Préambule : cette histoire fait suite à « Professeur Martinov et le lapin
dur » mais peut se lire seule. Pour ceux qui ont lu ce dernier une petite
transition est néanmoins nécessaire.
Rappelons que le « lapin dur » est un produit découvert par le professeur
Martinov et son assistante et qu’il est censé (ni plus ni moins)
concurrencer le viagra ! Passé l’enthousiasme de la découverte, il fallut
bien réfléchir à la suite. La voie royale consistant en un protocole
d’expérimentation agrée suivi d’un dépôt de brevet et d’une mise en
production fut d’emblée écarté. On ne concurrence pas impunément les grands
laboratoires et Andrej Martinov savait ce chemin par trop parsemé
d’embûches.
Restait donc la diffusion masquée. On commercialiserait un vague machin
qualifié « à base de plantes » contenant évidement du Ginseng et d’autres
bricoles, la molécule miracle y étant introduite d’anonyme façon.
Oui, mais ? Comme gérer tout cela ?
Cela voulait dire : démarchages des éventuels grossistes et commerçants
acceptant de commercialiser la chose, campagne publicitaire, contacts
divers, secrétariat, et puis aussi création d’une infrastructure permettant
de préparer les produits, autrement dit une chaîne de production. Cela
posait trop de problèmes d’organisation ! Par où commencer ? Fallait-il
embaucher une secrétaire ? Fallait-il faire sous-traiter la chaîne de
fabrication ?
Tant et si bien que Martinov finit par édicter cette décision pleine de bon
sens :
– On verra à la rentrée !
Fin du prologue et début de l’histoire.
– Je vais y réfléchir au calme et au vert, et on prendra des décisions en
revenant !
– Vous partez en vacances, alors ? Demanda Béatrice, son adorable assistante
de laboratoire.
– Oui, j’ai un ami qui possède un petit chalet dans les Alpes, une résidence
secondaire, il me le prête.
– Veinard !
– Ben, oui ! Et vous, vous faites quoi ?
– Rien, je devais partir en Grèce avec mon petit ami, mais je n’ai plus de
petit ami !
Un souffle de mélancolie passa dans les yeux de Béatrice. Cette jolie blonde
aux yeux bleus avait su égayer si bien la vie du vieux professeur pendant
leurs recherches !
Elle lui raconta alors très brièvement son histoire, banale à souhait, le
grand amour, celui qu’on ne rencontre qu’une seule fois, les projets
d’avenir à la pelle, l’impression que l’on a toujours été fait l’un pour
l’autre, et puis un jour tout s’écroule, et quand on croit que tout s’est
écroulé, ça continue encore, jusqu’à découvrir qu’on a perdu son temps. Elle
avait bourlingué un peu, sorti en boite plus que de raison, rencontré un tas
de gens dont certains pas très clairs, mené une vie de patachon, tant et si
bien qu’elle avait fini par se faire virer de son premier emploi chez un
grand laboratoire.
Certaines décisions sont salutaires. Elle s’était dite à ce moment-là qu’il
fallait sans doute mettre un terme à la stérilité de ces gesticulations.
C’est ainsi qu’elle était tombée sur l’annonce de Martinov qui recherchait
une assistante.
Et c’est ainsi qu’ils découvrirent ensemble le « lapin dur » (voir cet épisode)
Mais c’est ainsi qu’en l’expérimentant, ils vécurent ensemble quelques
séances de frénésie sexuelle d’une intensité inouïe…
Bien sûr, cela avait considérablement rapproché le vert professeur et sa
jeune assistante. Mais si un surcroît d’intimité était né de cette
expérience, ils avaient implicitement préféré en rester là en bannissant
toute allusion sexuelle.
– Jusqu’à quand ? Se disait Martinov in petto.
– Professeur, j’aimerais vous demander quelque chose ?
– Bien sûr !
– Mais, vous ne serez pas fâché ?
– Mais non !
– Il y a de la place pour deux dans la baraque de votre ami ?
– Oui, il y a une chambre d’amis, je crois !
– Vous m’emmenez ?
– Bien sûr !
– Mais je voudrais être claire ! On part au même endroit, mais on n’est pas
forcément ensemble, chacun organisera ses journées comme il lui plaira. Je
vous paierais ma part ; et on restera indépendants, ça ne nous empêchera pas
de nous faire une petite bouffe de temps en temps.
– Pas de problème !
Après avoir envisagé différentes solutions, c’est en chemin de fer qu’ils
gagnèrent le massif alpin, jusqu’à Modane. De là, il fallut prendre un car,
se rendre compte ensuite que le car en question n’allait pas jusqu’au trou
perdu de l’ami du professeur.
