Chanette 19 : Trafics (roman) 5 – Bernadette par Chanette

5 – Bernadette

Mardi 25 septembre

L’abbé prélève quelques grammes de la poudre en faisant attention de ne pas en respirer et la stocke dans une petite boite d’allumettes.

L’un de ses amis est un ancien policier ayant travaillé aux « stups ». Après avoir annoncé sa venue par téléphone, il s’y rend en milieu de matinée.

– De la poudre d’Albina ! Ils essaient donc de relancer cette saloperie, ils avaient déjà essayé il y a une quinzaine d’année, mais ça a fait un fiasco, il y a eu deux ou trois morts, et puis les trafiquants ont été rapidement arrêtés. Explique le flic.
– Mais c’est quoi ?
– Une drogue hallucinogène, ça fait planer, ça réveille la libido, mais ça détraque l’organisme, et il y a accoutumance dès la troisième prise. C’est super dangereux.

L’abbé essaie de faire le tri dans son esprit, il va devoir faire son deuil dans cette histoire de tableau qui ne lui aura rien rapporté du tout. Pas grave. Une idée germe dans son esprit.

– Bon, je vous remercie, je vous laisse, on m’attend à l’église !
– Et vous avez trouvé ça où ? demande l’ancien flic.
– On a hébergé un SDF, il est parti en oubliant sa veste, il y avait ça dedans. Répond l’abbé qui s’attendait à la question.
– Il ne devait pas savoir ce que c’est ! Il y a quinze ans, le cours de la poudre d’Albina était le triple de celui de la cocaïne. Donc si ça n’a pas changé ça nous fait du 200 euros le gramme. Donc ta boite d’allumettes doit en contenir 15 grammes, ça nous fait 3000 euros.
– Et ben !
– Vous allez en faire quoi de la boite ?
– J’en sais rien ! Je suppose que je vais l’envoyer à la police.
– Vous ne voulez pas que je m’en charge ?
– Non, je préfère m’en occuper, la police sera peut-être intéressée par le signalement du SDF.

Ce qu’il y a de bien sur les téléphones portables c’est qu’ils comportent une calculette. L’abbé s’assit sur un banc. Et justement il sonna. (le portable, pas le banc)

C’était Bernadette Harnoncourt qui lui annonçait le vol de son tableau. Il s’y attendait Elle lui expliquait qu’elle allait porter plainte. Il l’en dissuada en la persuadant que cela ne servirait à rien. Il raccrocha, pressé de faire ses calculs.

« Voyons voir, le paquet que j’ai extrait devait faire un kilo, donc ça représente 200.000 euros et si chaque excroissance contient elle aussi un paquet identique, ça fait au total 1,4 millions d’euros ! Si je pouvais trouver le moyen d’écouler cette saloperie même à 50 % de son prix… »

Et nous laisserons là ce drôle d’abbé pour le moment…

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Vers midi, j’ai eu un coup de fil d’Anna :

– Bertrand Paulino, ça te dit quelque chose ? Me demande-t-elle.
– Oui, c’est un mec que Nancini m’a présenté. Pourquoi ?
– Il aimerait te revoir.
– Qu’il aille se faire foutre, je ne veux plus entendre parler des gens de la bande à Nancini !
– Je ne pense pas qu’il veuille te revoir pour te parler des tableaux. D’ailleurs il m’a rapporté celui que lui avait prêté Nancini, il m’a rendu ça avec un air dégouté, du genre, « je ne veux plus de ça chez moi ! ». Il m’a dit qu’il avait d’abord voulu le rendre directement à Nancini mais qu’il n’arrivait pas à le joindre. Le problème c’est que je ne sais plus quoi en faire, parce que moi non plus, je n’arrive pas à joindre Nancini… Finalement je vais peut-être le garder là.
– Anna ! Je ne veux plus entendre parler de ces tableaux, je ne veux plus entendre parler de Nancini, d’accord ?
– D’accord, mais à mon avis, ce type, il veut te revoir pour tout à fait autre chose ! Si tu vois ce que je veux dire ?
– Je vois !
– Note le numéro, il m’a demandé de faire la commission, je fais la commission. T’en feras ce que tu voudras !

Je l’ai noté sur un bout de papier afin de ne pas la contrarier et je l’ai enfoui au fond de mon sac à main.

Sinon, journée normale, je rentre à la maison après avoir fait quelques courses que je suis en train de déballer. Il doit être 19 heures et des bananes.

Et voilà qu’on sonne !

Coup d’œil dans l’œilleton qui me renvoie l’image déformée d’une femme plutôt quelconque, ni moche ni belle, des lunettes, la trentaine sans doute.

– C’est pourquoi ?
– C’est à propos des tableaux !

