Les Lapins par Jeanette

L e s L a p i n s

Il n’est pas un peu gonflé, Eddy ! Organiser un concours avec un sujet
pareil : > Et en faire une histoire érotique, en plus !
Ce qui suit est pure fiction. Toute ressemblance avec des individus vivants
ou morts est purement accidentelle, et totalement indépendante de la volonté
de l’auteur, et blablabla, et blablabla…
Cela dit, je remercie tous mes copains et copines, qui m’ont gentiment
permis d’utiliser leurs prénoms.

Soyez patients. L’érotisme ne viendra qu’à la fin…

Il en a vraiment plein le cul de faire la file, Jérôme. Déjà qu’il en a
marre, de cette putain de charrette avec une roue bloquée et une autre qui
grince. Ça n’a pas été de la tarte, de pousser cette ferraille à travers le
supermarché. Il ne vient pas ici souvent, seulement quand Sophie le
bigophone au boulot parce qu’elle a oublié quelque chose. Mais n’empêche, il
y a ses habitudes : Il s’empoigne un petit panier rouge, et en une deux
trois il rafle au passage la commande de Sophie et se dirige vers la caisse
express et vers Gwladys et ses merveilleux nichons. Les miches de Gwladys,
c’est son rayon de soleil, à Jérôme.

Ca a démarré, il y a quelques mois. Il attendait patiemment son tour,
retournant un problème dans sa tête, quand il réalisa qu’il matait sans
vergogne la naissance d’un magnifique nichon. Le vieux Jérôme d’il y a 5
ans, le loubard, l’agitateur professionnel se réveilla soudain :

– Vous êtes très jolie, mademoiselle. C’est quoi votre petit nom ?

– Gwladys.

Elle a dit ça avec un grand sourire, un faux accent anglais, et une voix qui
ferait bander le pape. Il n’est pas con, le Jérôme, il a tout de suite
compris. Il a aussi fait l’inventaire : de beaux nichons, quoique pas très
fermes, une petite jupe trop courte et trop serrée, le ventre qui boudine un
peu, dix kilos de trop, et un petit petit petit cerveau minuscule. Il y a
cinq ans, il l’aurait attendue à la sortie, et il aurait scoré, mais ce jour
là… Il se contenta de savourer le moment et de bander mollement.

Mais bon, aujourd’hui, c’est bien différent. Gwladys est à l’autre bout de
la rangée de caisses, cette foutue charrette déborde, la caissière est
horrible et plate comme une planche, et ça traîne, et ça traîne.

Soudain, on le tire par la manche. Une dame très BCBG habillée d’un tailleur
strict.

– J’ouvre la caisse d’à côté, Monsieur.

Effaré de son bonheur, Jérôme pousse sa ferraille et commence à décharger.
La dame met un signe « fermé ». Les autres clients se dispersent en maugréant.

La dame scanne les articles a toute vitesse, puis ralentit, et lui demande à
voix basse :

– Vous avez une grosse ?

– Pardon, Madame ?

– Eh merde, je parle français, quand même ! VOUS AVEZ UNE GROSSE ? Une
grosse bite, une grosse biroute, vous êtes bien monté, quoi ?

– Madame, je…

– Madame je ! Et il est con, en plus !

Sans se préoccuper de l’entourage, la dame bascule la séparation,
s’agenouille devant lui, et descend sa tirette. La queue de Jérôme, qui ne
partage pas les doutes de son propriétaire, jaillit à la verticale.

– Wouaaah ! Pas mal ! J’ai vu mieux, mais pas souvent ! Elle est très sympa,
ta queue !

Jérôme réalise avec effarement qu’elle défait sa ceinture, et lui descend le
pantalon et le caleçon. Il se retrouve debout, les jambes nues, la queue
dressée, avec cette dame agenouillée qui lui caresse délicatement la hampe
et soupèse ses boules. Etrangement, ça n’a l’air d’étonner personne. Les
autres clients ne semblent pas les voir. Le regard d’une caissière est posé
sur eux sans le moindre intérêt, comme s’ils étaient transparents.

– Tu vas m’en dire des nouvelles, mon cochon !

Apres l’avoir décalotté avec art et lenteur, et sans perdre un atome de sa
distinction, la dame enrobe le gland de Jérôme d’une salive visqueuse. Ses
doigts glissent le long de la hampe avec une légèreté éthérée. Les longs
ongles de l’autre main semblent s’insinuer à l’intérieur des testicules. Une
langue pointue commence à taquiner le gland, puis elle se l’enfourne et
commence à téter vigoureusement.

– Dis-le-moi quand ça vient, mon chéri, je veux te voir gicler !

Assailli de sensations, Jérôme se balance d’une jambe sur l’autre, et ne
peut s’empêcher de gémir. Abandonnant les testicules, la dame défait
fébrilement les boutons de sa veste, qui disparaît comme par enchantement
pour laisser la place à deux énormes nichons un peu pendants, les nichons de
Gwladys. Tout en continuant à sucer, elle le regarde droit dans les yeux.
Avec stupéfaction, Jérôme reconnaît le visage de Sophie, ses grands yeux
verts, son petit nez mutin. Elle s’arrête de sucer, et le branle
vigoureusement.

– Viens, mon chéri, lâche-toi, fous-moi en plein partout.

Affolé par cette femelle polymorphe, Jérôme éjacule à longs jets sur son
visage et ses seins. La créature recueille du sperme dans sa paume, et masse
son gland, déclenchant des sensations incroyables.

– AAAAAAAHHHH ! AAAAAAAAAAAAAAAAAAHHHHHH !

– Jérôme ! JEROME ! Réveille-toi ! Qu’est ce qui t’arrive, mon vieux ?

Baigné de sueur, le sexe toujours bandé, Jérôme se découvre affalé sur sa
chaise de bureau, alors que son copain Robert le secoue par l’épaule.

– Tu as fait un cauchemar ?

– Oui, Euh, Non, pas exactement… Un drôle de rêve…

Le regard de Robert se pose alors sur la bosse qui orne son entrejambe.

– Ah, je vois, un drôle de rêve… Ecoute, Jérôme, combien de temps
penses-tu que tu vas durer, à travailler seize heures par jour et à dormir
quatre heures par nuit ? Ça commence à m’emmerder sérieusement de bosser
avec un zombie ! Et Sophie, ça lui plait d’avoir épousé un fantôme ?