– C’est un taxi qu’il aurait fallu emprunter !
Malin de dire cela lorsqu’on est en pleine nature et qu’il reste dix
kilomètres de routes en lacets à se farcir à pieds avec les bagages !
– On nous prendra peut-être en stop ?
Bien sûr, peut-être ! En fait pas une bagnole ne se manifesta. Sauf à la fin
quand ça ne servait plus à rien:
La conductrice était une brune aux cheveux courts, dans la trentaine, les
yeux masqués par de grosses lunettes de soleil.
S’en suivit alors ce dialogue absolument surréaliste :
– Vous allez au Mont de Vénus ? demanda-t-elle avec un fort accent
probablement espagnol
– Non à la Vernetta, chez Monsieur C…
– Alors vous êtes arrivés, c’est à trois cent mètres, je vous prends quand
même ?
– Merci ! Pour trois cent mètres, ce n’est pas la peine !
– C’est comme vous voulez ! Vous restez longtemps ici ?
– On ne sait pas trop, un mois peut-être !
– On sera amené à se revoir, j’espère que nous aurons des relations de bon
voisinage, c’est tellement plus pratique et plus sympa !
– Il n’y a pas de raison !
– C’est que les gens n’aiment pas trop les Vénusiens par ici !
– Les Vénusiens ? S’étonna Béatrice
– Oui, les Vénusiens !
– Bonne fin de journée ! Conclut le professeur, n’ayant manifestement pas
envie de s’engager dans une conversation avec celle qu’il considérait d’ors
et déjà comme la farfelue du coin.
Mini déception à l’arrivée ! Le chalet était minuscule : une petite pièce
principale dans laquelle on accède directement et qui comporte un minuscule
coin-cuisine ainsi qu’une cheminée qui n’avait sans doute jamais
fonctionnée, une chambre y était attenante avec un lit de deux personnes.
– Et, elle est où, la chambre d’ami ?
– A l’étage, je suppose !
Ben, oui, à l’étage, le problème c’est qu’elle était inhabitable. Y trônait
un invraisemblable bric-à-brac de meubles divers, de caisses et de cartons
empilées, issus de l’emménagement jamais réellement terminé.
– Ben, bravo, mon petit professeur ! Et elle dort où, la petite Béatrice ?
– Je vais vous laisser le lit, je vais demander que l’on nous livre un lit
pliant pour une personne !
– Pfff ! Et tu crois qu’ils vont nous le livrer pour ce soir ?
(Les deux personnages n’étaient jamais parvenus à savoir s’il fallait qu’ils
se tutoient ou qu’ils se vouvoient et mélangeaient allégrement les deux
modes.)
– Je suis confus ! J’aurais mal compris ce que m’a expliqué mon ami !
– Bon, laisse tomber, on se partagera le plumard. J’espère que vous ne
ronflez pas, mon petit professeur ?
– Je ferais des efforts ! Répondit Martinov, que la suggestion de son
assistante rendit soudain primesautier comme un pinson !
Le chalet était bâti tout près d’une source et l’alimentation en eau potable
était donc assurée. Une petite remise contiguë leur permit de découvrir la
présence d’un vélomoteur en état de fonctionner. Il leur permettrait de se
déplacer commodément jusqu’au bourg en cas de besoin.
– Bon, je prends une douche, et après un bain de pieds, ou le contraire, je
ne sais pas, j’ai les pieds en compote ! Déclara Béatrice.
Finalement, elle prit sa douche d’abord, Martinov cru diplomatique d’en
prendre une également. Quand il eut terminé, il s’entoura d’une serviette et
retrouva Béatrice trônant au milieu de la pièce, le corps recouvert de
l’unique peignoir qu’elle avait dégotté, les pieds dans une cuvette d’eau
savonneuse.
– Mon ami m’a laissé un message près du miroir de la salle de bain, je vais
vous le lire :
» Je pensais terminer l’installation avant ta venue, mais j’ai manqué de
temps. Pour le ravitaillement, voici les coordonnées du commerçant qui vous
livrera… Sinon, toi qui aimes confondre les charlatans et les faux
scientifiques, il te faut savoir qu’un cinglé s’est installé un peu plus
haut vers Luzère, dans une ancienne ferme abandonnée qu’il a rachetée. Il a
rebaptisé cela » le mont de Vénus « . Il y abrite une communauté de cinglés,
une espèce de secte… La gendarmerie conseille aux randonneurs d’éviter tous
contacts avec ces gens-là, mais rien ne t’empêches de t’amuser si l’envie
t’en prend »
Martinov rangea le papier d’un air distrait. Le contact des sectes ne lui
disait rien qui vaille et il ne voyait pas bien l’amusement qu’il pourrait
en tirer. Quant à Béatrice elle avait, en fait l’esprit ailleurs.