Oh ! Non, Voilà que ça recommence ! Mais comment a-t-on trouvé mon adresse ? Et puis je réfléchis, ce doit être la police qui enquête, j’ouvre, la fait entrer, réalisant à ce moment-là qu’en France, un fonctionnaire de police ne se déplace en principe jamais seul. Cela dit cette bonne femme qui doit s’habiller avec les fringues que sa mère portait en 1950, ne me paraît pas bien dangereuse, au pire ce peut être une emmerdeuse, et dans ce cas elle ne va pas m’emmerder longtemps.

Elle ne dit rien, me regarde de la tête aux pieds, semble surprise, esquisse un sourire. Ni moche, ni belle ais-je dis… mais en s’arrangeant un peu…

– C’est pour quoi ?
– Je suis journaliste !

Elle me tend une carte : « Bernadette Harnoncourt ». Bizarre ça me dit vaguement quelque chose.

– Et qu’est-ce que vous voulez ?
– Solliciter une interview.
– A propos de quoi ?
– Des tableaux de Sylvio Tedesco.
– Désolée, je n’ai rien à dire sur ce sujet.

Elle ne bouge pas d’un poil.

– Je vais donc vous demandez de partir ! Précisais-je.
– Est-ce que je peux utiliser vos toilettes ?

Je ne suis pas assez méchante pour lui refuser l’usage de mes chiottes. D’ailleurs cela a toujours été mon gros problème dans la vie, je ne suis pas assez méchante.

Elle revient cinq minutes après, elle devait avoir une grosse envie !

– J’ai bien compris que vous ne souhaitiez pas être interviewée !
– Tout à fait ! Donc, vous pouvez me laisser.

Elle me regarde à nouveau comme si j’étais la Joconde, ça devient gênant !

– J’aimerais tant vous aider !
– M’aider ? M’aider à quoi ?
– A vous en sortir !
– Me sortir de quoi ?
– Je connais personnellement la responsable d’une association qui s’occupe de la réinsertion des personnes qui sont…

Oh, que je n’aime pas ça !

– Qui sont quoi ?
– Des personnes prostituées.

Je suis sur le cul ! Personne ni dans mon immeuble ni dans mon voisinage ne connaît mes activités. J’ai toujours fait attention en quittant le studio à ne pas être suivie par un client maniaque qui chercherait à entrer dans ma vie privée. Et voilà que cette marchande de naphtaline, elle est au courant !

Et soudain, je la reconnais, c’est la bonne femme qui accompagnait « croque-mort » à la galerie !

Mais bon dieu qu’est-ce que vient foutre cette folle chez moi, comment a-t-elle trouvé mon adresse et qui lui a indiqué mon activité ?

Je suis gonflée à l’adrénaline, je vais exploser ! J’explose !

– Ecoute-moi bien, mémère ! Tu ne sortiras pas d’ici avant que je sache qui t’as refilé mon adresse et qui t’as gentiment expliqué ce que je faisais comme métier.
– Je ne voulais pas vous brusquer…
– Ben c’est raté ! Alors c’est qui ?
– J’ai promis de ne pas le dire !
– Je m’en fous, je veux savoir !

Elle ne répond pas, ne cherche même pas à s’enfuir, je ne l’impressionne pas plus que ça, elle reste là sans bouger.

– On m’a dit que vous aviez écrit un livre de mémoires. Me sort-elle après un long silence.
– Je n’ai jamais écrit mes mémoires, faudra d’ailleurs que j’y pense ! Et c’est qui « On » ?
– Je peux m’assoir ?
– Si ça peut t’aider à te mettre à table !
– Pardon ?
– Laisse tomber, alors tu réponds ou pas ? De toute façon je ne te laisserai pas sortir avant d’avoir mes réponses.
– Et bien tant pis, je dormirais ici !

Elle se fout de ma gueule !

– Et puis tu cherchais quoi, en venant ici, ça c’est peut-être plus facile à raconter ! Parce que le coup de l’interview, je n’y crois pas une seconde.
– Monsieur Nancini m’avait obligeamment prêté un tableau…
– Non !

J’ai hurlé, elle n’a pas compris ! Non ! Elle ne va pas s’y mettre, elle non plus avec ces maudits tableaux, j’en ai marre et plus que marre de ces tableaux. Je ne veux plus en entendre parler. Le problème c’est que je ne peux pas la virer, ma visiteuse, pas avant qu’elle m’ait donné les réponses que j’attends !

Idée !

– Et je suppose que tu t’es fait cambrioler ?
– Comment le savez-vous ?
– Et que tu aimerais que je t’aide à le retrouver ?
– C’est un peu ça, oui ?
– Et la police, ça sert à quoi ?
– Je voulais porter plainte, mais j’ai eu l’abbé Laroche-Garaudy au téléphone, il m’en a dissuadé.
– Le vol a eu lieu quand ?
– Cette nuit ! Dans les locaux de Radio-Tradition, le vigile n’a rien vu.
– OK. Je te donner une piste, le nom et l’adresse du peintre, je ne sais pas si ça servira à grand-chose, mais je n’ai rien d’autre à t’offrir.