– Oh, Sophie… Elle travaille tout autant que moi. Un médecin dans sa
dernière année d’internat, ça ne rigole pas tous les jours… Et elle part
ce soir pour un stage de trois mois à Londres…

– Alors, mon vieux ! Pourquoi ne prends tu pas quelques jours de repos ? Tu
sais que je suis en vacances toute la semaine prochaine. Les algorithmes de
la base de données ne sont pas terminés. Il n’y a donc pas grand chose que
tu puisses faire. Laisse tomber, détends-toi !

– Mais justement, je pensais qu’en ton absence, j’aurais pu me mettre à
coder un peu, et…

– CODER ? Pas de ça, Jérôme ! Tu touches à mon code, tu meurs ! Est-ce que
je m’immisce dans ta biologie, moi ? Les génomes, c’est ton truc. La
programmation, c’est le mien. Chacun pour soi et les brebis seront bien
gardées. Non ! Décroche ! Prend l’air. Visite ta famille. Retourne à tes
racines.

Jérôme n’est pas convaincu, mais il en a tellement marre qu’il n’insiste
pas. Il sait que lorsque Robert a une idée dans la tête, il ne l’a pas dans
le cul. Et finalement, il en a vraiment ras-le-bol, de tout, de tout le
monde en général et de lui-même en particulier.

– Tu as raison, Robert, viens, on se barre.

Les deux copains marchent dans le parking. Jérôme s’arrête à sa voiture, que
Robert contemple avec intérêt.

– Ben mon cochon, tu ne t’emmerdes pas ! BMW 745 ! Tu te souviens de ta
vieille R4 pourrie ?

– Ouais. Et toi, tu te souviens de la fois ou tu discutais avec le pompiste
pour le distraire pendant que je me barrais sans payer ?

– Merde ! C’était le bon temps ! Fauchés comme les blés, et heureux comme
des cons. Mais tu vois, Jérôme, moi je suis toujours un petit con heureux,
mais avec du fric en plus. Je vais me passer une semaine merveilleuse avec
Nadine à faire l’amour au soleil sur les plages d’une île grecque.
Réveille-toi. Réveille Sophie, et faites en autant. On va prendre un pot ?

– J’aimerais bien, mais l’avion de Sophie décolle dans deux heures. Embrasse
Nadine pour moi.

– Et toi Sophie. Salut, mec. Et pense à ce que t’ai dit, connard !

Jérôme ouvre la portière, mais Robert le rappelle :

– Jérôme, va passer une semaine chez ton oncle et ta tante ! Je suis sérieux
!

– OK. Oui Chef ! Bien, Chef ! Barre-toi en Grèce, taré !

Le lendemain…

Jérôme s’éveille seul dans le grand lit. Les choses lui reviennent
lentement. Le délire du supermarché. Les conseils de Robert. Le départ de
Sophie. Le petit bar à Orly où il s’est enfilé trop de bières. Puis il
retourne en arrière…

L’université, où il n’a pas foutu grand chose, mais étrangement, il n’a
jamais eu besoin de travailler beaucoup pour obtenir son doctorat en
biologie. Son premier job, qu’il a détesté, dans une grosse entreprise
pharmaceutique. Sa rencontre avec Sophie, aussi fauchée que lui, qui
commençait des études de médecine. Le coup de foudre, l’amour fou et
désordonné, l’exultation des corps.

Et les conneries ! Les conneries ! Robert l’a bien aidé, dans ce domaine.
Drôle de mec, ce Robert. Vendeur d’encyclopédies de son état, tirant le
diable par la queue, il vivait un amour dément avec la petite Nadine. Sans
aucun diplôme, mais passionné d’informatique, le Robert, un autodidacte
total. Et quand Jérôme, allergique à la hiérarchie et au respect des
supérieurs s’est fait foutre à la porte, il a complètement déconné. Sans un
sou, il a créé sa propre compagnie de recherche biologique. Mais de nos
jours, la complexité de ce sujet est telle que la recherche est impossible
sans une base de données bien organisée. Donc, connerie suprême, il s’est
associé avec Robert. Les deux mecs faisant la chasse aux contrats, Sophie
poursuivant ses études, il ne restait que la petite Nadine, qui bossait
comme femme d’ouvrage, pour apporter un peu de blé dans ce groupe débile.

Puis un jour, le miracle. Bien sûr, la façade n’était pas mal : les cartes
de visites (impayées) le papier à en-tête (impayé), tout ça foutait bien. Si
bien qu’une grosse entreprise Californienne leur a offert un contrat. Le
montant : un million de dollars. L’avance : cent mille. Assez pour payer les
dettes et s’équiper. Puis il s’est avéré que et Robert, et Jérôme, ils
étaient des génies dans leur branche, et après ce contrat, il y en eut
d’autres. Le succès, quoi. Elle ne fait plus les ménages, Nadine. Elle
écrit.

Bon, ben il est temps de se secouer. Après avoir pris une douche et jeté
pêle-mêle quelques vêtements dans une valise, il décroche le téléphone :

– Allô, Jeanette ? … Oui, c’est moi. … Pas mal, et vous deux ? … Non,
Sophie est en Angleterre pour trois mois, un stage… Dis, ça ne dérange pas
si je viens passer une semaine à la ferme ? … Mais non, je ne rigole pas !
… Je démarre, donne-moi deux heures… Mais oui, mais oui, tu le sais
bien, qu’on m’appelle prudent ! Allez, à plus !

Une fois passée la chierie du périphérique, le pied de Jérôme se fait plus
lourd sur le champignon, et le paysage défile. Trois cents bornes, le temps
de penser un peu. La ferme, où il a passé son adolescence. La tante
Jeanette, l’oncle Nicolas. Ils l’ont élevé après l’accident. Une bien
curieuse relation avec un bien étrange couple. Pas du tout typique des
paysans de la France profonde, ces deux là ! Ça n’a jamais été mon oncle et
ma tante, seulement Niko et Jeanette. Sans aucune raison, il se rappelle
soudain de sa première fois avec Jocelyne, la fille de ferme, dans la
grange. Première fois suivie de nombreuses autres. Un jour qu’ils étaient en
pleine action, la petite porte de derrière claqua violemment, et la Jocelyne
de s’affoler et de s’encourir. Il ne sut jamais qui les avait surpris, nul
n’en fit jamais mention… Mais le même soir, il trouva ce paquet de capotes
sous son oreiller…

La ferme est en vue. Il laisse la voiture sur la route, et se faufile le
long des murs de la grande cour, jusqu’à la fenêtre de la cuisine. Elle n’a
pas changé, la Jeanette. Toujours ses affreuses lunettes d’écaille brunes,
ses cheveux courts un peu ébouriffés, et sa poitrine opulente. Elle est en
train d’éplucher des légumes.

– SURPRISE ! ! !