– Mes pauvres pieds ! Tu crois qu’il y aurait une pharmacie d’ouverte au
village ?
– Oui, probablement !
– Parce que j’ai intérêt à les soigner tout de suite, sinon je vais être
handicapée pour faire de la rando !
– Et tu voudrais que j’aille à la pharmacie en vélomoteur, c’est ça ?
– Mais, pas du tout, je peux y aller toute seule !
– Mais non, je te dois bien ça, je t’ai emmené dans un traquenard malgré moi
!
– Mais c’est qu’il serait galant, mon petit professeur !
– Qu’est-ce que tu crois, j’ai de l’éducation, chère amie !
Elle lui tendit alors ses pieds :
– Non, mais regarde, dans quel état ils sont !
– N’exagérons rien, il y a juste deux petites cloques !
– J’aime pas me niquer les pieds !
– Oui, ça j’avais compris ! Bon, avant de partir au bourg, je vais regarder
dans l’armoire à pharmacie, si ça se trouve, il y a tout ce qu’il faut !
Martinov se précipita jusqu’à cet endroit béni et revint enthousiaste avec
une boite de pansements « spécial petits petons abîmés »
– C’est un peu primaire, mais ça fera l’affaire ! Tu me les mets ?
– Mais volontiers, chère princesse, répondit le professeur, c’est un honneur
pour moi de m’occuper de ces délicieuses petites choses !
– Ben quoi ? C’est vrai ! Ils sont pas mal mes pieds !
– Ils sont ravissants, reprit Martinov, après avoir réussi à coller
péniblement ces satanés pansements qui n’étaient sans doute plus
complètement adhésifs depuis plusieurs années !
– Tu peux me les masser un petit peu ?
– Te les masser ?
– Oui, ça me fera du bien !
– Mais, je n’ai jamais fait cela !
– Il y a toujours un commencement à tout, mon petit professeur !
– Je masse où, exactement ?
– Pose donc tes mains, elles vont te guider !
– Ah bon ?
Martinov se mit donc à masser le pied de son assistante, massant tantôt les
chevilles, tantôt le dessus, tantôt la base.
– Tu masses très bien !
Leurs regards se croisèrent à ce moment-là. Martinov ne pût s’empêcher de
déceler une lueur bizarre dans les yeux de Béatrice. Et puis soudain, il
comprit, une barrière avait été franchie, le massage avait désormais dépassé
sa fonction relaxante de base pour entrer dans une phase beaucoup plus
trouble. Un frétillement agitait maintenant non pas la braguette du
professeur, vêtu à ce moment là d’une simple serviette de bains, mais
l’endroit où elle aurait dû se trouver !
– Professeur ?
– Oui, Béatrice !
– J’aimerais bien que mes pieds sente le contact de ta petite moustache !
– Tu exagères ! Répondit Martinov, avec infiniment d’hypocrisie.
Il avança alors son visage vers le pied de Béatrice.
– Tu me chatouille, andouille ! Rigola-t-elle.
– Faudrait savoir ?
– Non, continue ! Fais-leur des petits bisous !
Alors le professeur se mit à bécoter le pied avec frénésie. Et puis l’ordre
vint. Oh ! Sans autorité, ni sécheresse excessive, mais c’était bien d’un
ordre dont il s’agissait, il n’y avait aucun doute là-dessus !
– Lèche !
Plus troublé qu’il ne l’aurait cru, il était en plein dans le trip de sa
collaboratrice et entreprit de lui lécher les pieds passant de l’un à
l’autre.
Le peignoir de Béatrice s’était alors ouvert de façon quasi naturelle, sa
main droite caressait maintenant sa chatte, l’autre câlinait ses seins.
Martinov n’avait de son côté rien fait pour empêcher sa serviette de glisser
à terre et exhibait sans état d’âme particulier sa virilité redressée. Le
pied de la jeune chimiste était à présent humecté de salive, il ouvrit la
bouche et goba le gros orteil, lui imprimant un mouvement des lèvres en un
curieux aller et retour, un peu à la manière d’une fellation. Cette
initiative spontanée accéléra l’état de Béatrice qui n’en pouvant plus
agitait frénétiquement ses doigts dans son sexe de plus en plus humide.
