associations romandes de travailleuses du sexe, sept femmes de 24 à 45 ans se sont engagées, dont deux Genevoises. Le point avec Catherine Agthe Diserens, sexo-pédagogue et présidente de la SEHP.
Pourquoi étendre la formation à des travailleuses du sexe ?
D’abord, pour accéder aux demandes de certaines personnes vivant avec un handicap physique désireuses d’utiliser un service érotique accessible à tous. Ensuite, parce que l’apparence plus «sexy» des prostituées semble mieux correspondre aux fantasmes de certains. Enfin, l’âge des assistants sexuels formés se devait d’être abaissé: lorsque vous avez 25 ans et que l’assistante a 45 ou 50 ans, cela peut mettre mal à l’aise. Un jeune homme tétraplégique nous a confié avoir eu le sentiment d’être avec sa mère… La tarification est fixe — 150 fr. la prestation — et c’est le bénéficiaire qui paie avec son argent de poche.
La demande venait aussi des prostituées elles-mêmes…
Oui, d’une part, parce que certaines accompagnent des clients handicapés de longue date et se trouvent parfois démunies par certaines de leurs manifestations. D’autre part, l’assistance sexuelle est une diversification et une valorisation de leurs pratiques. Les participantes à la formation ont souligné combien le contact avec la personne handicapée était enrichissant pour elles.
L’assistance sexuelle a souvent été un tabou. Comment est perçue la formation des prostituées ?
Elle ne semble pas provoquer de vagues. Il est possible que certains parents associent plus aisément «confiance et assistance sexuelle» car cette suppléance peut résonner comme plus «thérapeutique», mais j’ai surtout rencontré des parents rêvant que leur fils majeur vive enfin un peu de mieux-être sensuel ou sexuel… Que ce soit dans les bras d’une assistante sexuelle ou d’une professionnelle du sexe formée. Quant aux femmes handicapées en demande d’assistance sexuelle, pour l’instant, elles sont encore très discrètes.
Sont moins cons que les français, les suisses !