Elle me fait un sourire béat.

– Seulement j’y mets deux conditions. Un : demain je veux que tu aille déposer plainte, que le curé ne veuille pas le faire, c’est son problème, qu’il dissuade les autres de le faire, je trouve ça bizarre.
– Vous… vous l’avez rencontré ?
– Qui le curé ? Oui je l’ai rencontré ! Parce que ?
– Je ne comprends pas, il m’a dit qu’il ne connaissait pas votre adresse.
– Donc soit je mens, soit c’est lui qui ment. Il m’a raconté qu’il vivait souvent chez sa mère et que c’est là que son tableau lui a été piqué.

Du coup, elle est drôlement troublée la petite bonne femme. Elle murmure quelque chose d’inaudible.

– Hein ?
– Je ne sais plus trop où j’en suis. Répond-elle les yeux dans le vague.
– Je disais donc qu’il y avait deux conditions, la principale étant que tu répondes à mes questions.

Elle reste de marbre ! Elle est toujours dans ses pensées.

– Bon alors ?
– Je réfléchis !
– On ne va pas y passer toute la soirée, je n’ai rien bouffé ce midi, j’ai une faim de loup.
– Moi aussi !

Une cinglée ! Elle est cinglée !

– Mais vous pouvez manger devant moi, ça ne me dérange pas.

Ah ! Changement de donne ! Ça veut dire qu’elle est prête à rester ici un bon moment jusqu’à ce qu’elle obtienne son renseignement. Ça se complique, je pourrais évidemment brusquer les choses en lui alignant trois baffes, mais je ne suis pas décidée à faire ce genre de choses.

– Suis-moi, on va dans la cuisine !

Il me reste du très bon rosbif et je sors du frigo de quoi me faire une salade… et voilà que mon portable sonne. C’est Anna. Je n’ai pas envie que l’emmerdeuse entende la conversation, je file à côté.

Anna n’a rien de bien neuf à me raconter, mais c’est une incorrigible bavarde. Au bout de cinq minutes j’arrive à en placer une.

– Aurais-tu par mégarde donné mon adresse perso à quelqu’un.
– Mais non, voyons ! Pourquoi tu me demandes ça ?

Je lui explique en deux mots.

– Bizarre en effet ! Fais attention à toi, on ne sait jamais !
– T’inquiètes, je suis une grande fille, bisous !

Et quand je reviens dans la cuisine, la salade est faite ! Ça devient surréaliste ! En plus cette andouille, elle en a fait de trop ! Je me sors une assiette et des couverts, une seule assiette.

– Je n’ai pas mangé de la journée ! Me confie-t-elle
– Et qu’est-ce que tu veux que ça me fasse ! Dépêche-toi de répondre à mes questions et après tu pourras aller te taper un sandwich !
– C’est pas gentil !
– Bon, on va procéder autrement, qui est-ce qui t’as suggéré que je pourrais t’aider à retrouver ton tableau, c’est le curé ?
– Non, pas du tout !
– Parce que ça non plus tu as promis de ne pas le dire.
– C’est personne, c’est une idée à moi. Quand j’étais jeune je lisais plein de romans policiers, et il y a quelque chose qui me fascinait : la personne qui faisait l’enquête n’avait aucune piste au début, juste un nom et à partir de là de fil en aiguille, elle arrivait toujours à remonter toute l’affaire.
– Et pourquoi moi ? Pourquoi pas la directrice de la galerie ou Nancini ?
– La directrice de la galerie, elle était absente quand Nancini m’a prêté le tableau, quant à Nancini, il ne répond pas, j’ai essayé de la joindre toute la journée.
– Ah ?
– En fait, quand l’abbé Laroche-Garaudy m’a emmené à la galerie, j’ai été fasciné, je voulais en savoir plus, alors j’ai été profondément déçue quand j’ai appris que le repas du soir avait été annulé. J’ai donc eu envie de vous rencontrer, l’idée de l’interview n’était pas vraiment un mensonge.
– Qu’est-ce que tu racontes ? Le repas du soir a bien eu lieu, et si je me souviens bien l’abbé Machin nous a expliqué que tu avais un empêchement de dernière minute.
– Quoi ?
– J’ai l’impression qu’il ment comme il respire, ton curé ! Maintenant tu devrais peut-être te demander pourquoi ?

Moi je le sais, mais je ne lui dirais pas ! Il craignait simplement que je rende publique le fait que je l’avais déjà rencontré… et dans quelles circonstances. Je me marre !

– Il faudra que je m’explique avec lui ? Finit par marmonner Bernadette. Je vais peut-être repartir d’ici avec plus de questions qu’en arrivant.