– Mords ! Mordille ! Pas trop fort mais mordille !
Martinov ne discuta même pas, imprima quelques mouvement de dents sur cet
orteil offert et Béatrice éclata. Il s’attendait à un cri fulgurant. Non, ce
ne fût pas cela. Un immense soupir. Son corps qui s’affaisse. Le sourire
immense. L’apaisement. La paix. La sérénité.
– Et moi ? Faillit dire le professeur.
Il n’en eut pas le temps. A peine remise de ses émotions, Béatrice s’empara
de la verge raidie de Martinov, la masturba quelques instants avant de se
l’introduire en bouche où de quelques mouvements combinés des lèvres et de
la langue, elle le fit cracher de plaisir.
– Ça va, mon petit professeur ?
– Je suis aux anges !
– C’était un coup de folie ! Rien qu’un coup de folie ! D’accord ?
– Je sais bien !
– Mais je ne regrette rien !
– Ça, moi non plus !
C’est le surlendemain, au retour d’une belle balade en montagne accomplie
ensemble qu’ils rencontrèrent de nouveau la « vénusienne ». Ils étaient non
loin de cette étrange bâtisse baptisée dérisoirement le « Mont de Vénus ». On
sentait chez l’architecte fou qui avait pondu ce truc une volonté de faire
futuriste comme si cela avait été un but en soi. Des murs renflés, aucun
angle, tout en rondeur, des fenêtres en forme de hublots. Et au sommet un
assortiment complet d’antennes de toutes sortes, des droites, des inclinées,
des paraboliques, des zigzageuses et des « n’importe quoi ».
– Hello !
Martinov répondit d’un petit bonjour assez peu aimable signifiant qu’il
comptait bien en rester là, mais Béatrice fut plus avenante et répondit d’un
sourire.
– Ça se passe bien, vos petites vacances ? reprit l’inconnue
– C’est un peu paumé comme coin, mais c’est magnifique !
– Vous venez d’où ?
– Région parisienne !
– Ah, oui ? Je ne connais pas ! Moi je viens de Vénus !
– Allez, viens Béa ! Coupa Martinov.
Il ne rajouta pas « laisse tomber cette folle » mais le pensait fortement.
Autant le professeur pouvait se montrer l’esprit ouvert, curieux, tolérant,
autant il se fermait devant l’aberration. Mais Béatrice, elle, s’amusait,
elle voulait savoir jusqu’où irait cette pauvre fille.
La pauvre fille en question avait d’ailleurs l’air terriblement bien dans sa
peau, ce qui en fait rajoutait à l’absurdité de la situation. Un corps assez
grand, un certain charme que d’aucuns auraient pu trouver rustique, une
coiffure brune « au carré » savamment entretenue, un maquillage discret mais
bien réel.
« Depuis quand va-t-on chez le coiffeur et se maquille-t-on dans les sectes
? » se demanda Béatrice avant d’attaquer :
– Vous venez de Vénus ? C’est quoi ça Vénus ? C’est un canton suisse ?
– Non, c’est une planète !
– Et elle est où, votre planète ?
La tronche de la fille ! Incapable de répondre ! C’en était affligeant !
– Je ne suis pas doué en géographie !
– En géographie ?
– En astrologie !
– En astrologie ?
– Bon, vous ne me croyez pas ! Personne ne nous croit de toute façon !
– Ecoute ma cocotte, intervint alors Martinov, presque malgré lui. La
planète Vénus est un machin où il fait 400° C à la surface, c’est rempli de
gaz carbonique, la pression est insupportable et je ne parle même pas de
l’activité volcanique. Personne ne peut vivre là-dedans. Eventuellement des
micros organismes simplifiés, mais rien qui ressemble à un être humain !
Etes-vous un micro-organisme simplifié, mademoiselle ?
– Je ne comprends rien à ce que vous racontez. Les Vénusiens ont tendu un
écran autour de leur planète afin que les observateurs terriens ne puissent
pas voir la réalité.
La phrase était ânonnée, comme apprise par cœur.
– Ma pauvre fille ! On vous a complètement lavé le cerveau ! C’est bien
triste ! Allez viens Béa, on perd notre temps !
– Alors je vous laisse, répondit l’inconnue ! C’est dommage, reprit-elle à
l’adresse exclusive de Béatrice, t’es mignonne, j’aurais bien discuté avec
toi, tu m’as l’air plus ouverte que l’autre grognon.
L’incident fut assimilé de façon très différente par nos deux joyeux
vacanciers.
– J’essaierais bien de discuter avec elle ! De la sortir de là !
