12 – Réintégrations
Evelyne
Au restaurant, Evelyne lui fit raconter son rêve, il en gardait un souvenir assez précis et ce récit l’émoustilla quelque peu…
Elle regarda autour d’elle, fixa le serveur.
– Tu crois qu’il pourrait faire l’affaire celui-ci ? S’amusa-t-elle.
– Non, il est trop gros.
– Il connait peut-être quelqu’un, je vais lui demander ! Monsieur s’il vous plait ?
– T’es folle !
Mais déjà le serveur s’avançait. Albert devint tout blême.
– Excusez-moi Monsieur, est-ce que vous… comment dire, est-ce que vous auriez un cure-dents ?
Evelyne éclata de rire tandis qu’Albert s’épongeait le front. Il découvrait un tout autre aspect de cette femme, qu’il n’avait connu que sous l’angle professionnel : malicieuse, imprévisible, délurée.
– T’as des fantasmes intéressants. Mais je ne pourrais pas grand-chose pour toi, quoique le massage, pourquoi pas, et le doigt dans le cul pourquoi pas non plus.
Evelyne avait préféré aller à l’hôtel, prétextant l’état de désordre causé par la perquisition pour ne pas faire « ça » chez elle.
Comme dans son rêve, il la massait. Ou plutôt non, il ne la massait pas, mais lui triturait les fesses, et bien évidemment les écartait. Le petit trou était différent que dans son délire, moins joli, mais plus fripon.
– Lèche ! Lèche-moi le cul !
Il le fit et de bonne grâce. Il constata avec satisfaction que l’exercice de cette pratique le faisait bander.
« Pourvu que ça dure ! »
Il s’apprêta à lui enfoncer un doigt, mais Evelyne l’arrêta :
– Tape-moi sur les fesses d’abord !
– Tu veux une fessée ?
– Je préférerais quelque chose qui cingle.
– Oui, mais quoi ?
– Ta ceinture
– Ma ceinture ? Mais je vais te faire mal !
– Attends, je ne te demande pas non plus de taper comme une brute…
Albert dégrafe sa ceinture, la plie de façon à ne laisser que 50 centimètres de libre et donne un petit coup timide.
– Un peu plus fort quand même !
Il libère 25 centimètres supplémentaires et frappe.
– Plus fort !
Il se prend au jeu, et se met à cingler les fesses d’Evelyne à la volée. Il tape et tape encore et bientôt le cul de la jolie mature tourne au violacé. Il arrête de lui-même, il est en sueur, le visage congestionné et la bite au garde-à-vous.
Brefs échanges de regards :
– Maintenant encule-moi ! Ordonne-t-elle en se mettant en levrette.
Sa chatte dégouline, inondant son cul et la raie de ses fesses. Albert aurait bien léché tout ça, mais, il ne tient plus : il la pénètre violemment, effectue quelques aller-retours et jouit comme un malade… Mais trop vite.
– Ben alors ! Tu le laisses en plan ?
– Excuse-moi !
– Je crois que te voilà obligé de me faire minette.
La motivation d’Albert n’y était plus et il lui fallut un bon quart d’heure pour conduire Evelyne au plaisir.
Une cigarette… Ils ne savent plus trop quoi se dire et ils se quittent en se disant qu’ils se reverront… peut-être…
Jeudi 14 mars
Evelyne Roche est provisoirement remplacée dans ses fonctions par son adjointe, elle se prénomme Agnès, c’est une fausse blonde coiffée à la Mirelle Darc et affublée de grosses lunettes en écailles, elle est habillée d’un tailleur pantalon gris et d’un chemisier blanc. Elle pénètre dans le bureau de Marchetti.
– On vient de recevoir une facture du cabinet Remiremont, ce sont apparemment des frais engagés par Monsieur Darousse. On fait quoi ? Je n’ai pas retrouvé de contrat dans ses affaires.
– On est bien obligés de payer. Mais appelez-les et assurez-vous qu’ils n’ont plus rien en cours avec nous et venez me le dire. Ou plutôt non, asseyez-vous, je vais l’appeler, ce gus.