Elle semble réfléchir. Je me coupe une tranche de rosbif et me sers un verre de vin.

– J’ai promis de ne pas dire des choses mais je n’ai rien juré.

Miracle ! La voilà prête à lâcher le morceau.

– Je ne vois pourquoi je devrais être loyale envers quelqu’un qui ne l’est pas avec moi… Continue-t-elle.

Bon ça va j’ai compris.

– C’est l’abbé Machin qui t’a expliqué mes activités ? C’est ça ?
– Ben oui !
– Et il t’a dit quoi exactement ?
– Quand je lui ai dit que j’avais l’intention de vous rencontrer, il m’a dit que ça ne servait à rien que vous n’étiez pas une personne intéressante… je ne comprenais pas pourquoi il me sortait ça. Alors il m’a expliqué qu’il vous avait déjà croisé dans les locaux de Radio-tradition.
– Mais il dit n’importe quoi, ce type, et qu’est-ce que je serais allé foutre là-bas ?
– Présenter le livre de vos mémoires, vous lui auriez dit que cela pourrait donner l’occasion d’un débat sur la prostitution, et il vous aurait éconduit !
– Quelle imagination ! Quel menteur !

Et quel salaud aussi ! Je lui dis ou pas à la Bernadette dans quelles vraies circonstances j’ai rencontré l’abbé Trucmuche ? Je décide de garder l’argument en réserve.

– Et l’adresse ?
– Non, ça je ne peux pas le dire ! Je vous ai donné la moitié de vos réponses, donnez-moi la moitié des miennes !
– Tu veux que je te donne la moitié de l’adresse du peintre ?
– Non, me dire en quoi l’adresse du peintre peut être un indice ?

La question n’est pas si con qu’elle en a l’air mais ça m’obligerait à lui raconter toute la partie de l’histoire qu’elle ignore. Je fais dans l’ellipse.

– Le voleur du tableau et le peintre se connaissent !
– Ah ! Et si je vous dis qui m’a donné votre adresse, j’aurais ses coordonnées ?
– Oui !
– Je peux avoir un bout de pain. ?

Je lui sors une assiette.

– Tu peux même manger une tranche de rosbif !

En étant gentille, je vais peut-être finir par savoir. Je la laisse dévorer sa viande, je lui propose de la salade, elle ne pipe plus un mot. Passionnant.

– Bon alors, je peux savoir ?
– Ça me gêne, si la personne apprend que j’ai trahi son secret, ça me met dans une situation difficile. Si vous pouviez me promettre de garder ce renseignement pour vous.

– Bon d’accord c’est promis !
– C’est monsieur Nancini !
– Nancini ? N’importe quoi ! Je croyais qu’il ne répondait pas au téléphone. Et en plus, je ne lui ai jamais donné mon adresse !
– Il me l’a donné le lendemain de ma visite à la galerie !
– Mais pourquoi ?
– Parce que je lui ai demandé ! Pour l’interview !

C’est quoi cette salade ! Je m’empare du portable et je fais son numéro.

– Vous lui téléphonez ? Mais vous aviez promis !
– Ah ! C’est vrai !

J’abandonne la communication, de toute façon ça ne décrochais pas. Mais je me promets d’éclaircir cette énigme.

– Je peux avoir l’adresse maintenant ?

Je lui donne. J’ai l’impression de faire une mauvaise action en la lui donnant, mais je ne sais pas encore dire pourquoi. Elle se lève.

– Une dernière chose avant de partir… me dit-elle avec de drôles d’yeux.
– Oui ?

Qu’est-ce qu’elle va me sortir encore ?

– En fait rien, j’allais vous demander un exemplaire de ce fameux livre, mais puisque vous m’avez affirmé que vous n’avez jamais écrit vos mémoires… on va donc en rester là, c’est dommage j’aurais tant aimé en apprendre davantage sur vous.
– Et bin tant pis !
– Juste une ou deux questions ?
– Je les sens venir tes questions : tu te demandes comment on peut être pute, c’est ça ?
– C’est dit un peu brusquement, mais il y a un peu de ça.
– Tu ne comprendrais pas, nos mondes sont trop différents, c’est comme si je cherchais à savoir pourquoi t’es encore pucelle à ton âge.
– Mais je ne suis pas pucelle !

Oh ! Le ton sur lequel elle me dit ça ! Elle ne le dit pas, elle le proclame haut et fort !

– Je peux encore abuser de votre temps cinq minutes ?
– Deux minutes, pas une de plus !

Elle se rassoit.

– Personne ne me comprend ! Seriez-vous la première à me comprendre ?
– Mais encore ?
– J’ai eu une éducation religieuse très stricte, famille nombreuse, je passais mes loisirs parmi les éclaireuses de France…
– C’est quoi ça ?
– Comme les scouts, mais pour les filles.