– Jérôme ! Mon gamin !

Ca ne lui fait pas drôle, à Jérôme, de s’entendre appeler ainsi par cette
femme qui a à peine dix ans de plus que lui. Ils se serrent dans les bras
l’un de l’autre.

– Une bière bien fraîche ?

– Ce n’est pas de refus ! Et qu’est ce qu’on croûte ce soir ?

– Lapins panés. Deux.

– Wouah ! Ben c’est Niko qui va être content. A propos, où est-il ?

– Il est parti au petit matin réparer la clôture du pré du haut. Il n’est
même pas au courant de ta visite.

– Toujours le même. Toujours en train de bosser. Et ça va, sa jambe ?

– Ben à dire vrai, pas très. Il a vieilli pas mal, ton oncle. Il a quand
même 54 ans. Et puis la ferme, ça ne va pas fort. Mais tu le connais, il
n’est jamais à court d’idées. Il veut se lancer dans l’élevage industriel du
lapin, maintenant.

– Des lapins ? On aura tout vu !

– Oh, ce n’est pas une idée plus bête qu’une autre. Il s’est acheté un tas
de bouquins, et quelques couples de reproducteurs, mais il n’a pas l’air
très content des résultats. A propos, je l’ai convaincu de m’emmener au
théâtre, ce soir. Tu nous accompagnes ?

– Allons, Jeanette, tu sais que J’EXPIRE et moi… Non, je garderai la
ferme.

Une pétarade se fait entendre, alors qu’un vieux camion brinquebalant fait
son entrée dans la cour. En descend un géant à la moustache fournie. Il se
dirige vers la cuisine en boitant légèrement. Jérôme saisit son verre et se
cache dans la pièce d’à côté.

– Bonsoir, la puce, tu as des visiteurs ?

– Bonsoir, puceau, non pourquoi ?

– Ben il y a une voiture garée sur la route… Une de ces tires qui vaut
plus cher que la ferme. Sûrement un parisien niais qui est tombé en panne
d’essence.

Jérôme fait son entrée, et les deux mâles se fichent de grandes claques dans
le dos.

La soirée…

Après un souper délicieux et bien arrosé, Niko et Jeanette disparurent un
moment, il faut bien s’habiller pour le théâtre. Puis il fut entendu que
dans cet appareil, la BMW conviendrait mieux que le camion. Un peu emprunté
dans son beau costume, Niko déclara qu’il allait « jeter un coup d’œil », et
s’en fût. Répondant au regard interrogatif de Jérôme, Jeanette dit
simplement : « ses lapins ». Niko ne fut pas long, mais quand il revint, il
avait l’air bien embêté.

– C’est vraiment la merde, je pense que Maurice sera en état dans un peu
plus d’une heure…

– Ah non, Niko ! Tu ne vas pas me faire ça ! Qu’il se branle, Maurice !

– Excusez un parisien niais, mais c’est qui, Maurice ?

– Maurice, c’est son étalon, le roi des lapins reproducteurs, et Niko pense
que cet animal exceptionnel sera en état de bander et de remplir son devoir
conjugal dans une heure !

– Bon, ben grand bien lui fasse. Mais quel est le problème ?

– Ah, parce que tu crois que c’est facile ? Il faut les aider, ces bestioles
!

– Eh bien, peut être qu’un parisien pourrait aider Maurice ? Si on lui
explique, bien sûr !

Jérôme suivit Niko dans la partie de la grange réservée aux lapins, et se
trouva face à une vingtaine de cages individuelles, chacune contenant un
énorme lapin, chacune pourvue d’une étiquette indiquant le prénom de
l’animal.

– Bon, voici Maurice, et voilà Antoinette. Tu prends Maurice par la peau du
cou, tu le déposes sur le dos d’Antoinette, c’est tout. Quand il a fini, tu
le remets dans sa cage.

– On en apprend tous les jours ! Dis, comment tu reconnais les mâles des
femelles ? ça n’a pas l’air évident…

– Comme tu dis, ce n’est pas évident. Prenons Maurice, par exemple :

Niko saisit Maurice par la peau du cou, et le retourne sur le dos, à la
grande indignation de l’animal qui rue à qui mieux mieux. Niko farfouille
entre ses cuisses, et dévoile un petit pénis rose de trois ou quatre
millimètres de long.

– Ben mon vieux, il a une toute petite, Maurice ! C’est ça ton étalon ?

– Tu n’y connais rien ! Pour un lapin, il serait plutôt bien monté. Fais
comme je t’ai expliqué, je pense qu’il sera en état vers 22 h 30.

Après leur départ, Jérôme alluma la TV, mais ce n’était vraiment pas la
joie. Il se mit donc à errer dans la maison, redécouvrant les chambres. Puis
la grande pendule sonna six fois. 22 h 30. Le moment pour Maurice de tirer
son coup.

La grange. Il saisit Maurice par la peau du cou, et le dépose délicatement
sur le dos d’Antoinette, qui n’a pas l’air contraire. Pris d’une soudaine
frénésie, Maurice mord Antoinette dans le cou, et ses hanches commencent à
s’agiter. Mais, après cinq ou six coups, il glisse et tombe sur le flanc.
« Et merde », pense Jérôme. Il reprend donc l’étalon, le remet en place, et
l’agitation recommence, mais après quatre coups de reins, Maurice
s’effondre. Cent fois sur le métier… Jérôme répète la séquence une dizaine
de fois, sans que le pauvre Maurice parvienne à se maintenir en place. Et
maintenant, il ne s’agite même plus. Antoinette, par contre, semble pleine
de bonne volonté, et attend patiemment ses hommages. Jérôme remet dans sa
cage un Maurice complètement amorphe.

Tard dans la nuit, un Niko et une Jeanette qui on l’air en pleine forme font
leur réapparition.

– (Elle) Ouah ! Qu’est ce qu’elle tire, ta cage !

– (Lui) Et comment ça s’est passé avec Maurice ?

– Euh… Pas très bien…

– Antoinette a fait des problèmes ?

– Non, pas du tout, mais Maurice… Tu parles d’un étalon ! Trois petits
coups et puis s’en vont !

– Qu’est ce que tu veux dire ? Explique !

– Bon, ben je le mets en position, le Maurice, il donne six coups de reins,
puis il s’effondre. Je le remets, quatre coups, et il tombe encore. Plus de
dix fois, je l’ai remis en place !

– Mais tu es fou ! Tu vas me le tuer ! C’est tout à fait normal, c’est ainsi
que ça se passe chez les lapins !

Le lendemain, Jérôme qui erre dans la ferme entre dans la grange ou Niko
s’occupe des lapins.