– Bonjour Monsieur Remiremont, je suis Marchetti, le directeur-adjoint de Choser & Ruppert.
– Oui, répond Didier, soudain inquiet.
– J’ai sous mes yeux une facture concernant une prestation commandée par Monsieur Darousse.
– Oui, balbutie Didier qui commence à transpirer.
– Le souci c’est que Monsieur Darousse nous a quittés un peu précipitamment et il a dû embarquer le contrat.
– Ah ! Souhaitez-vous que je vous faxe mon exemplaire ?
– Oui bien sûr, ne serait-ce que pour la bonne tenue de nos dossiers, mais je voudrais savoir si la mission qu’il vous a confiée est terminée.
– Absolument !
– Il s’agissait de contrôler les activités d’un de nos ex employés, Monsieur Leberger, c’est bien ça ?
– Et en deux mots, la conclusion de votre enquête, c’était quoi ?
– Je peux vous faxer le rapport que j’avais adressé à Monsieur Darousse.
– Inutile, je n’aurais pas le temps de le lire. Quelles étaient vos conclusions ?
– Nous n’avons rien relevé d’illégal ou de répréhensible, ni même de suspect dans les activités de Monsieur Leberger.
– Rien du tout ?
– Non rien !
– Ah, bon ? Je fais procéder au règlement de votre facture.
– Merci Monsieur !
Didier était passé par toutes les couleurs de l’arc en ciel, il s’épongea le front.
– Mais pourquoi Darousse a fait virer Leberger ? S’exclame Marchetti prenant Agnès à témoin.
– J’ai entendu dire qu’ils s’étaient battus !
– Oui moi aussi ! En attendant on est emmerdés, il nous fait défaut, Leberger !
– Ça c’est vrai !
– C’est comment déjà votre petit nom ?
– Agnès, Monsieur.
– On va être amenés à se voir souvent, maintenant que vous avez eu votre promotion.
– Je n’ai pas eu de promotion, Monsieur, je ne fais que remplacer Madame Roche…
– Ça peut s’arranger !
– C’est vrai ?
– Ça peut même s’arranger assez vite, mais il faut faire attention aujourd’hui avec les nouvelles lois, on a tôt fait de se faire taxer de harcèlement sexuel.
Agnès se demande…
– Vous en pensez quoi vous ? Reprend Marchetti.
– Euh, quelle est la question, Monsieur ?
– Vous en pensez quoi du harcèlement sexuel ?
– Ça existe !
– Vous avez raison, ça existe ! Admettons, attention c’est juste une supposition, que je vous dise « Agnès, si vous êtes gentille avec moi, vous aurez votre promotion très vite » et que vous refusiez. De deux choses l’une ou bien j’insiste avec lourdeur et c’est donc du harcèlement sexuel, ou alors je n’insiste pas, et respecte votre refus et à ce moment-là on ne peut pas parler de harcèlement. Vous êtes d’accord avec moi ?
– Et où voulez-vous en venir ?
– D’après vous ?
– Vous êtes très joueur !
– C’est un jeu où vous n’avez rien à perdre, tout au contraire.
– Que me proposez-vous ?
– De nous retrouver à midi devant l’hôtel des Cigognes, rue de la Convention.
– On verra !
– Mais maintenant que j’y pense, je ne suis peut-être pas libre ce midi… Dites-moi Agnès, vous m’avez l’air d’avoir une très jolie poitrine.
– Et vous auriez aimé la voir, c’est ça ?
– Si vous y consentez… seulement si vous y consentez, encore une fois je ne voudrais pas vous harceler.
– Je ne sais pas trop !
– Je peux toucher ?
– Juste un peu
Il la tripota quelques instants par-dessus son chemisier. Elle se laissa faire en arborant un sourire un peu niais.
– Et maintenant, je peux voir ?
– Je ne sais pas trop ! Répéta-t-elle
– Faites-moi plaisir !
– Et si quelqu’un entre ?
– En principe, on frappe avant d’entrer dans mon bureau, mais vous avez raison, soyons prudents : je vais verrouiller la porte.