– Arrête ! C’est impossible ! Répondit le professeur. Ces gens-là ne s’en
sortent qu’avec des thérapies de longues durées et très lourdes.
– Ça dépend ! On ne sait jamais ? Un déclic ?
– Je n’y crois pas ! Mais il y a peut-être plus amusant à faire !
– Oui ? Quoi ?
– Par exemple, bricoler un petit truc qui leur rendrait la vie impossible !
Il n’y a rien de pire pour le membre d’une secte de voir son gourou
incapable de surmonter l’adversité.
– Ah ! Ah ! Je retrouve le vrai Martinov ! Et tu penses à quoi ?
– Je ne sais pas, mais pourquoi pas un machin qui parasiterait toutes leurs
communications radios et téléphoniques, c’est assez facile, il me faut un
peu de matériel, mais on a le vélomoteur… Oh ! Oh ! Je le sens très bien
ce truc-là ! Je vais m’y mettre de suite.
Pourquoi, mais pourquoi donc Béatrice s’était-elle mis cette « mission » en
tête ? Elle avait avant de se « calmer » rencontré un tas de gens bizarres, la
plupart d’ailleurs peu intéressants, se contentant de les écouter dans une
attitude d’extrême passivité. Elle voulait sans doute se prouver qu’elle
pouvait servir à quelque chose, humainement parlant.
Elle s’était persuadée qu’en traînant de façon un peu trop voyante auprès du
« Mont de Vénus », l’inconnue réapparaîtrait. Cela ne loupa pas !
– Hello !
– Salut !
– Je savais que tu reviendrais !
– Ne te fais pas trop d’illusions ! Au fait tu as un prénom, ou faut-il
t’appeler par ton numéro de série ? Ironisa Béatrice
– J’ai un numéro, répondit sans rire la fille, c’est le numéro sept, suivi
d’autres indications. Mais tu peux prononcer le chiffre sept en langage
vénusien, ce sera plus… intime !
– Et c’est ?
– Siem !
Béatrice faillit s’esclaffer de rire. Ah ! Il ne se fatiguait pas trop le
gourou. Effectivement « siem » signifie sept… non pas en « vénusien » mais en
russe ! Morte de rire ! Elle ne releva pas, gardant l’argument en réserve.
– Moi, c’est Béatrice !
– Je sais !
Comment pouvait-elle savoir ? Ah ! Oui ! Tout simplement parce qu’elle avait
entendu Martinov l’interpeller.
– Pourquoi es-tu revenue ? reprit Siem
La bonne question ! Mais comment répondre ?
– Parfois, il y a des choses que l’on fait comme ça, sans vraiment trop se
les expliquer !
– Le gars qui est avec toi, c’est indiscret de te demander…
– Oui, c’est indiscret coupa la jeune chimiste. Du moins à ce stade de nos
relations !
– C’est déjà un élément de réponse
– Je sais bien !
– L’important c’est que tu sois bien dans ta peau !
Mais pourquoi disait-elle cela ? De la part de ce qu’elle était supposée
être, ça n’avait aucun sens !
– T’inquiète pas pour moi !
– Tu veux qu’on marche un peu ensemble ? Je connais un petit chemin qui
débouche sur une petite source, c’est hyper sympa. Tu viens Béatrice ?
Et les voilà parties. Elles marchèrent l’une derrière l’autre sans se
parler. Béa se préparait. Ça ne se passait pas du tout comme elle l’avait
imaginé. Ce serait un combat, un combat de mots, de phrases, d’arguments…
et elle pouvait perdre… l’idée venait seulement de l’effleurer. Mais la
situation l’excitait. Elle voulait vivre cet affrontement…
Elles se désaltérèrent en arrivant à la source qui dégringolait d’une roche
d’environ deux mètres de haut. L’eau était délicieuse, très légèrement
pétillante.
– Tu as vu ? C’est super ! Dès fois, je viens prendre une douche ici ! Ça te
dit ?
– C’est pas spécialement chaud ! Objecta Béa.
– Faut le faire juste quelques instants, ça revigore ! Alors ? On le fait ?
– Je… C’est à dire… Il aurait fallu un maillot de bain… ou… je ne
sais pas…
Béatrice avait vraiment conscience d’être en ce moment un peu ridicule.
– Ah ! C’est vrai, vous les terriens, vous avez de la « pudeur ». Ça ne sert
pas à grand-chose ce truc-là, sinon à se compliquer la vie !
Que dire ? Et l’autre qui attaquait dans les pires conditions. Aïe ! Aïe !