– Salut Niko ! Ça marche, tes bestioles ?

– Bof, pas très. Je dirais même pas du tout. Je commence à désespérer.

– Quel est le problème ?

– LES problèmes. Ils sont multiples. Tiens, viens voir Antoinette. Bon,
caresse-lui la croupe. Tu sens ?

– Oui, elle a comme quelque chose de collé dans les poils…

– Le sperme de Maurice. Ce connard n’a pas trouvé le trou ! Ça arrive
souvent. Et puis si la femelle n’est pas de bonne composition, et ça leur
arrive rarement, pas moyen. Et ces mâles, ils ne sont disposés que quelques
heures par semaine. Tout ça n’est pas évident.

– Tu pourrais peut être installer une TV et leur jouer des films pornos ?

– Allons, Jérôme, ne rigole pas ! La situation financière n’est pas rose. En
fait, la ferme est déficitaire, et je comptais là dessus pour me renflouer.

– Ecoute, Niko, entre nous, as-tu déjà pensé à prendre ta retraite ? Tu
auras bientôt 55 ans, non ?

– La retraite ? Si j’étais riche, je ne dis pas. Mais dans l’état actuel des
choses, tout ce que je pourrais faire c’est vendre la ferme, et ça me
donnerait assez pour vivoter 10 ans dans une tour pouilleuse. Non merci !

– Mais enfin, Niko, je nage dans le fric, tu le sais ! Et je te dois
tellement !

– Ah non, tu ne vas pas commencer, toi aussi ! Déjà que la Jeanette me fait
chier avec ses idées de retourner dans l’informatique…

– Ben quoi, tu veux l’en empêcher ?

– Mais non. Bien sûr que non. Mais il y a dix ans qu’elle a quitté. Et dix
ans dans ce boulot là, c’est dix siècles, tu le sais. Et puis merde, j’en
suis seulement au début. J’arriverai bien à les faire baiser comme des…
lapins, ces sales bêtes !

Dix jours plus tard, au laboratoire, en fin de journée…

Un Robert outrageusement bronzé s’arrête devant le bureau de Jérôme.

– On voit la différence ! J’avais bien raison de t’envoyer à la ferme ! Et
comment va ta famille ?

– Bien ! Enfin, je veux dire, ce sont toujours les deux mêmes, mais leur
situation financière n’est pas bien rose.

Et Jérôme d’expliquer la situation, les lapins, et le reste.

– Ouais. C’est bien embêtant. Il devrait s’asseoir sur sa fierté, le Niko,
mais bien sûr, le connaissant…

– Comme tu dis ! Mais j’ai pensé à une solution possible. Dis-moi, à ton
avis, quels sont les animaux dont les génomes sont les mieux documentés ?

– Curieuse question ! Bon, je dirais les rats, bien sûr. Ils ont été
utilisés comme sujets d’expériences pour plus d’un siècle. Ensuite… Eh
merde OUI ! LES LAPINS !

– Bon ! Nous avons l’information, nous avons l’équipement. A nous de créer
une race de super lapins ! A toi d’identifier les gènes favorables. A moi de
les introduire dans nos sujets.

– Super ! J’ai quelques idées, mais partageons nos opinions. Que
recherchons-nous ?

– Oh, un tas de trucs. La viande se vend au poids, donc nous voulons des
animaux plus grands et plus lourds que la moyenne. Une période de gestation
la plus courte possible. Une bonne résistance aux maladies. Une croissance
rapide. Mais surtout, une reproduction plus aisée. Des mâles aux pénis plus
développés, et toujours prêts, et des femelles souvent en chaleur. Des
obsédés, quoi !

– EXACTEMENT ce que je pensais ! Compte sur moi !

– Bon. A chaque jour suffit sa peine. On va prendre un pot ?

– Euh non… J’ai quelque chose d’urgent à terminer. Et, vu que tu es seul,
tu pourrais me rendre un service ? Nadine m’attendra en face du BHV dans 20
minutes. Tu pourrais la reconduire ? Dis-lui de ne pas m’attendre, que j’ai
une urgence…

– Bien sûr, Mossieur Robert. Je peux même l’emmener souper, si tu veux.

– Bonne idée. Salut. Barre-toi !

Jérôme passa une bonne soirée avec Nadine qui a échangé les ménages pour la
littérature. Son premier roman vient d’être accepté par une grosse maison
d’édition, et elle est aux anges.

Le lendemain, Jérôme entre au laboratoire, et y trouve un Robert endormi sur
sa chaise.

– Debout les morts ! Eveille-toi, Blanche Neige !

– Eh merde ! Vas-y doucement ! Qu’est ce que je suis vaseux ! Ta liste est
prête.

– Ma liste ?

– La liste des gènes requis pour les super lapins. Attention ! Certains
gènes sont incompatibles, c’est indiqué dans la marge. Donc tous nos super
lapins ne seront pas identiques, il faudra essayer plusieurs combinaisons.
Je vais aller me foutre au pieu, et demain je programmerai la sélectionneuse
de gènes. Salut.

Et Robert de disparaître. Jérôme regarde avec effarement un listing de cinq
pages pleines de chiffres, et couvertes d’annotations manuelles. Ça n’a
l’air d’avoir aucun sens, mais après un moment il comprend le système. Et en
effet, certains gènes sont incompatibles. Ils ne peuvent être introduits
dans le même individu, sous peine de créer un monstre non viable. Donc il
suffit d’attendre le retour de Robert. Il programmera la sélectionneuse,
et… Et merde, pourquoi attendre ? Bien sûr, toutes les bases de données
sont codées en assembler, langage totalement incompréhensible, mais la
sélectionneuse est programmée en C++, que Jérôme a étudié… et puis c’est
un simple travail de transposition. « Il va être furieux », se dit Jérôme,
« mais tant pis ! ». Au travail !

Le même soir, un Jérôme fatigué mais satisfait contemple les dix
incubateurs. Le lendemain, Robert était bien un peu mécontent, mais ayant
tout contrôlé, il ne trouva rien à redire. Un des dix super lapins mourût le
troisième jour, mais les déchets sont inévitables dans ce genre
d’entreprise…

Trois semaines plus tard, Jérôme charge neuf cages dans une camionnette de
location et se dirige vers la ferme. Il se gare devant l’entrée de la
grange, qui a bien changé. On dirait maintenant une arène de cirque, où
déambule une vingtaine de lapins.

– Hé, Niko, tu as fait des transformations ? C’est Barnum ?

– Oui, j’applique une idée qui vient d’Argentine, plus précisément des
plaines de la Patagonie… Au lieu de garder les lapins en cage, on les
laisse se mélanger librement. Parait que ça encourage les contacts.