Agnès se rendit compte alors qu’elle allait « passer à la casserole », elle ne protesta pas mais tint à ce que les choses soient claires.
– O.K., je vous montre mes seins, il est possible qu’ensuite vous me demandiez autre chose, je ne suis pas complétement contre, mais j’aimerais que cette promesse de promotion ne soit pas une parole en l’air.
– Faites-moi confiance, Agnès.
Elle dégrafa son chemisier, sans le retirer, puis fit sortir ses seins des bonnets du soutien-gorge.
– Hum, superbes, approchez-vous que je les embrasse un petit peu.
Certes, il commença par embrasser le téton droit mais ce fut pour aussitôt le happer de ses lèvres. La chose faite, il fit alors ce que font tous les hommes sans exception en pareilles circonstances : il suça l’autre !
– Et vos fesses, Agnès ?
– Vous voulez aussi que je vous montre mes fesses ?
– Tant que nous y sommes.
Sans broncher, Agnès baissa son pantalon et sa culotte et exhiba son pétard devant Marchetti.
– Pas mal, pas mal du tout, commenta-t-il en lui embrassant le postérieur. Me voilà tout excité, savez-vous.
– Vraiment ? C’est vrai que j’aperçois comme une belle bosse !
– Savez-vous que toucher une bosse, porte bonheur ?
– Alors, si ça porte bonheur ! Répondit la comptable en lui touchant la braguette.
– Ouvrez-là donc !
– Ben oui, hein tant que j’y suis !
Et sans faire de manières, Agnès farfouilla à l’intérieur de la braguette de Marchetti, à la recherche de son sexe et finit par le sortir.
– Vous avez une bien belle bite, Monsieur Marchetti.
– Merci Agnès, c’est gentil !
– Souhaitez-vous autre chose ? Demanda-t-elle d’un air coquin.
– Oui, mais vous n’êtes pas obligée !
– Et j’aurais ma promotion quand même ?
– Bien sûr ! Mais il ne vous est pas interdit de me remercier.
– Je vois !
Et sans plus discuter elle engloutit le sexe du directeur-adjoint dans sa bouche.
– Humm, c’est bon, tu suces bien !
Et il se laissa faire quelques instants avant de dire :
– Attends, attends, on va jouer à un jeu.
– Un jeu ?
– Oui tu vas voir ce n’est pas méchant !
– Je vous écoute !
– Tu sais que c’est très vilain de faire une pipe à son patron ! Annonça-t-il en agitant son doigt à la manière d’un professeur gâteux.
– Je suis une vilaine, alors ? Répondit-elle en rentrant dans le jeu.
– Rends-toi compte si les féministes l’apprenaient.
– Ça ne les regarde pas, elles n’ont qu’à aller se faire…
– Se faire quoi ?
– Hi ! Hi !
– J’ai bien envie de te donner une fessée, ça t’apprendra à être vilaine et à dire des méchantes choses sur les féministes.
– Hi ! Hi ! Une fessée pour rire, alors, pas une fessée méchante !
– Viens donc t’allonger sur mes cuisses.
– Oui, Monsieur Marchetti.
Et Marchetti commence à taper sur les fesses d’Agnès.
– Ouh la la ! Monsieur Marchetti, ça faisait longtemps qu’on ne m’avait pas donné une fessée !
– Je peux taper un peu plus fort ?
– Je crains que non… Euh votre bureau est insonorisé ?
– Saperlipopette ! Bien sûr que non ! S’exclame-t-il en faisant signe à Agnès de quitter sa position. Nous recommencerons ce petit jeu en d’autres lieux, si toutefois vous n’avez rien contre, Agnès !
– On peut s’arranger.
– C’est très bien, mais là, maintenant, vous n’allez pas me laisser comme ça ?
– Hi ! Hi ! Vous êtes un coquin, Monsieur Marchetti !