Aïe ! Putain ! Ne pas lui laisser l’initiative à cette garce, lui laisser le
minimum de marge. Et si cette stratégie passait par le fait de devoir se
mettre à poil sous une source glacée à 3000 mètres d’altitude, après tout
pourquoi pas ?
– D’accord on le fait !
Les deux femmes se déshabillèrent ensemble. Béatrice ne manqua pas de
remarquer le regard appuyé de Siem sur son corps, mais elle laissa faire,
c’était de bonne guerre. Siem était comme on dit bien balancée, avec des
seins un peu lourds, aux aréoles larges et brunes. L’assistante de Martinov
eu soudain envie de toucher la peau de la « Vénusienne » Leur regard se
croisèrent. Béatrice ne comprenait plus rien, ou plutôt comprenait de trop.
Le sourire de Siem devenait de plus en plus explicite et elle approcha sa
main du bras de Béa et le caressa.
– Tu as la peau douce !
– Oui, je sais, c’est une spécialité terrienne, répondit Béa émergeant
l’espace d’un instant de cet état semi-second.
C’était donc ça sa tactique à « l’embrigadée » ! La séduire sexuellement !
C’était trop drôle ! Et qu’est ce qui lui permettait de penser qu’elle
serait sensible à l’appât ? D’abord, les femmes attirées par les autres
femmes ne sont pas si nombreuses que ça ! Mais c’était vrai aussi que cette
créature ne la laissait pas indifférente ! Contre-attaquer ! Vite ! Et comme
aux échecs, jouer le coup qui nous fait mal, celui qu’on n’a vraiment pas
envie de faire, mais que l’on est obligé d’accomplir… pour gagner…
Béatrice se pinça alors les lèvres et très calmement lança sa réplique
assassine :
– Et bien sûr, vous êtes toutes gouines, sur Vénus ?
Touchée !
Instantanément Siem retira ses mains, elle rougit un tout petit peu, mais se
reprit avec une maîtrise de soi assez remarquable.
– Non ! On n’est pas toutes gouines ! Mais on n’est pas non plus envahies
par les tabous !
Béatrice ne répondit pas. L’autre enfonça le clou !
– Et maintenant je vais te dire quelque chose ! J’aurais beaucoup de plaisir
à remettre mes mains d’où je viens de les retirer. Mais tu peux me demander
de ne pas le faire !
Trop forte ! Elle était trop forte ! C’est maintenant qu’il fallait jouer un
autre gros coup ! Répondre « non » ! Ou alors tergiverser ! Facile à dire
quand le trouble pénètre à ce point qu’une humidité suspecte commençait à
pointer à un endroit sexuellement stratégique !
Siem reprit sa caresse. Elle sortait renforcée du coup joué par sa rivale.
Elle rejoua de son sourire. Elle avait à présent plusieurs façons d’assurer
sa probable victoire. Mais il serait si bon de « faire venir » Béatrice, afin
de ne pas lui laisser l’impression même suggérée qu’elle aurait été forcée !
– Tu vois, je ne profite pas de la situation ! Lui dit-elle.
– Oui !
– Tu ne dis plus grand chose !
– Je suis dans un drôle d’état !
– Ce n’est pas seulement de ma faute !
– Je sais bien !
Et puis tout alla très vite… Siem fixa à nouveau Béatrice en se passant la
langue sur les lèvres. Les bouches se rapprochèrent, les corps s’abordèrent.
Les mains caressèrent les peaux. Les langues se combattirent. Les corps
roulèrent dans la nature dans un grand élan de tendresse. Le baiser fut
long, très long, interminable. Puis les visages allèrent à la rencontre des
chairs. Qui un sein, qui une cuisse, qui un pied, qui un ventre et bien sûr
qui un sexe ! Jusqu’à ce que le bruit de leur orgasme couvre celui du
jaillissement de la source !
se tenaient par la main. Béatrice redoutait le moment ou Siem se mettrait à
parler. Elle allait à coup sûr lui proposer un contact avec sa secte. Il lui
faudrait répondre sèchement. Cela signifiait aussi qu’il lui faudrait éviter
de fréquenter ce secteur pour tout le reste de ses vacances !
Elle était venue sortir une pauvre nana de sa secte d’allumés et elle allait
rentrer en se l’étant envoyé en l’air ! Morte de rire !
– Bon on la prend cette douche ?
Elles la prirent, l’eau n’était pas si froide que ça, elles s’amusaient à
s’éclabousser d’abord, puis à caresser leur corps mouillé. Le froid et
l’écoulement de la source réveillèrent quelques envies bien naturelles. Siem
se mit à pisser d’abondance.