– Bon, je t’apporte neuf super lapins : cinq mâles, et quatre femelles. Ils
ont tous leurs noms sur leurs colliers, et j’aimerais que tu tiennes un
journal de leurs performances individuelles.

– Très bien. Introduis tes animaux un par un dans l’arène, je reste ici pour
m’assurer qu’il n’y a pas de bagarres, ça arrive parfois entre mâles…

Jérôme décharge les cages, et présente les animaux :

– Nos super mâles : André Sébastien, Chris, Eddy, Jean Sébastien, et Tom.
Nos super femelles : Angel, Léna, Nora, et Mélanie.

– C’est quoi ce lapin noir ? Je n’ai jamais vu ça ! Je ne savais même pas
que ça pouvait exister !

– La noire, c’est Nora. Tu sais, quand on manipule les gènes, il y a parfois
des conséquences inattendues…

– Bon, et tu me dis que ces bestioles sont toutes assoiffées de sexe ?

– Elle devraient l’être. En tout cas, mes mâles sont super bien montés.
Regarde-moi celui ci…

Jérôme s’empare de Chris, et le gratte un moment au-dessus de la queue. Puis
il l’empoigne par la peau du cou, dévoilant un énorme pénis violacé de dix
centimètres de long.

– Puuutin ! Ils sont tous comme ça ?

– Non, Chris est le mieux monté du groupe. Mais aucun d’entre eux ne fait
moins de cinq centimètres en érection. Et ils sont faciles à faire bander :
Il suffit de les gratter dans le dos. Un réflexe conditionné dont je ne suis
pas peu fier !

– Eh bien, que dois-je savoir de plus au sujet de ces animaux fabuleux ?

– Quelques détails, mais importants ! Tout d’abord, les super mâles sont
destinés à s’accoupler avec des femelles normales, et les super femelles
avec des mâles normaux. Tous ces « super » sont en fait frères et sœurs, et il
faut éviter les rapports consanguins. J’ai donc introduit un gène qui
interdit ce genre d’union. En principe, les « super » sont en chaleur 100% du
temps. Comme les humains, quoi ! Et nul besoin de les aider, ils sont
capables d’exécuter l’acte d’une façon tout à fait indépendante, et même
d’aider leur partenaire.

– Tu m’en diras tant ! Donc, tout ce que j’ai à faire c’est de m’asseoir, et
de regarder ?

– Même pas ! Je vais t’installer quelques caméras de télévision qui
enregistreront leur comportement. Tout ce que tu as à faire, c’est de
changer les cassettes toutes les douze heures. Mais je t’en prie, donne-moi
des détails journellement. Tiens-moi au courant du moindre problème, si
petit soit-il.

– Bon, ben, compte sur moi !

Une semaine plus tard… Jérôme et Robert échangent leurs impressions…

– (Jérôme) Il y a quelque chose qui cloche. Niko ne me rappelle pas, et
quand je lui téléphone, il me dit que tout va bien, mais qu’il faut attendre
que les animaux s’adaptent. Pas moyen d’avoir un détail.

– Je t’avais dit que je trouvais la taille du pénis de Chris des plus
anormales. Et puis Nora, ce pelage noir… Rien de tout cela n’était
programmé.

Une secrétaire entre dans le bureau.

– Monsieur Jérôme, votre tante vient de téléphoner. Elle sera ici dans
quelques minutes.

Et en effet, cinq minutes plus tard, la Jeanette fait son entrée.

– Salut les gamins ! Je me suis faite conduire par un voisin, et je vais
passer la semaine chez toi, Jérôme. Niko croit que je suis venue pour
assassiner son budget dans les magasins, mais ce n’est pas le cas. Vos
lapins, mes amis, sont un désastre total.

– (Robert) Mais enfin, Jeanette, que se passe-t-il ? Pourquoi Niko ne nous
donne-t-il aucune information ? S’il y a des problèmes, il devrait nous le
dire !

– Pourquoi ? Simplement parce que Niko a en vous une confiance totale, et il
en a conclu que s’il y avait un problème, il était de son côté. Mais
croyez-moi, il y a quelque chose qui cloche avec vos bestioles.

– (Jérôme) Détails !

Jeanette sort une farde épaisse de son sac en bandoulière, et se plante ses
affreuses lunettes sur le nez :

– Un à la fois, commençons par les mâles :
Chris : Le meilleur de la bande. Le pénis au garde à vous a toute heure du
jour et de la nuit. Mais les femelles n’en veulent pas. Absolument rien à
faire.
Eddy : Un animal vicieux ! Croyez-le ou non, il a enculé Maurice ! Et il
mange à tous les râteliers. Il pourchasse Antoinette dans tous les coins,
mais elle ne veut rien entendre.
Tom : Quel pourri, celui-là ! Il ne fait que dormir !
André Sébastien : Un malade ! Il passe sa vie à aller reluquer les femelles
une à une, spécialement par derrière, puis il s’éloigne d’un air blasé. Et
pourtant, pour lui, elles sont bien disposées !
Jean Sébastien : Un voyageur. Nous l’avons perdu plusieurs fois. On l’a
retrouvé la première fois dans un tiroir de la cuisine, la seconde fois dans
un tiroir de la chambre à coucher, au milieu de mes culottes, qui sont
maintenant pleines de crottes ! Aucun intérêt pour le sexe ! Niko l’appelle
« Monsieur Tiroir » !

Quant aux femelles, ce n’est pas mieux :
Léna : Une hystérique ! Le pauvre Maurice a essayé de la couvrir, et il
s’est fait mordre cruellement. Mais croyez le ou non, cette Léna est
lesbienne. Elle gouine les femelles sans aucune vergogne !
Angel : Elle passe sa vie à présenter son arrière train à Chris, qui ne veut
rien savoir. Je pensais que vous aviez déprogrammé l’inceste hors de vos
créations ?
Nora : La pauvre ! Personne ne veut avoir affaire à elle, sauf Léna, qui la
broute régulièrement. Mais ça n’est pas bien productif !
Et finalement, Mélanie. Elle aussi, nous l’avions perdue. On l’a retrouvée
sur le toit de la grange, un soir de pleine lune.

Jérôme et Robert se regardent d’un air accablé. Robert prend la parole :

– Je l’ai senti dès le départ, il y a quelque chose qui cloche. Mais j’ai
revérifié cent fois ma liste de gènes, elle est correcte. Et le programme de
Jérôme pour la sélectionneuse me semble normal.

– (Jeanette) Le programme de JEROME ? Je croyais que c’était toi, Robert,
qui codait tout ?