Elle reprit donc en bouche la bite toujours en forme de son patron. En matière de pipe, Marchettii en avait connu de plus raffinées, de plus subtiles et même de plus professionnelles, mais Agnès faisait de son mieux et ne se débrouillait pas si mal que ça. Sans doute le genre de femmes qui n’ose pas saisir toutes les occasions qu’elle rencontre et qui après le regrette. Elle avait du potentiel, il saurait l’exploiter et s’en amuser…
– Sers-toi de ta langue ! Je veux sentir ta langue. Oui comme ça… attention ça vient ! Aaaah !
– Glouff !
Agnés se recula, la bouche pleine…
– Un kleenetchhhh ? Chil vous plait !
Vendredi 15 mars
A 10 heures, Olivier Carette reçoit par mail une copie des résultats du contrôle sanitaire. Contre toute attente, ils ne font ressortir aucune irrégularité. Incrédule, il cherche à joindre Darousse chez Choser & Ruppert où on l’informe que ce dernier ne fait plus partie du personnel. Il prévient son directeur s’attendant à une engueulade et à la fin de ses espoirs de promotion. Ce fut pire…
– Je suppose que Darousse s’est dégonflé au dernier moment et qu’il a préféré disparaître afin de placer son magot en sécurité !
– Donc notre plan s’écroule !
– Je le crains.
– Parce que vous n’avez ni envisagé ce scénario ni les moyens à mettre en œuvre afin qu’il ne se produise pas ! Déclara Winstone d’un ton méprisant.
– Ce scénario m’apparaissait comme hautement improbable, sans doute ai-je eu tort !
– Evidemment que vous avez eu tort ! Je ne tolère pas l’échec, Monsieur Carette ! Je vais faire préparer immédiatement votre lettre de licenciement. Je vous dispense de votre mois de préavis.
– Mais… Mais….
– L’entretien est terminé, monsieur Carette.
– Si vous croyez que je vais me laisser faire. Ce licenciement est abusif, je me plaindrai aux Prudhommes.
– Si vous avez du temps à perdre, faites-le mais nos avocats n’ont jamais perdu une affaire de ce genre.
– Qu’est-ce que vous en savez ? Vous n’êtes dans la boite que depuis six semaines.
Winstone ne répondit pas et appuya sur l’interphone :
– Allo la sécurité, envoyez moi quelqu’un d’urgence, j’ai un emmerdeur qui refuse de quitter mon bureau !
Carette ne bougea pas, voulant savoir jusqu’où son patron irait dans l’ignominie.
Jimmy, l’agent de sécurité arrive. Il regarde Carette sans un mot, les deux hommes se connaissent bien.
– Vous m’accompagnez ce Monsieur jusqu’à son bureau, vous restez avec lui le temps qu’il range ses affaires, vous récupérez ses badges, ses portables et les clés de sa voiture de fonction et vous le conduirez jusqu’à la sortie. Ce monsieur ne fait plus partie de notre personnel.
– Je ne comprends pas ! S’étonna Jimmy, une fois les deux hommes dans l’ascenseur.
– Moi non plus ! Ce Winstone est un pourri.
– Je suis vraiment désolé pour vous. Tenez voici ma carte, si vous avez besoin de mes services.
– Merci, Jimmy ! Merci !
Carette avait préparé à l’avance quatre enveloppes à l’attention du staff de Choser & Ruppert au cas où Darousse refuserait d’exécuter ce qu’il lui avait demandé. Il s’empressa de les poster dès sa sortie de l’entreprise. Selon toute vraisemblance, cet envoi provoquerait un dépôt de plainte contre Darousse et sa complice. Au moins se serait-il vengé de ce dégonflé ! Le tour de Winstone viendrait plus tard, peut-être avec l’aide de Jimmy.
A 11 h 30, Albert Leberger est reçu par un cadre de chez Foods House France qu’il n’a jamais rencontré. Celui-ci lui signale que le contrat d’embauche qu’il a signé avec Olivier Carette est irrégulier dans sa forme et qu’il est donc considéré comme nul et non avenu. On le prie en conséquence de débarrasser le plancher et on a l’extrême bonté de lui offrir un chèque représentant un demi-mois de salaire au taux minimum interprofessionnel garanti. Il proteste, demande à rencontrer Carette et s’entend répondre que ce dernier ne travaille plus dans la société.