– Attention, recule-toi sinon, je vais te pisser dessus, prévint-elle.
– Ça ne me dérange pas, c’est rigolo. Répondit Béatrice en se baissant à la
hauteur du pubis de sa camarade de jeu.
– Alors tiens ! Fit l’autre en lui aspergeant le torse.
– Plus haut !
– Sur le visage ?
– Oui, vas-y !
– T’es une sacrée, cochonne toi, commenta Siem en constatant que Béa ne
rechignait pas à avaler quelque gouttes du liquide doré.
La « vénusienne » s’écarta promptement de la source en entrainant la jeune
chimiste.
– Viens me nettoyer, puisque tu aimes la pisse !
Béatrice ne se le fit pas dire deux fois et collant sa bouche contre la
chatte offerte, entreprit de la nettoyer de ce qui restait de son urine. Ce
qui fut fait rapidement, mais appliquant le principe « J’y suis, j’y reste »,
elle entreprit de lécher intégralement pour la seconde fois ce sexe qui la
narguait d’où s’écoula bientôt un tout autre liquide.
– Attends, je vais me mettre mieux.
Siem s’assit alors dans l’herbe, les cuisses écartées et relevées, elle se
tortillait le bout des seins pendant que Béatrice la conduisait de nouveau
vers l’orgasme.
Après quelques instants de répit, Béatrice manifesta à son tour son besoin
d’uriner et en prévint sa camarade.
– Fait dans l’herbe, je vais te regarder !
Elle s’accroupit à quelques centimètres de Siem et ouvrit les vannes.
La « vénusienne » regardait, médusée. Elle avança sa main et la plaça un
moment sous le jet d’urine, puis timidement, alors que Béa en finissait,
elle porta un doigt à sa bouche.
– Hum, c’est pas mauvais, la prochaine fois, j’en boirais un peu.
– Tu sais qu’on appelle ça du champagne ?
– Du champagne ? Tiens comme c’est curieux !
– Tu veux me nettoyer, faire comme je t’ai fais
– Non, je ne suis pas prête, la prochaine fois, je te dis… s’il y a une
prochaine fois.
Elles se rhabillèrent, puis descendirent ensemble en silence jusqu’au petit
chemin qui menait à l’entrée du « Mont de Vénus ». Ce fût comme prévu, Siem
qui parla alors la première :
– Voilà ! Je n’aurais peut-être pas dû aller aussi loin avec toi, Béa. Tu es
une sentimentale ! On a passé un super moment ensemble ! Ce truc là on s’en
rappellera jusqu’à la fin de nos jours ! Peut-être qu’on se reverra ?
Peut-être qu’on se reverra pas ? La vie est drôle parfois ! Mais ne nous
promettons rien… Et puis on ne sait jamais… tes vacances ne sont pas
finies… Bisous Béatrice ?
Les deux femmes s’embrassèrent !
Béa était abasourdie ! Etait-ce là l’attitude d’un membre militant d’une
secte ? Assurément non ! Ou alors le piège était lointain, à retardement !
Peut-être que sa stratégie consistait à présenter justement les membres de
la secte sous un jour favorable dans un premier temps, pour mieux ensuite
faire fonctionner les appâts ?
– Alors Béa ? Demanda le professeur
– Béa, elle s’est plantée ! Répondit cette dernière. Je ne réessaye plus,
c’est trop dangereux !
– Tu vois, je te le disais ! Tu as perdu ton temps alors ?
– Non pas du tout !
– Je ne comprends pas bien !
– Je t’expliquerais, mais pas maintenant, je suis crevée ! Et toi ton
bricolage ?
– C’est quasiment prêt, il reste juste quelques réglages. D’ici une heure
ils n’auront plus ni radio, ni télé, ni téléphone, même les portables vont
déconner !
– Oui, et qu’est-ce qu’ils vont faire ?
– Le gourou va se trouver devant un problème et les gens de la secte vont
s’apercevoir qu’il ne sait pas faire face, et son autorité va être entamée !
– Si les choses pouvaient être aussi simples !
– Je sais bien ! Mais bof ! On a bien le droit de s’amuser ! Des Vénusiens !
Des Vénusiens ! Je t’en foutrais, moi des Vénusiens !
– Oui ! Moi aussi !
– Pardon ?
– Ou plutôt des Vénusiennes !
– Mais qu’est-ce que tu racontes ?
– Fais pas attention !
Le lendemain vers 10 h du matin.
Martinov bouquine, Béatrice s’applique à se vernir les ongles de ses doigts
de pieds.