– C’est une exception, il n’a pas su attendre. Mais il s’en est vraiment
bien tiré !

– On peut voir ce truc ?

– (Jérôme) Là je me sens vexé. Ce n’est pas un « truc ». C’est un programme,
et très bien écrit, d’ailleurs ! En voilà le listing. Sans vouloir te faire
la leçon, c’est ainsi qu’on programme de nos jours !

– (Jeanette) Quel galimatias ! C’est quoi, ce langage ?

– C++, bien sûr, le standard moderne, tu t’attendais à quoi ?

– Mille excuses, pour moi, tout ce qui n’est pas de l’assembler est de la
merde. Bon. Jetons un coup d’œil à Chris, et à son pénis d’une longueur
inattendue. Je suppose que le rang du gène du « pénis de lapin de grande
dimension » est 1634 ?

– (Robert, le nez dans ses papiers) Non, c’est 1633.

– Et 1634, c’est quoi ?

– Un gène non identifié…

– Eh bien la science vient de progresser ! Veuillez noter que le 1634 est le
gène du « pénis de lapin de super grande dimension ». Jérôme, pour accéder à
l’élément numéro UN, on utilise l’index ZERO, pas UN ! Et ainsi de suite.
Tous tes gènes sont décalés d’UN dans la nomenclature.

– (Robert, qui s’arrache les cheveux) Au nom du ciel, comment ais-je pu
laisser passer une telle connerie !

– (Jérôme) Mais c’est DEBILE, ce truc ? Pourquoi utiliser 4 pour adresser 5
? C’est complètement DEMENT !

– (Jeanette) Parce que l’index est utilisé pour calculer un déplacement par
rapport au premier élément. On multiplie l’index par la longueur de
l’élément pour calculer ce déplacement. Et bien sûr, pour que ça fonctionne,
il faut utiliser zéro pour adresser le premier élément. En fait, un VRAI
programmeur ne pense jamais au PREMIER élément, mais à l’élément ZERO !

– (Robert) Restons pratiques. Quelles sont les conséquences ?

– (Jérôme) Totalement imprévisibles ! Parfois, les gènes qui se suivent ont
des effets similaires. Parfois, ils n’ont pas la moindre relation ! Nous
avons créé des monstres ! Que faire, que faire ? ? ?

– (Jeanette) Bon, on peut le corriger ce programme, c’est l’affaire de
quelques minutes. Et engendrer un groupe de super lapins CORRECTS. Mais ne
dites rien à Niko, inutile de lui faire perdre confiance. Détendez-vous !
Shit happens ! Je vais passer une bonne semaine à Paris à m’en foutre plein
la gueule, à tes frais, Jérôme ! Et pourquoi ne viendriez vous pas tous
passer le week-end à la ferme ?

Jeudi après midi… Robert montre à Jeanette le principe d’opération de leur
nouveau mainframe, pendant que Jérôme s’occupe des incubateurs. Le téléphone
sonne. C’est Niko. Jérôme le branche sur le haut-parleur.

– (Niko) Dis, Jérôme, cette proposition d’aide financière, ça tient toujours
?

– (Jérôme, tout penaud) Bien sûr, Niko ! Sans aucun problème. Tu sais, je
regrette vraiment ce fiasco.

– Fiasco ? Quel fiasco ? Non, soyons sérieux, je parle de sommes
importantes, probablement plusieurs millions. Et tu devras attendre le
remboursement pendant quelques mois.

– (Robert, la main sur le micro) La déception a été trop forte ! Il a craqué
!

– (Jérôme) Tout ce que tu veux, Niko. Et ne parlons pas de remboursement.

– Pas de remboursement ? Mais tu es bredin, gamin ! C’est ainsi que tu fais
des affaires ? Essaye de m’apporter un chèque certifié de disons… deux
millions demain, ça devrait suffire pour les débuts. Bon je vous quitte,
j’ai six cents lapines enceintes à m’occuper, sans parler du personnel à
engager, et de mon rendez-vous avec l’architecte pour la construction des
nouveaux bâtiments. A demain.

Vendredi soir. Robert, Nadine, Jérôme et Jeanette arrivent à la ferme. Un
repas pantagruélique les y attend.

– (Jeanette) C’est toi qui a préparé tout ça, puceau ?

– Non, tu n’y penses pas. Pas le temps. Je ne sais plus où donner de la
tête. J’ai commandé chez un traiteur.

– (Jérôme) Enfin, Niko, explique-toi ! Que s’est-il passé ?

– C’est une longue histoire, asseyez vous et mangez. Le problème de départ,
c’est que je n’avais pas compris la psychologie de ces animaux. Prenons
Chris, par exemple. Un étalon hors du commun, mais les femelles n’en
voulaient pas. Et Léna. Seules les autres femelles l’intéressent. J’ai donc
séparé l’arène en deux parties, une pour les mâles, une pour les femelles.
Le scénario commence toujours de la même façon. J’introduis Léna et Nora qui
se broutent en 69. ça attire l’attention de ces dames, qui peu a peu se
mêlent à la partie, et cela finit par une partouze lesbienne. Quand ces
dames sont bien excitées, j’introduis notre Chris, qui n’a alors plus aucun
problème. Il faut voir le spectacle ! Infatigable, ce Chris, un taureau, un
minotaure ! Il couvre vingt femelles en une heure ! Pire que Titus !

– (Robert) Mais quoi, et les autres mâles ?

– Là aussi, une question de psychologie. Pas trop de problèmes avec Eddy,
qui est un véritable obsédé. Je le laisse enculer un de mes mâles pour le
mettre en forme, et il me couvre une dizaine de femelles. Le Jean Sébastien,
c’était autre chose : Dieu sait pourquoi, ce mec veut habiter dans un
tiroir. Qu’a cela ne tienne, je lui ai donné son tiroir personnel dans un
coin de l’arène. Et depuis, il baise à tour de bras.

– (Jérôme) Et Tom ?

– Tom, c’est différent. J’avais observé qu’il se construisait son petit coin
à lui, rassemblant du tissu, de la paille… Cet animal a des goûts de luxe.
Je lui ai donc construit son petit palais en velours. Comment définir Tom ?
Luxe, calme, et volupté, c’est lui. Il n’en fait pas beaucoup, mais celles
qu’il fait sont bien faites !

– (Robert) Reste André Sébastien…

– Là, seul le hasard m’a fait découvrir la solution. J’avais gardé en cage
une lapine énorme, totalement obèse, avec un postérieur gigantesque. J’avais
peur que toute cette frénésie lui donne une crise cardiaque, mais bon, je me
suis dit que même les grosses ont le droit de prendre leur pied. Dès
qu’André Sébastien l’a vue, il est devenu comme fou. Tout simplement, un
amateur de lapines opulentes. Je lui en ai donc donné, des grosses !