Une fois à l’extérieur, il appelle plusieurs fois Carette sur son portable sans parvenir à le joindre, il lui laisse un message, demandant qu’on le rappelle. Ce qu’il ne fit pas.
A 16 heures Didier Remiremont interpelle Tanya.
– Il est passé sur le compte, le montant de la facture de Darousse ?
– Non, pas encore… On devrait l’avoir lundi.
Lundi 18 Mars
A 9 heures et demi, Didier Remiremont arrive au bureau.
– Le virement de Choser & Ruppert n’est toujours pas arrivé ?
– Non toujours pas.
– Putain mais qu’est-ce qu’ils foutent ? Ils m’avaient promis qu’ils nous régleraient. Si on n’a rien demain, il faudra que je les appelle, ça commence à m’énerver.
Albert Leberger passa un week-end épouvantable. Sa « bouée de sauvetage » s’était dégonflée de façon aussi brutale qu’imprévisible. Carette l’avait donc jeté comme une vieille chaussette, il s’efforcerait de retrouver ce salopard, ça l’occupera. La piste passait par Mylène. Cela l’embêtait de la contacter, ils s’étaient séparés de façon débile et il s’était résigné à tourner cette page. Il l’appela quand même, tomba sur sa boite vocale, raccrocha et lui envoya un message écrit.
« Je me suis fait virer de chez Food House » sans explication, je voulais joindre Carette, mais il ne répond ni à mes appels ni à mes messages. Aurais-tu un autre numéro où le joindre ? Envoie-moi un texto. Je ne te dérangerai plus. » Il avait ajouté « Bisous » mais le gomma pour le remplacer par le conventionnel « cordialement ». Ainsi elle ne serait pas tentée de penser qu’il avait encore des illusions.
Mylène avait elle aussi tourné la page, et si elle n’avait aucune envie de s’impliquer de nouveau dans cette sombre affaire, elle n’admettait guère qu’on se foute de sa gueule. Or elle s’était investie à fond dans l’opération de « sauvetage » d’Albert Leberger, allant même jusqu’à se faire sodomiser pour garantir son embauche.
« Je n’ai quand même pas l’habitude de me faire enculer pour des prunes ! »
Elle l’appela, il ne décrocha pas, elle laissa un message.
A 9 heures 10, un employé apporte le courrier dans le bureau de Jean-Jacques Marchetti, le directeur-adjoint de Choser & Ruppert.
– Y’avait un pli confidentiel, un peu comme l’autre jour, précise-t-il.
Comme l’autre jour ? Non pas tout à fait. Car ce pli n’était pas anonyme mais portait l’en-tête de la société Food House France, il l’ouvrit, lut…
Des mobiles professionnels nous ont amenés à nous rapprocher de votre filiale C.R.P. Une demande de renseignements de pure routine nous a fait découvrir une situation plus ou moins insolite (voir pièces jointes). Nous tenions à vous en informer dans un esprit de pure confraternité…
Les pièces jointes ne lui apprirent strictement rien de nouveau que ce qu’il savait depuis jeudi dernier. Pourquoi cet envoi redondant ? Pourquoi l’expéditeur se révélait-il aujourd’hui, après avoir été anonyme ?
– Qu’est-ce que c’est que ce cirque ? Demanda-t-il devant son staff qu’il venait de convoquer.
– Darousse a dû faire une grosse connerie et sa combine pète de partout.
– Quelle connerie ?
– On ne saura jamais !
– Qu’est-ce qu’il a fait ces derniers temps, à part aller faire l’andouille au « Losange bleu » et à l’usine de Jorcy ?
– Il a licencié Leberger !
– Pourquoi ?
– Voie de faits !
– J’avais cru comprendre que Darousse le soupçonnait de filer des informations à la concurrence !
– Oui, c’est ce qu’il m’avait dit aussi ! Il a fait faire une enquête par un détective qui l’a mis hors de cause.
– Un prétexte peut-être ?
– Allez savoir !
– En attendant on est emmerdés : le nouveau responsable informatique, c’est pas vraiment le top !