– On a frappé non ?
Le professeur ouvrit la porte !
– Siem ! S’écria Béatrice qui venait de reconnaître cette dernière dans
l’entrebâillement de la porte.
– Heuh ! Désolé de vous déranger ! Bonjour toi ma puce ! Ça vous amuse de
foutre le bordel dans nos lignes ?
– Je ne vois pas de quoi vous parlez ! Répondit Martinov.
– Ecoutez ! Arrêtez ! On vous a vu bricoler du matos sur votre toit, ça ne
peut être que vous ! Depuis tout à l’heure on n’a plus d’internet, plus de
télé, plus de téléphones ! Alors je vous écoute ! Qu’est-ce qu’il faut que
nous fassions pour que vous nous remettiez tout cela en ordre ? Je ne vais
tout de même pas vous envoyer des « gros bras » surtout après ce que j’ai fait
avec votre copine !
Le professeur était devenu blanc comme un morceau de calcaire et soudain
conscient des risques encourus choisit une solution qui à défaut d’être très
courageuse s’avérait néanmoins raisonnable.
– Ne nous énervons pas, je faisais des tests. Mais rassurez-vous, je n’ai
qu’un truc à débrancher, j’en ai pour une seconde !
– Ben voilà, et vous essayiez de faire quoi au juste ?
– Oh ! C’est très compliqué, j’expérimente un truc, je suis désolé, je
n’imaginais pas qu’il y aurait des effets secondaires chez vous.
– Vous n’allez pas recommencer, j’espère ?
– Euh, non, enfin pas ici…
– Alors n’en parlons plus, mais ça devient de plus en plus compliqué de
faire du tournage à la montagne de nos jours !
– Du tournage ?
– Ben, oui du tournage, on tourne un film !
– Un film ?
– Oui ! Vous n’allez pas me dire que vous pensiez réellement que nous étions
des Vénusiens, non ?
– Certes non, mais alors pourquoi cette comédie ?
– Quand nous sommes arrivés au bourg et que nous avons centralisé le matériel avant de le monter, les gens sont venus nous voir et nous ont posé plein de questions. Histoire d’avoir la paix, on leur a répondu « Chut nous sommes des Vénusiens ». C’était juste une boutade et puis c’est devenu un jeu… Le tournage a pris du retard, il restait juste une petite équipe sur place en attendant que ça reprenne. Pendant ce temps-là la rumeur publique a fonctionné à fond, mais faut dire qu’on s’est amusé à l’entretenir…
– Alors tu peux me dire ton vrai nom ? Demanda Béatrice.
– Bien sûr ma puce, je suis Vera Pacheco, actrice et productrice de cinéma,
répondit-elle en proposant sa carte.
– Oh ! Madame Pacheco, oserais-je vous proposer afin de me faire pardonner
mes bévues de vous offrir un verre ?
– Mais bien volontiers, Monsieur le Professeur, répondit-elle, trinquer avec
deux personnages aussi hors du commun ne peut être que le prélude à des
échanges des plus intéressants !
– Du champagne peut-être ? Suggéra Béatrice.
– Du champagne, nous n’en avons pas… commença Martinov
– Mais si !
Et alors que le professeur restait interloqué, Béatrice et Vera partirent
dans un long fou rire!
FIN
© Maud-Anne Amaro – Ibiza – août 2001/mai 2011.
Première publication sur Vassilia, le 02/09/2001
Cette histoire a été révisée et restituée dans son esprit d’origine, la
partie uro, censurée par un site aujourd’hui disparu a été réécrite
Un peu léger, non ?
Après le délire du « lapin dur » et avant le l’affaire sulfureuse de la « Maison de Cendrillon » il y a eu ce récit, moins intense, plus anecdotique, qui mériterait une réécriture. Cela dit ça n’a rien de désagréable.
Assez d’accord avec les commentaires de collègues, mais ce n’est pas pour cela qu’il faut bouder notre plaisir 😉
Pourrais-je me permettre de suggérer à l’auteur de la réécrire en plus longue, parce que le pitch n’est pas mal 😉
Je suis assez d’accord avec Muller, c’est sans doute le moins bon des « Martinov et Béatrice », mais il n’est pas du tout désagréable à lire pour autant et puis l’idée est aussi farfelue que plaisante.
Cette deuxième aventure du professeur Martinov ne renouvelle pas le délire du premier épisode. Et puis quand on sait les petits chef d’œuvres que Maud-Anne nous a concocté après, on est forcement en mode mineur. cela n’empêche pas ce récit d’être à la fois bien écrit, amusant et excitant