– (Jeanette) Et les femelles ?

– Comme je vous l’ai dit, toute l’entreprise est basée sur Léna et Nora.
Angel ? Elle ne pense qu’à son frère Chris. Et Mélanie, je dirais que c’est
une jeune fille plutôt prude au caractère romantique.
Mais bon, je ne désespère pas, loin de là. De toute façon, j’ai maintenant
plus de mille femelles enceintes, et je ne vous dis pas les problèmes
d’infrastructure !

Le souper terminé, Niko déclara qu’il était crevé, et qu’il « ne la ferait
pas longue ». Jeanette montra leurs chambres aux invités, et il était à peine
onze heures, lorsque tout le monde se retira. Sans aucun artifice, Jeanette
et Niko se déshabillent, et se mettent au lit.

– Mon oreiller m’a manqué, la puce…

– Il est revenu, puceau, profites-en.

– ça te dirait de tout laisser tomber et d’aller voir le monde ?

– Oh, tu sais, au départ, c’est passionnant, exotique… Et puis un jour on
se rend compte que tous les aéroports et tous les hôtels se ressemblent.

– Il n’y a pas des places que tu aimerais voir ou revoir ?

– Oh si ! Rome par-dessus tout. Nairobi. Madagascar. St Louis. Hawaï.
Londres, que j’aime beaucoup, et Liège, ma ville. Passer six mois à chaque
endroit, ça en vaudrait la peine. Plus tout ce que je n’ai jamais vu :
Tahiti, Hong Kong, l’Europe de l’Est…

– Pas San Francisco ? I left my heart in San Francisco ?

– SFO ? Non merci ! Une ville sale et pleine de clochards, qui a quatre ou
cinq rues en pente, les seules qu’on montre dans les films… Le Bay Bridge
et le Golden Gate ou on passe des heures dans les embouteillages ! Mais San
José, oui. J’irais me balader sous le pont de la 280, entre 1st et 2nd
street. Ça sent la pisse et la merde, et c’est dangereux. Mais il y a des
souvenirs à raviver, et avec beaucoup de chance, des copines à revoir… si
elles ont survécu…
Eh, tu en parles comme si c’était fait ?

– Oh, au train où ça va, c’est la fortune en six mois. Bien sûr, il nous
faudra être prudents et éviter de saturer le marché, mais dans un an, 18
mois à tout casser, nous serons plus riches que Jérôme.

La tête sur son oreiller récupéré (le sein droit de Jeanette), Niko s’endort
du sommeil du juste, et Jeanette ne tarde pas à le suivre.

La lune se lève sur une ferme endormie. La grange projette des ombres
fantomatiques sur le terrain environnant. La lune monte et monte dans le
ciel. Elle voit tout, la lune, mais elle ne nous dit jamais rien. Le toit de
la grange brille, éclairé par la lumière froide. Et bientôt ce toit
s’affuble de petites taches mouvantes. La plupart claires, mais une noire
comme du charbon. « Qu’est ce que ça peut bien être ? » se demande George,
perché au sommet d’un chêne centenaire, donc presque aussi vieux que lui.

Qu’importe, ça a l’air comestible. Sans le moindre bruit, George le hibou
s’élance. Deux courts battements silencieux, puis ses longues ailes prennent
toute leur envergure, plumes écartées, pattes serrées contre son ventre. Il
plane, plane, puis replie ses ailes contre son corps, et se laisse tomber
comme une pierre. Au dernier moment, ses ailes s’ouvrent, ses serres se
projettent en avant, et ses griffes s’enfoncent dans la chair de cette chose
noire, qui pousse un glapissement de terreur. George bat des ailes
frénétiquement, le bord du toit est proche, la chose noire est comme
assommée, et se débat à peine. Mais soudain, un poids énorme lui tombe sur
le dos. Une chose blanche a osé l’attaquer ! George se plante la gueule sur
le toit, et lâche sa proie, alors que tout autour de lui ces choses blanches
aux yeux rouges se lancent à l’attaque. Sans doute, George fut-il sauvé par
un siècle d’expérience. D’un vol déséquilibre par les plumes manquantes, il
arriva à rejoindre son chêne.
Toujours tremblant, il frotte de sa tête son corps ensanglanté. Il sait
qu’il doit, il sait qu’il faut crier à la nuit, lancer son hululement le
plus fier, pour prouver au domaine des ombres qu’il est toujours le maître
de l’obscurité. Mais il n’en a point la force. Un pauvre « hoouuu hoouuu »
débile s’échappe de son bec. Et à peine l’a-t-il fait, qu’il voit cette
brillante lumière jaune jaillir de l’horizon. C’en est trop !
Un George au crépuscule de sa vie se cache piteusement au plus profond du
feuillage.

Elle adore ça, Jeanette, de servir d’oreiller. Bien sur, c’est
inconfortable, mais elle ne donnerait sa place pour rien au monde. Cette
pression sur son sein, ces sueurs qui se mêlent, ces odeurs si bien connues,
cette main sur sa chatte humide… elle s’était assoupie, puis il y eut
dehors comme un bruit anormal qui la réveilla, mais maintenant, tout semble
calme. Elle contemple le visage de cet homme, qui dans son sommeil laisse
transparaître un éclair de l’enfant qu’il fut-il y a longtemps… Elle rêve
éveillée, Jeanette, elle est bien…

La fenêtre laisse entrer un rayon de lune. Mais tout a coup, la lumière
change, elle devient jaune et criarde, et le crépitement d’un moteur haute
performance se fait entendre.

Jeanette dépose doucement la tête de Niko sur un (vrai) oreiller, enfile son
peignoir, et descend. Elle ouvre la porte de la cuisine, et se retrouve dans
la cour, où une Ferrari rouge vient juste de s’arrêter. En sort une jeune
femme de haute taille, à l’allure sportive.

– Bonsoir, docteur, que nous vaut l’honneur de votre visite ? Je te croyais
à Londres pour un mois de plus ?

– Londres ? Fini ! Terminé ! Plein le cul, de Londres, des moules au lait
sucré, et du saumon sauce menthe ! Plein le cul de parler avec une patate
chaude dans la bouche !

– Bon, raconte-moi tes aventures, je vais préparer une bonne cafetière.

– Bonne idée, et tu peux y rajouter ce truc que tu qualifies de
délicieusement dégueulasse.