– Faut lui laisser le temps de découvrir la boite.
– On ne peut pas le reprendre, Leberger ?
– On peut toujours écouter sa version des faits, je vais l’appeler…
A 9 heures 45, le téléphone portable d’Albert sonna. Plein d’espoir (Mylène ? Carette ?) Il découvrit le numéro appelant qui ne lui disait rien
– Allo, c’est Marchetti !
– Marchetti ?
– Ben oui, Marchetti ! Je suppose que vous n’avez pas retrouvé de boulot ?
– Vous m’appelez pourquoi ?
– Vous pourriez passer me voir dans la matinée ?
– Pour quoi faire ?
– Je ne veux pas vous donner de faux espoirs, mais il n’est pas impossible que nous reconsidérions notre position à propos de votre licenciement…
– Ce n’est pas un licenciement, c’est une révocation.
– Peu importe, mais j’aimerais bien en discuter avec vous. A quelle heure pourriez-vous passer ?
– Je peux être là à 10 h 30….
Inespéré ! Il n’y avait rien de fait, mais Albert se mit à valser sur place en fredonnant le « tango corse ». Sa femme se demanda s’il n’est pas tombé sur la tête.
– Je t’expliquerai, dit-il en courant vers la salle de bains.
– C’est ça ! Tu m’expliqueras !
Olivier Carette a lui aussi passé un très mauvais week-end. Il n’a pas osé annoncer son licenciement à son épouse et le dimanche, il a créé la stupéfaction au cours d’un repas de famille en pourfendant les défenseurs du libéralisme économique, en affirmant haut et fort que les licenciements abusifs devraient être interdits et que tout un chacun se devrait d’être syndiqué.
Ce lundi matin, il est parti de chez lui comme d’habitude, il a garé sa voiture près de la Gare du Nord, puis s’est posé dans un bistrot pour y prendre son petit déjeuner et réfléchir à la suite. Mais il a beau tourner et retourner le problème en tous sens, aucun plan intelligent ne lui vient à l’esprit.
A 10 heures Henri Winstone consulte son agenda :
« 17 heures, Margevil »
Il faut qu’il le gâte, celui-ci ! La signature du contrat avec cet important prospect ne tient plus qu’à un fil.
« Un bon restau, un bon pinard, et ça devrait le faire… peut-être une nana ou même deux pour le mettre bien en condition… voyons voir… Ah, oui, les nanas, faut passer par Carette… mais je l’ai viré… Bof personne n’est indispensable, en fouillant sur Internet je vais bien trouver… »
Sauf qu’au bout de dix minutes, il est pris de doutes : booker une fille n’est effectivement pas bien compliqué, mais être sûr qu’elle fera l’affaire en est une autre. Au moins, avec les filles de Carette, il était sûr du résultat. Alors Winstone que l’amour propre n’a jamais trop chatouillé, s’empare de son téléphone.
– Dans le dossier personnel d’Olivier Carette il doit y avoir son numéro de téléphone portable personnel, j’en ai besoin.
– Ne quittez pas Monsieur, je regarde ! Non monsieur, nous n’avons pas mais nous avons celui de son domicile.
– Donnez !
Les Carette ont pour voisin un artiste peintre. Il est italien, célibataire et beau comme un Dieu. Il méprise totalement le personnage que représente Olivier Carette et celui-ci le lui rend bien, les deux hommes se disent à peine bonjour. En revanche les relations entre le peintre et Isabelle Carette sont excellentes et cette dernière est justement en train de lui sucer la bite.
– Humm ! Qu’est c’est bon ! Dis-moi pourquoi c’est le Lundi que tu fais les meilleures pipes ?
– Foufoufffff…
Il ne comprit pas la réponse, on ne peut pas à la fois sucer et causer, n’est-ce pas ? Et c’est alors qu’elle était en train d’exécuter une impressionnante série de va-et-vient à l’aide de ses lèvres que le téléphone sonna :
– Laisse tomber, ils rappelleront.
Toujours cette petite étincelle qui dit que ça peut être important… et elle s’en va décrocher :
– Allo, bonjour madame, je voudrais parler à Monsieur Olivier Carette.