Bon elle va me raconter sa vie… Je pousse un long soupir.

– Si tu veux encore de la salade, tu te sers.
– Merci !
– Je n’arrêtais pas de penser à des choses interdites, des hommes et des femmes nues, je ne comprenais pas trop ce qu’ils pouvaient faire ensemble, comment on pouvait introduire ce machin ridicule qu’on voit sur les statues dans un corps de femme. J’étais vraiment très naïve. Et un jour j’ai eu des rapports avec une autre éclaireuse, elle m’a, elle m’a…

Tiens ça devient intéressant. Elle devient rouge comme une écrevisse, la Bernadette.

– Elle t’a appris le plaisir ?
– Oui c’est ça ! Nous somme devenues inséparables, puis ses parents ont déménagés en province, elle a disparu de ma vie. J’ai cherché un autre contact identique, ça s’est mal passé. J’ai voulu tourner cette page. Je suis allé me confesser, non pas auprès de mon confesseur habituel, mais auprès d’un prêtre que je n’avais jamais vu dans une autre paroisse. J’attendais un message fort, une explication, je n’ai pas compris son attitude. Il m’a expédié avec quelques prières et la promesse de ne plus recommencer. Mais j’ai recommencé, sans l’aide de personne, je me donnais du plaisir toute seule le soir dans mon lit. Devant et derrière…
– Devant et derrière !

Elle devient rouge comme une tomate. Je suis un peu bête de l’avoir interrompue.

– Je…
– J’ai compris, tout le monde le fait, tu sais.
– Alors j’ai osé en parler à ma mère ! Ça a été une catastrophe, elle m’a envoyé voir un bonhomme qui m’a expliqué que je devenais anormale, la seule solution selon lui était soit le mariage soit le couvent.

Mais pourquoi me raconte-t-elle tout ça ? Ah, oui, c’est vrai, parce que personne ne la comprend ! Et qu’est-ce que je vais bien pouvoir lui dire, moi ?

– Mais avant de choisir entre le couvent et le mariage, je voulais en savoir plus. Je n’avais jamais connu de garçon. On est parti en vacances peu de temps après, un garçon me tournait un peu autour, je me suis laissé courtiser. Alors je lui ai dit carrément que j’aimerais faire l’amour avec lui. Il m’a regardé comme si j’étais la dernière des folles, mais le lendemain, il est revenu… avec un copain. Ils me sont tous les deux passés dessus à tour de rôle, je ne me souviens pas de grand-chose sinon leur sexe énorme, c’est la première fois que j’en voyais en érection, ça ne m’a ni intéressé, ni choqué, mais je n’étais plus pucelle !
– C’est peut-être toi qui devrais raconter tes mémoires !
– Je peux continuer ?
– Oui ! Mais finis ta salade !
– Je n’ai pas été me confesser, je n’ai pas osé. J’ai poursuivi mes études de journalisme. Quand j’ai eu mon diplôme mes parents m’ont fait entrer par piston à Radio-tradition. J’ai décidé de ne plus avoir de rapport sexuel avec qui que ce soit, et je m’habille en conséquence. Mais la nuit, je fantasme toujours.
– Et tu te masturbes ?

De nouveau, son visage devient rouge !

– Toutes les nuits, ou presque ! Avoue-t-elle en baissant les yeux…
– Et tes fantasmes, c’est quoi ?
– Non, c’est trop personnel !
– Et qu’est-ce que tu attends de moi ?
– Que vous me compreniez ! Juste que vous me compreniez !
– Tes fantasmes sont si affreux que ça ?
– Ils ne sont pas affreux ?
– Alors raconte, maintenant que tu as commencé, il faut aller jusqu’au bout !
– Accordez-moi cinq minutes, je crois que je vais me confier, mais c’est très dur ?
– Un bout de fromage ?
– Merci ! Ça fait une heure que tu me tutoies, je peux te tutoyer aussi !
– Bien sûr !
– Et t’appeler Christine ?
– Oui !
– Si ce que je vais te dire te choque, promets-moi de ne pas mal réagir. Je m’en irais d’ici et tu ne me reverras plus ! D’accord ?

Je la rassure d’un sourire. Pour qu’elle me dise quelque chose qui me choque, faudrait qu’elle y mette le paquet !

– Je… je… je ne peux pas !
– Prends ton temps !
– Allez, je me lance : Dans mes fantasmes, je suis une pute qui prend du plaisir avec d’autres femmes.

Tout à fait inattendu, mais absolument pas choquant.

Je la regarde maintenant autrement, coiffé et attifé autrement elle n’aurait rien d’une star, mais serait néanmoins normalement attirante. Il faudrait aussi qu’elle se maquille un peu ! C’est une pauvre fille, son éducation et son environnement lui ont flingué la vie ! Je ne vois pas bien comment elle pourrait s’en sortir ! Et puis je viens de comprendre, son histoire, c’est un appel au secours, elle a besoin de moi ! Mais je ne suis pas non plus sur Terre, pour soulager toutes la misère du monde. N’empêche que l’envoyer sans précaution chez le peintre comme je l’ai fait n’est pas très malin, il faudra que je l’empêche de le faire, mais plus tard.