– Du calvados ? Mais pourquoi pas ?

De sa chambre, Nadine a observé l’arrivée de Sophie. Elle eût un moment
l’intention de descendre, puis sa timidité naturelle l’emporta. Les
bavardages entre femmes, ça n’est vraiment pas son truc, à Nadine. Elle
ouvre largement les rideaux, pour laisser entrer la lumière de cette lune
splendide.
Robert a rejeté les couvertures, et est étendu sur le dos. Elle le regarde,
elle le contemple, dans tous ses détails. Il est beau, son Robert. Mais ça
n’a aucune importance. S’il était affreux, bossu, tordu, elle l’aimerait
tout autant. Elle ne se lasse pas de le regarder et prend conscience de
cette humidité qui grandit. Soudain, elle sait ce qu’elle va faire, et cette
connaissance déclenche chez elle de longs et délicieux frissons. Tout en
regardant Robert, elle s’effleure la poitrine très légèrement, taquinant,
agaçant le bout des seins. Puis elle les pince, et les sensations se
répandent, dans son dos, dans son cou, dans son ventre, et dans cette chose
affamée qui coule la tout en bas, et qui veut, qui veut !

Sans pitié pour elle-même, Nadine s’effleure le ventre du bout des doigts.
Plus bas ! Plus lent ! Elle se touche les aines, puis soudain la main droite
empoigne brutalement cette bête dégoulinante, et la masse sans pitié. Son
corps s’agite de soubresauts, ses genoux plient, plient, et elle s’effondre
sur le côté. Elle en veut plus, Nadine, mais elle se domine, ses plans sont
faits, elle n’en déviera pas.
Mais elle ne put s’empêcher de se lécher les épaules, de se caresser le
visage et les lèvres, et d’écraser sa chatte une dernière fois sur la
carpette. Dans un sursaut de volonté, elle se relève, et, aussi doucement
que ce peut, s’assied sur le lit, puis s’y couche sur le coté, la bouche
au-dessus du pénis de Robert. Elle regarde cette petite chose ridicule,
ridée, et recroquevillée, qu’elle va transformer. Elle se frotte la langue
sur les dents pour saliver au maximum, puis elle gobe ce gland calotté,
qu’elle mouille, mouille. Elle engloutit doucement cette petite chose molle
et la fait tourner lentement dans sa bouche. Le miracle s’accomplit. La tige
s’engorge et s’allonge, tandis que Robert bouge en marmonnant. La hampe a
tant grandi, qu’elle lui sort à moitié de la bouche. Nadine la saisit d’une
main, la décalotte sans douceur, et se l’enfonce dans la gorge. Et elle
pompe, elle pompe. La symbiose entre ces deux êtres est telle qu’elle
ressent les sensations qu’elle provoque.
Oui ! C’est le moment ! Perverse, elle ralentit le mouvement, pendant que sa
main droite masse les testicules. Sa bouche s’emplit d’un sperme amer et
salé, et Robert crie.

Elle s’assied, en tailleur, la bouche pleine.

– Regarde-moi ! Regarde ! ! ! !

Elle laisse son jus dégouliner de sa bouche, sur son menton, puis sur ses
seins, qu’elle masse sans douceur.

– Tu en veux ? C’est si bon !

Sa bouche s’écrase sur celle de Robert, et leurs langues se mélangent,
longtemps, longtemps, pendant que sa main caresse une verge qui a repris une
rigidité de pierre. Robert veut la retourner, et la prendre, mais une main
le repousse.

– NON ! C’est MON jour !

Nadine enjambe Robert. Sa main fébrile guide cette chose énorme entre ses
parois qui dégoulinent, et elle se l’enfonce, elle s’empale. Elle le
chevauche comme une bête en furie, elle halète, elle balbutie. Le gland
frappe sans pitié sa matrice, alors que son clitoris s’écrase sur l’arcade
pubienne de son amant.

– OH OUI, OOUUIII, t’aimeee, t’aimeeeee !

Ils râlent ensemble.

– Bonsoir, mesdames. Alors, on picole au calvados en pleine nuit, maintenant
?

– Eh quoi, puceau, on s’éveille en pleine nuit, maintenant ?

– Bon, disons que j’ai des voisins plutôt bruyants qui m’ont réveillé par
leurs cris indiscrets. ça m’a donné des idées, mais comme j’étais tout
seul…

– (Sophie) Je m’éclipse ! Tu m’as inspirée, Niko. C’est pas bien amusant,
que Jérôme dorme comme une paillasse. On va arranger ça !

Elle se lève, pendant que Jeanette range les tasses et les verres, puis
ajoute :

– Oh, à propos, il se passe de drôles de trucs, sur le toit de la grange.
J’ai vu comme un groupe de petits animaux, qui y courraient dans tous les
sens…

Niko se rembrunit.

– Je vais jeter un coup d’œil. Tu m’accompagnes, la puce ?

Ils traversent la cour, et entrent dans la grange. Niko met l’éclairage
minimum. Dans la partie des lapines, Léna et Angel sont occupées à lécher
Nora sur tout le corps. Mais des couinements leur parviennent de l’autre
extrémité.

– Ben mon cochon, on aura tout vu !

Un petit groupe de lapins mâles fait cercle autour d’un curieux assemblage.
André Sébastien se fait enculer par Eddy, qui est lui-même enculé par
Chris.

– Quelle bande de porcs, ces lapins !

Niko et Jeanette arrivent sur le toit.

– Que fait ici ce matelas pneumatique ? ? ?

– Euh… c’est ici que je me fais bronzer nue à l’abri des regards
indiscrets…

Ils inspectent le toit, et tombent sur Maurice et Mélanie, serrés l’un
contre l’autre, le cou levé vers une lune qui s’estompe.

– Ne dérangeons pas les amoureux, dit Niko. C’est l’heure de retourner au
dodo.

Jeanette se dirige vers le matelas pneumatique. Elle laisse glisser son
peignoir et se retrouve nue. Sans aucune pudeur, elle se masse les seins et
la chatte.

– Eh, puceau, ça te dirait une petite tourloute au clair de lune ?

Un sourire éclaire la face moustachue.

– Pourquoi, « petite » ? ? ?
San José, Juin 2001. © Jeanne Libon

(Jeanette).  jeanett728@earthlink.net
Première publication sur Vassilia, le 24/06/2001
Ce texte a obtenu le 2ème prix ex aequo du « concours des lapins » organisé
par notre site au printemps 2001

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Une réponse à Les Lapins par Jeanette

  1. Alteralter dit :

    Assez décevant, ce récit semble bourré de références que seuls les happy-few peuvent comprendre

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