– Il n’est pas là, il est au travail, Monsieur. Qui le demande ?
– Au travail ? Quel travail ?
– Ben, à son travail ! Mais qui êtes-vous, Monsieur ?
– Henri Winstone, le directeur de Foods House France.
– Oh ! Et mon mari n’est pas arrivé ?
– C’est-à-dire…
– Il est parti normalement ce matin, j’espère qu’il ne lui est rien arrivé, je l’appelle tout de suite.
– Je peux avoir son numéro…
Elle lui donne et raccroche.
Le téléphone de Carette sonne, le numéro de sa femme s’affiche. Il est exceptionnel qu’elle l’appelle pendant les heures de travail, il décroche avec inquiétude.
– Allo ?
– Tout va bien ? Demande-t-elle rassurée d’avoir entendu sa voix.
– Ben, oui ? Pourquoi ?
– T’es où là ?
– Ben au travail, pourquoi cette question ?
– Mais dans les locaux ou ailleurs ?
– Mais enfin pourquoi tu me demandes ça ? Il se passe quelque chose ?
– Il se passe que ton dirlo a appelé à la maison, il te cherche partout !
– Qui ça ? Winstone ?
– Oui, il te cherche !
– Qu’il aille se faire enculer, ce connard d’américain de merde !
– Je ne comprends pas !
– Vendredi on s’est engueulés et je n’ai pas envie de lui causer, je suis à l’extérieur.
– Ah ! Je comprends mieux ! Il n’y a rien de grave alors ?
– Rien du tout !
– Bon alors je vais reprendre ce que je faisais.
– Bon courage alors !
« Winstone qui me cherche ! Et pourquoi donc ? S’il me cherche il va me trouver, ce con ! »
– Rien de grave ? Demanda l’artiste peintre, par pure politesse car il s’en foutait complétement.
– Non, c’est mon mari qui joue à cache-cache avec son patron. Mais dis donc c’est quoi cette bite qui débande ?
– Mais tu vas la faire rebander !
– Si je veux !
– Bien sûr que tu le veux !
Isabelle se rendit compte alors que sa libido venait de tomber à la cave. Elle comprit pourquoi mais n’en dit rien.
– Tu me connais bien mal ! Je n’ai plus envie, rhabille-toi.
Et elle alla se passer un peignoir, laissant l’artiste incrédule et la queue basse.
– Tu m’expliques ?
– Non, tu ne comprendrais pas.
– Pourquoi, je suis trop bête ?
Il tenta de l’enlacer, elle se recula, il s’avança, lui empoigna les bras.
– Hé doucement ! Lâche-moi, s’il te plait !
Il n’en fit rien, il la serra violement, chercha ses lèvres et se ramassa une gifle.
– Pétasse !
– Rhabille-toi et fous le camp !
– T’es pas près de me revoir !
– Ce n’est pas grave, je n’attends pas après toi !
– C’est ça, fais-toi baiser par tous les mecs du coin ! Grosse pute !
Isabelle ne répondit pas, attendit qu’il s’en aille, puis alla se faire un café. Le simple fait de savoir son mari sain et sauf après avoir subi quelques minutes de pure angoisse, l’avait comblée de bonheur. A ce point que baiser avec l’artiste peintre en devenait aussi inutile que déplacé.
Evidemment ce dernier était totalement incapable de comprendre que l’on peut être infidèle et aimer son conjoint ! Evidemment Isabelle ne se faisait aucune illusion sur la fidélité conjugale de son mari. Et évidemment demain serait un autre jour, elle téléphonerait au peintre qui s’excuserait comme il se doit de sa conduite et qui reviendrait lui offrir sa bonne queue ! Ainsi va la vie !
Olivier Carette se demande bien pourquoi Winstone a téléphoné chez lui. Et Winstone en personne en plus ! Et il n’a pas laissé de message, sa femme le lui aurait dit…. La sonnerie de son portable interrompit ses réflexions. Le numéro qui s’affichait ne lui rappelait rien.