Ça lui a coûté de se confier ! Elle me regarde avec des yeux apeurés, elle guette chaque mouvement de mon visage.

J’emploie quelle méthode ? La thérapie de choc peut-être ? Quelques préliminaires d’abord ?

– Tu es restée croyante ?
– A ma façon ! En fait ça fait partie des questions que je me pose, mais ce n’est pas vraiment nouveau.
– Pourquoi n’essaie-tu pas de réaliser ton fantasme ?

Et la voilà qui tombe en larmes ! Je n’ai pourtant rien dit d’incorrect, me semble-t-il ?

– On se calme !

Ben, non elle ne se calme pas, c’est les grandes eaux ! J’attends que ça s’arrête ! Ça finit toujours par se calmer, les glandes lacrymales n’ont pas des ressources infinis.

– Je m’en vais ! Dit-elle en se levant et en pleurnichant.
– Mais qu’est-ce que je t’ai dit qui te mette dans un état pareil.
– Tu ne m’as pas compris !
– Si, je crois !
– Non, je me suis fourvoyée, je m’en vais !

Et ça y est, je viens de comprendre ! Mais, merde comment gérer ça ?

– Bernadette ! J’ai tout compris, tu voudrais que je t’aide à réaliser ton fantasme ?
– Mais tu ne le feras pas !
– J’ai pas dit ça !

Et hop la voilà dans mes bras ! Imaginez la situation dans laquelle je me suis mise ! A la limite, je veux bien lui montrer de quoi elle aurait l’air avec un look différent de celui d’un sac à patates. Mais c’est tout, je ne vais quand même pas coucher avec elle, ce n’est pas parce que je banalise le sexe que je couche avec n’importe qui n’importe quand, je ne le fais même pas dans le cadre de ma profession, mais comment lui expliquer ça ? Et puis bon, du fantasme à la réalité, il y a un pas, contrairement à ce croient les andouilles, on ne s’improvise pas pute du jour au lendemain, c’est un métier, ça s’apprend et n’importe qui n’est pas capable de le faire ! De le faire correctement, j’entends !

Curieux son fantasme, tout de même. Je ça que ça existe, mais de là à chercher à le concrétiser… Moi, je ne suis pas devenue pute par vocation ni par fantasme, mais de façon bien plus basique parce que je n’avais plus un sous (voir Chanette à Saint-Tropez). Et qu’on arrête de nous les briser avec cette histoire de vocation ? Vous vous figurez sans doute qu’une caissière de supermarché, qu’un employé de la poste ou qu’un contrôleur des chemins de fer ont choisi leur profession par vocation ?

Après j’ai découvert les avantages de l’activité, l’argent facile, mais aussi les contacts « hors prestation » avec les clients dont l’immense majorité n’a rien à voir avec les « malades » que nous décrivent celles qui n’y connaissent absolument rien et ceux qui font de enquêtes « sociologiques » dont la conclusion est d’ors et déjà écrite avant même qu’ils ne se mettent au travail.

Cela dit, j’emmerde les moralisateurs, je ne fais de mal à personne, au contraire j’apporte du réconfort. Personne ne m’exploite, je n’ai aucun souteneur, je travaille librement et quand j’ai envie de tirer une flemme je ne me gêne pas. Je suis très bien dans ma peau. Fin de cette nécessaire digression.

Me donner du temps ! Voilà la solution. Je veux bien lui donner un coup de pouce, après à elle de se prendre en main, je ne suis pas Pygmalion, nom de non !

– Je vais t’aider… mais on ne va pas tout faire tout de suite… d’accord ?

Elle me fait un petit oui de la tête ! On commence par quoi, le visage, les cheveux, les fringues ?

– Allez direction salle de bain ! Je suppose que tu ne te maquilles jamais ?
– Disons que ça fait longtemps !
– Il te reste des notions ?
– Si peu !

On y va : je me rends compte que la peau de son visage est légèrement grasse, elle n’a jamais dû s’en occuper. Un petit nettoyage avec un produit adapté me paraît indispensable, mais on ne va pas non plus tout faire ce soir. Mon but, pour l’instant, c’est de lui montrer à quoi elle pourrait ressembler en s’arrangeant un peu ! Le fond de teint, puis les yeux, là c’est long parce que les sourcils ne sont pas épilés comme il le faudrait, mais on arrive à faire quelque chose de pas mal. Je termine par le rouge à lèvres. Ce qui ne va pas c’est la coiffure, je lui colle une serviette en turban autour de la tête avant de la faire se regarder dans un miroir. Il manque quelque chose : des boucles d’oreilles ! Je regarde, elle n’a même pas les oreilles percées, j’hallucine ! Mais j’ai une paire en toc qui se clipse ! Ça fera l’affaire.