– Monsieur Carette ? C’est Henri Winstone, comment allez-vous Monsieur Carette ?
– Vous me téléphonez pour avoir des nouvelles de ma santé ?
– Ha ! Ha ! Vous avez de l’humour, vous…
– Et qui est-ce qui s’est autorisé à vous donner mon numéro de portable ?
– Mais votre charmante épouse, voyons ! Monsieur Carette nous avons eu des mots qui fâchent Vendredi. Nous allons les oublier. Dans combien de temps pourriez-vous être dans mon bureau ?
– Vous semblez oublier que vous m’avez licencié.
– Licencié ? Et bien vous ne l’êtes plus ! Voilà tout ! On se voit à 11 heures ?
– Oui, monsieur.
Il n’y croit pas, se dit qu’il rêve ! Mais il y va…
Albert
Trois quarts d’heures c’est long et c’est court. L’enthousiasme d’Albert est vite retombé, il se dit qu’il y a peut-être un piège. Il a essayé de se préparer, se souvenant de trucs appris lors de séminaires sur la communication. Il faut aussi qu’il ne commette pas d’impair, ainsi il n’est pas censé savoir que Darousse et Roche ont été licenciés
Il est assis devant Marchetti, attendant avec angoisse que celui-ci achève son interminable communication téléphonique.
– J’aimerais, Monsieur Leberger, commença le boss après qu’il eut raccroché, que vous me donniez votre version de cette révocation.
– Darousse m’a provoqué, j’ai eu tort de ne pas garder mon sang froid.
– Et pourquoi cette provocation ?
– Il me semble que cela a un rapport avec… disons avec la vie privée de monsieur Darousse. J’ai été le témoin involontaire de… de… enfin j’ai vu des choses que je n’aurais pas dû voir.
– Si vous pouviez être plus précis. Ah ! Je dois vous dire que Monsieur Darousse a quitté l’entreprise.
– Et bien, je l’ai surpris un midi sortant d’un hôtel, rue de la Convention avec une autre personne de l’établissement… Il m’a vu…
– Cette autre personne c’était Madame Roche, n’est-ce pas ? Nous nous en sommes également séparés. Vous étiez vraiment par là par hasard ?
La question était peut-être un piège ! Mais elle permettait à Albert de dévoiler toute sa version de l’affaire.
– Oui et non, il vous faut savoir que nous avons été victimes d’une attaque virale sur les ordinateurs en réseau. J’ai d’ailleurs fait un rapport à ce sujet qui doit toujours être dans mon bureau, j’ai dû pomper des fichiers à droite et à gauche pour les traiter, c’est à cette occasion que je suis tombé sur l’adresse de Gérard Molay que j’avais perdu de vue. Comme nous avions de bons rapports, j’ai eu l’idée d’aller lui rendre visite. Il m’a confié avoir croisé Darousse et Roche devant l’hôtel des Cigognes et qu’il s’agissait là de la cause de son éviction. Par curiosité je suis allé voir…
Marchetti fit semblant de réfléchir pendant une longue minute, qui fut interminable pour Albert.
– Bon, j’espère que nous ne faisons pas une connerie. On vous réembauche. Techniquement ce sera à partir de demain, mais si vous pouviez commencer cet après-midi ?
– Bien sûr ! Même tout de suite si vous voulez.
Albert est fou de joie. Il réintègre son bureau, discute un peu avec l’intérimaire qui avait repris ses fonctions, téléphone à sa femme pour lui annoncer la nouvelle, puis envoie un bref message à Mylène :
« Choser & Ruppert m’ont réembauché. Je n’ai donc plus besoin du numéro de Carette. Je t’ai aimée, je t’aime toujours, mais ça passera ! Adieu belle gosse ! »
A suivre
© Vassilia.net et Chanette (Christine D’Esde) janvier 2014. Reproduction interdite sans autorisation des ayants droits.
Tout cela est très émoustillant
Amusant, léger, bien écrit, passionnant, excitant. Bravo !
De l’humour, du sexe et le jolie plume ! Voilà un cocktail gagnant
Une fois de plus j’ai bien ri. Merci Chanette !