– C’est dingue ! Avoue-t-elle.
– Attend, je dois avoir une perruque, je ne m’en sers jamais.

C’est blond, semi-longs et raide avec des franges sur le front, je n’ai jamais osé la porter. Allez, zou sur la tête de Bernadette ! Ça fait vraiment pute, ce truc, c’est le cas de le dire !

– Je te donnerai l’adresse de mon coiffeur, c’est un visagiste, un artiste ! Il faudra aussi que tu changes tes lunettes. Ah, autre chose d’indispensable : le sourire ! Il faut sourire le plus souvent possible et à n’importe quelle occasion, dans la rue, dans le métro, en allant chercher le pain, au téléphone, partout. Une fille superbement maquillée qui ne sourit pas c’est du gâchis. Prend l’habitude de le sourire, au bout de quelques jours tu le feras de façon naturelle. Allez vas-y !

Voilà, son visage s’éclaire. Transformée de chez transformée, elle est belle comme ça ! Ne dit-on pas qu’un bon maquillage et une perruque sont capable de transformer un homme quelconque en un objet de désir… alors une femme… et qui en plus nous gratifie d’un joli sourire ! Et puis je suis contente de moi, Bernadette, c’est ma créature, faudrait d’ailleurs lui trouver un autre prénom, Bernadette, c’est lourd et ça fait Lourdes. C’est quoi les diminutifs de Bernadette ? Nadine, Nadia ? On verra ça plus tard. Maintenant les fringues.

Elle fait à peu près ma taille, ça devrait aller, j’ai justement une petit robe rouge que je ne porte jamais. J’emmène Bernadette dans la chambre.

– Tiens, essaie ça !
– Tout de suite ?
– Tout de suite !

Elle se retourne pour retirer ses vêtements du haut et sa jupe. La voilà en sous-vêtement.

– Tourne-toi, je veux te voir !

Pas très sexy, tout ça, où achète-t-elle des horreurs pareils ?

– Attends je vais te trouver un soutif.

Je dégote un joli soutien-gorge noir plongeant en dentelles.

– Tu essaie celui-là !

Elle se tourne à nouveau !

– Non ! Tu l’essaies devant moi !

Il est bien possible que ce soit la première fois qu’elle se mette les seins à l’air devant une femme, du moins depuis ses aventures de jeunesse. Il y a des pas qu’il faut oser franchir. Alors elle semble hésiter mais juste quelques secondes.

Je l’ai bien maquillée, je ne vois pas si elle rougit, mais l’expression de ses yeux est étrange. Elle pousse un soupir en retirant son soutif comme si elle se jetait à l’eau.

– Mais c’est mignon tout ça !

Je m’approche. Elle semble tétanisée, je lui caresse les seins, elle soupire, se laisse faire. Je lui fais un baiser à quelques centimètres du mamelon.

– Oui ! Dit-elle simplement.

Bon, il faut que j’arrête mes conneries, j’avais dit qu’il faudrait plusieurs séances, j’avais dit que je n’avais aucune envie de coucher avec elle. Mais je ne pensais pas non plus qu’elle serait transformée à ce point. Je me recule.

– Tu l’essaies ?

Elle a l’air déçue. C’est de ma faute, il ne faut jamais jouer avec le feu !

– Je ne sais pas où j’ai mis la culotte assortie…

Et puis je pense à un truc !

– Enlève-la donc, ta culotte.

Elle le fait en me regardant bizarrement. Whaouh, c’est bien ce que je pensais, je n’ai rien contre les poils pubiens mais là il va falloir élaguer ! Quand je disais qu’il faudrait plusieurs séances ! Je ne sais pas si je vais me lancer dans une séance de rasage de minou à cette heure-là, je commence à fatiguer.

Je dégage sa chatte de ses poils. Incroyable, elle mouille !

Ça me fait un drôle d’effet d’avoir sa chatte si proche, encore plus proche. Un bisou n’engage à rien. J’avance ma langue, je la lèche. Bernadette se projette en arrière avec un râle.

Je suis prise dans l’engrenage et je l’ai bien voulu. Je continue de la lécher. Elle possède un gros clito qui pour le moment m’a l’air en pleine forme. Le bout de ma langue vient le titiller, et en même temps mon doigt s’enfonce dans son cul… Puisqu’elle aime ça je ne vais pas me gêner. Bernadette respire de façon saccadée, je sais qu’elle va jouir d’un moment à l’autre. Qu’est-ce qu’il m’a pris, maintenant il faudra que j’en assume les conséquences, l’idée de tout arrêter, là, maintenant, serait véritablement trop cruelle !

Ça y est, elle part, elle étouffe à moitié son cri (je suppose qu’elle a l’habitude de procéder de la sorte). Son visage devient un kaléidoscope d’expressions ! La joie, la surprise, l’émotion… Elle cherche à s’approcher de moi, je ne vais pas la repousser, on s’embrasse, on se câline, je me laisse prendre au jeu. Moi aussi j’aimerai bien un petit câlin. Lui demander, ce serait nous rapprocher encore un peu plus. Est-ce vraiment raisonnable ?

Et puis merde !

Je me déshabille devant ses yeux subjugués. Je passe devant elle, me retourne. Elle ne sait plus quoi dire ni faire. Je m’affale sur le lit.

– Viens me rejoindre !

Viendra, viendra pas ? Je suis sûre qu’elle va venir !

Elle s’avance vers le lit, me regarde (je devrais dire « me contemple »), semble hésiter. M’indique le lit avec le doigt.

– C’est là que tu…
– Que je quoi ?
– Que tu travailles ?
– Non, j’ai un studio ailleurs !
– Ah !

Elle semble penser à quelque chose. Réaliser son lit dans le lit professionnel d’une pute aurait sans doute été un plus pour elle. Sur ce point c’est raté !

– T’es trop belle ! Dit-elle !
– Je ne suis pas moche, mais je suis très ordinaire.
– Par rapport à toi, je ne suis qu’un épouvantail !
– Arrête de dire des conneries et viens me sucer !
– Non ! Je vais m’y prendre comme une gourde !

M’énerve !

– Bon, je t’explique : t’as une chatte, tu sais comment elle est faite ? Ben, je vais te faire un aveu, j’ai exactement le même modèle. Alors tu te débrouilles.
– Tu ne me jetteras pas si je fais quelque chose de mal !
– Viens me lécher et arrête de te prendre la tête !

La voilà enfin !

Je redresse la tête pour voir comment elle va s’y prendre. Pour l’instant elle a l’air d’une poule qui a trouvé un couteau. Je n’aurais jamais dû procéder de la sorte. Je suis idiote, comment rattraper le coup, maintenant ?

– Embrasse, embrasse tout ça, sers toi de tes lèvres et de tes doigts, comme ça, ou comme ça, c’est bien… maintenant sors un petit bout de langue, juste un petit bout, passe partout, remonte jusqu’au clito. Ben voilà tu te débrouille bien. Maintenant lèche pour de bon, tu cibles le clito mais tu ne restes pas tout le temps dessus, voilà comme ça. Descends, remonte, rapproche-toi du clito redescends, recommence, recommence plusieurs fois et après tu resteras en haut.
– Je peux te toucher derrière ?

Ma parole elle fait une fixation sur son petit trou, c’est drôle quand même !

– Oui, bien sûr !

Ça y est j’ai son doigt ans le cul, c’est pas spécialement mon truc mais de temps en temps, ça n’a rien de désagréable

Je la laisse continuer, je me concentre sur la montée de mon plaisir, contre toute attente, cette grenouille de bénitier va me faire jouir, il va me suffire de me laisser un peu aller, de me laisser un tout petit peu aller, ça vient, ça monte, j’explose. Bernadette éclate de rire, ce doit être nerveux. Mais le rire est communicatif, nous voilà à rigoler toutes les deux comme des bossues.

On s’embrasse, elle est heureuse et moi je suis contente qu’elle le soit.

Coup de folie ! Evidemment ! Mais maintenant il faut revenir sur terre. Je lui propose de rester coucher mais j’évite les grandes effusions, il ne faudrait pas qu’elle devienne collante la Bernadette.

On a causé, je lui ai expliqué ce que je faisais, la domination, elle n’avait jamais entendu parler. Il a fallu aussi que je lui apprenne que je pratiquais librement mon métier, que je n’étais pas maqué et que je ne l’avais jamais été. Elle en paraît fort surprise !

à suivre

© Vassilia.net et Chanette (Christine D’Esde) mars 2013. Reproduction interdite sans autorisation des ayants droits

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4 réponses à Chanette 19 : Trafics (roman) 5 – Bernadette par Chanette

  1. Farini dit :

    Sous chaque bonne-sœur se cache une pute refoulée disait mon tonton

  2. sapristi dit :

    Un très bel épisode lesbos avec en filigrane un anticléricalisme rampant parfaitement bien maîtrisé. Chapeau !

  3. pluviose dit :

    Très joli chapitre, l’a rencontre entre Chanette et Bernadette est particulièrement bien réussi, tout en petites touches. Du grand art. Bravo

  4. Kiroukou dit :

    Ce 5ème chapitre est axé sur la rencontre entre Bernadette, jeune femme bridée dans sa sexualité, mais aux fantasmes secrets avec Chanette. Et c’est particulièrement jouissif.

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